Bérénice fut représentée pour la première fois à la cour du roi Louis XIV en 1670. Cette pièce est très intéressante, puisqu'il n'y a pas, en soi, de dénouement tragique, de suicide, de meurtre, de morts. L'action se déroule dans une unité de temps tragique. "La machine infernale" de Cocteau se met en marche dès la scène d'ouverture. Cependant cette pièce dénuée de la radicalité du dénouement tragique amène à une amertume, et nous pourrions allez jusqu'à dire l'absence d'une catharsis (...)
[...] Lorsqu' Alain parle de la passion il explique que l'homme en tentant d'enfouir ses émotions les redouble, d'où il vient une sorte de superstition qui lui fait croire qu'il n'y peut rien, ce qui étend l'attrait et l'aversion à toutes choses et à toutes les personnes qui réveillent l'émotion habituelle Ici, s'ajoute l'idée de fatalité, qu'un collier de malheur se construit autour du cou des personnages, et que chaque incidents accroît le poids de l'affliction. Ah, Rome! Ah, Bérénice! Ah, prince malheureux! Pourquoi suis-je empereur ? Pourquoi suis-je amoureux ? (p.94, Bérénice, Racince, Edition Richard Parish ) Nous pouvons donc, d'une certaine manière, parler de passion par cette difficulté d'aimer, bousculée par une force contraire, par une loi. Cependant, nous pouvons l'observer dans le fameux roman de Goethe Les souffrances du jeune Werther, passion ne rime pas avec temps mais avec compte à rebours, précipitation. [...]
[...] Je me suis crue aimée. Au plaisir de vous voir mon âme accoutumée Ne vit plus que pour vous. Ignorez-vous vos lois, Quand je vous l'avouai pour la première fois ? ( p.87, Bérénice de Racine, Edition Richard Parish) Continuons avec l'amour de Titus. Celui-ci est plus complexe car nous pourrions dire qu'il est double: celui destiné à Bérénice, et celui à son peuple. L'empire est le seul mariage convenable à Titus ainsi que les lois lovées dans son sein. [...]
[...] L'horloge tragique est entre les mains d'un personnage. La fatalité existe dans les actes, et dans la décision de Titus, mais dans sa temporalité. Les personnages presse le destin, presse le temps, par désir de réponses, de choix. Il n'y a pas ce cercle immatériel formé par l'intrigue tragique resserrant petit à petit les personnages vers leurs destin. Remarquons que l'empereur et Bérénice entretiennent une liaison depuis déjà cinq ans. Leur amour n'est pas à révéler, n'est pas à déclarer, il existe. [...]
[...] L'Empereur de Rome, Titus entretient une liaison depuis cinq années avec la reine de Palestine Bérénice. Titus souhaiterait se marier avec celle-ci cependant la loi de Rome l'interdit. Parallèlement à cette intrigue Antiochus, un ami de Titus, déclare sa flamme enfouie depuis cinq ans à Bérénice. La reine repoussera ses avances et son amour jusqu'à la fin de la pièce. Titus décide d'obéir aux règles de la cité dont il est maître et refuse d'épouser Bérénice : pas de morts au dénouement, mais des larmes, une amertume, une fatalité consentie. [...]
[...] La mort du dénouement enlève souvent cette notion de constat tragique qui était parfois apporté par le choeur dans les pièces antiques. Racine, d'ailleurs, se réclame des auteurs antiques et de la simplicité de leurs intrigues. L'absence de sang au dénouement, nous force en tant que spectateur a considéré une dernière fois la scène qu'elle soit dramaturgique et scénique, il y a cette conscience d'abandon, d'une observation globale. Le tableau est triste et pathétique, et la force de cette inaction, de ce refus de combattre, de se combattre amène une autre notion d'héroisme, un autre image de la grandeur. [...]
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