Charles Baudelaire (1821-1867) est un poète postromantique considéré comme l'initiateur de la modernité par l'audace de ses images, son goût de la contradiction et l'originalité de son oeuvre. Les Fleurs du mal, son recueil de poèmes en vers, fut mal compris lors de sa parution en 1857 et lui valut même un procès. Il est aujourd'hui considéré comme un chef d'oeuvre incontournable dans l'évolution de la poésie.
"A une dame créole" est un sonnet en alexandrins adressé à une femme de l'île Bourbon, tiré de la première partie du recueil, dans lequel le poète peint un portrait élogieux.
(...) Une femme idéale : la "dame" n'est présentée qu'à partir du quatrième vers. L'anacoluthe du vers 2, "J'ai connu", marque l'intervention de l'auteur par le pronom personnel de première personne, mais c'est la seule fois dans le sonnet, mais elle utilise aussi un passé composé pour signifier qu'il s'agit d'un souvenir, tandis que les autres verbes conjugués des deux quatrains sont tous au présent, ce qui rapproche la jeune femme et lui donne une sorte de beauté intemporelle. Le second quatrain est ainsi consacré à cette beauté, avec un important champ lexical du corps, en particulier du visage : "son teint", "son sourire", "ses yeux", "la brune", le "cou" suggérant des mouvements du visage gracieux ; cette grâce que l'on retrouve dans sa physionomie et sa démarche, comme le montre le vers 7. Les contrastes, "pâle et chaud", ainsi qu'une attitude à la fois sensuelle, comme l'indique la comparaison "comme une chasseresse", et distinguée, "noblement maniérés", semblent fasciner le poète, d'où l'importance des sensations visuelles dans ce quatrain. Les hyperboles, "brune enchanteresse", comme l'assimilation à une déesse, "chasseresse", idéalisent ce portrait. On peut noter également que le vers 8 traduit par sa régularité, puisqu'il s'agit d'un tétramètre, l'assurance naturelle de la jeune femme (...)
[...] Charles Baudelaire (1821-1867), Les Fleurs du mal, Spleen et Idéal »,1857. A une dame créole LXI 1 Au pays parfumé que le soleil caresse, J'ai connu, sous un dais d'arbres tout empourprés Et de palmiers d'où pleut sur les yeux la paresse, Une dame créole aux charmes ignorés Son teint est pâle et chaud ; la brune enchanteresse A dans le cou des airs noblement maniérés ; Grande et svelte en marchant comme une chasseresse, Son sourire est tranquille et ses yeux assurés. [...]
[...] A une dame créole est un sonnet en alexandrins adressé à une femme de l'île Bourbon, tiré de la première partie du recueil, dans lequel le poète peint un portrait élogieux. Mais ce portrait semble prendre une dimension quasi mystique. Ce sonnet s'articule nettement en deux mouvements : tout d'abord dans les deux quatrains le poète nous présente une jeune femme exotique qu'il idéalise, puis il la représente ensuite comme une muse. I Le portrait idéal d'une jeune femme exotique : Le souvenir d'un ailleurs : l'adjectif créole dans le titre, repris dans le vers donne un cadre exotique toujours valorisé par Baudelaire. [...]
[...] On y retrouve ainsi l'opposition classique entre les quatrains et les tercets, connue depuis la Renaissance. Cette subordonnée ainsi que l'emploi des verbes au conditionnel, feriez et rendraient montrent qu'il s'agit d'un rêve, d'un désir, celui de faire venir cette femme en France, que l'hyperbole vrai pays de gloire désigne. Le vers 10 évoque évidemment Paris, bords de la Seine où l'auteur se trouve, tandis que la verte Loire fait songer inéluctablement aux poètes de la Pléiade. C'est donc le pays des poètes Un effet de miroir : Les nombreuses correspondances entre les deux parties du poème en soulignent les oppositions : la dame est devenue Madame avec une majuscule, le pays de gloire renvoie au pays parfumé l'abri des ombreuses retraites rappelle le dais d'arbres tout empourprés enfin les fascinants grands yeux rappellent les yeux assurés du vers 8. [...]
[...] Dans les tercets au contraire, cette suggestion est explicite. Ainsi devient-elle une statue qu'on admire, comme l'indique le vers 11, qui est un tétramètre : Belle digne / d'orner les antiques / manoirs, C'est aussi une muse dominatrice qu'évoque le poète dans le dernier vers, avec l'adjectif soumis et la comparaison qui suit, qui indique que le poète veut être esclave de la beauté : plus soumis que vos noirs L'anacoluthe Vous feriez du vers 12, qui est aussi un tétramètre, lui donne également un caractère dominateur. [...]
[...] Les hyperboles, brune enchanteresse comme l'assimilation à une déesse, chasseresse idéalisent ce portrait. On peut noter également que le vers 8 traduit par sa régularité, puisqu'il s'agit d'un tétramètre, l'assurance naturelle de la jeune femme : Son sourire / est tranquille et ses yeux / assurés. d'autant plus qu'il utilise des allitérations en et en Par ailleurs, le contre-rejet du vers 5 met en valeur sa séduction, ainsi que les connotations musicales des mots enchanteresse airs et maniérés On retrouve dans ce quatrain les rimes croisées de la strophe précédente, et chaque quatrain ne fait qu'une phrase. [...]
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