Marivaux n'a pas cherché à rester dans la lignée de Molière mais a créé une nouvelle forme de comédie qui passe exclusivement par les jeux du langage. L'originalité de ce langage dramatique fut si frappante pour ses contemporains qu'un néologisme a été inventé pour le désigner ; c'est le marivaudage. L'île des Esclaves, malgré sa brièveté prouve que l'exploration du langage, au delà de son aspect ludique, possède une dimension philosophique et morale essentielle. Le langage chez Marivaux est en effet tantôt auxiliaire de la sincérité et du vrai, tantôt complice de la duplicité et du mensonge
[...] Le langage chez Marivaux est en effet tantôt auxiliaire de la sincérité et du vrai, tantôt complice de la duplicité et du mensonge. Spécificité du marivaudage dans l'île des esclaves Dès la première scène de la pièce, le projet de réforme des cœurs et des actions est lié à une remise en cause de la langue d'Athènes En effet, Arlequin dit à Iphicrate dès le scène1 vous parlez la langue d'Athènes, mauvais jargon que je n'entends plus L'enjeu moral sera donc aussi un enjeu linguistique et la réflexion sur le langage occupe une place importante voire centrale dans le déroulement de l'action et l'évolution des situations. [...]
[...] C'est à dire que vous jouirez modestement de votre bonne fortune et que vous ne lui ferez point de peine ? scène 5). Les jeux du langage Le langage comme miroir social Relais de la sincérité entre les personnages, le langage agit ici comme un miroir proposant alors un reflet fidèle du tempérament et des sentiments. Il est également celui de la condition sociale : en effet, malgré le renversement établi par Trivelin, les maîtres ne cessent d'user d'un registre soutenu voire précieux tandis que les valets usent d'un langage plus populaire formé d'onomatopées et de jurons. [...]
[...] Au XVIIIe siècle, du vivant même de Marivaux, le terme était couramment associé à une disproportion entre une extrême finesse d'expression et la légèreté des sujets traités. Le jugement de Voltaire le montre clairement : peser des riens avec des balances en toiles d'araignée De même, La Harpe reprochait au marivaudage ses néologismes et ses irrégularités par rapport au langage classique : c'est le mélange le plus bizarre de métaphysique subtile, de locutions triviales, de sentiments alambiqués et de dictons populaires. Par la suite, le marivaudage perd sa connotation péjorative. Ainsi, de manière courante, le mot évoque l'idée d'un badinage spirituel et galant, complexe et ludique. [...]
[...] Hypocrisie et coquetterie La contradiction principale qui rend critiquable le comportement des maîtres est le décalage entre ce qu'ils disent et ce qu'ils font, entre ce qu'ils ressentent et ce qu'ils expriment. La version masculine de cette tare est l'hypocrisie et la galanterie, sa version féminine étant la vanité et la coquetterie. En effet, les soi-disant marques d'amitié d'Iphicrate sont démenties par ses mauvais traitements ne sais-tu pas que je t'aime ? Oui mais les marques de votre amitié tombent toujours sur mes épaules scène 1). [...]
[...] La liberté d'expression La libération sociale est indissociable de celle de la parole ce qui a pour effet chez Cléanthis de déchaîner sa verve ce qui provoque chez elle un véritable défoulement que voulez-vous que je vous dise ? Quand on a de la colère, il n'y a rien de tel pour la passer que de la contenter un peu, voyez-vous, quand je l'aurai querellée à mon aise une douzaine de fois seulement, elle en sera quitte, mais il me faut cela - scène 3). Alors que chez Arlequin cette libération prend la forme de gaieté correspondant à son caractère enjoué. [...]
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