[...] Un bon exemple est le poème « Mai » écrit dès 1902 alors que son amour pour Annie Playden vient de se terminer. Ce texte est déjà en lui-même de par sa forme une rencontre de la tradition et du moderne : le choix classique de l'alexandrin côtoie l'absence de ponctuation et une structure éclatée avec une troisième strophe de cinq vers (un quintil) qui introduit une rupture avec les quatrains des autres strophes (...)
[...] Le Temps comme passage : _ L'image du fleuve. Pensant probablement à Héraclite (qui comparait la fuite du temps à l'eau d'un fleuve), Apollinaire attribue au fleuve cette charge symbolique de représenter le temps qui passe, qui emporte la barque loin des jolies dames c'est-à-dire des souvenirs douloureux mais aussi permet la jouissance de nouveaux spectacles (le cortège, le paysage rhénan de mai) _ L'image du cycle des saisons. Apollinaire fait un recyclage original de Mai qui est censé représenter un mois printanier qui prédispose aux nouveaux amours. [...]
[...] Le lyrisme pudique : la disparition de l'être aimé _ L'effacement de traces directes du thème de l'amour perdu. La rupture du quintil est nette : il n'y a plus de je ni de vous ni de connotations affectives comme si et tant En apparence, la figure féminine qui dominait les deux premières strophes est effacée littéralement, remplacée par de nouveaux personnages : le cortège des bêtes (énumération du vers 10) ; les tziganes ; le régiment suggéré par le son un fifre lointain Cet effacement se poursuit encore avec la dernière strophe : cette fois, ce sont les êtres vivants qui disparaissent au point de ne laisser que des traces ruines C'est un champ lexical d'une vie sans les humains qui est décrite : vigne rosiers osiers roseaux fleurs _ Le symbolisme de l'absence : la traduction pudique de l'amour déchu. [...]
[...] Pourtant, ce lyrisme convenu qui trouve une dimension romantique avec le cadre du paysage rhénan est dépassé et renouvelé par Apollinaire qui fait ainsi la preuve de toute son originalité. Un bon exemple est le poème Mai écrit dès 1902 alors que son amour pour Annie Playden vient de se terminer. Ce texte est déjà en lui-même de par sa forme une rencontre de la tradition et du moderne : le choix classique de l'alexandrin côtoie l'absence de ponctuation et une structure éclatée avec une troisième strophe de cinq vers (un quintil) qui introduit une rupture avec les quatrains des autres strophes. [...]
[...] Elles témoignent d'une permanence des souvenirs même si le temps a opéré sa destruction. La fait que la vigne vierge et des rosiers recouvrent les ruines signale que les souvenirs sont avec le temps honorés avec émotion (la rose, symbole classique de l'attachement amoureux) et innocence (virginité de la vigne). _ Les plantes. Une accumulation osiers roseaux vignes met en évidence la résistance des plantes pourtant secouées par le vent du Rhin. Faut-il y voir une action du temps (le vent est un souffle qui est associé au fleuve rhénan) qui ne parvient pas à faire oublier les souvenirs qui ne peuvent s'empêcher de faire entendre leurs voix (les roseaux jaseurs Apollinaire rend bien cette ultime évocation grâce aux nombreuses sifflantes qui imitent le souffle du vent (sons C. [...]
[...] _ L'amour déchu doit laisser la vie nous emmener vers d'autres spectacles ; tout un cortège d'évènements et de futures beautés. L'ivresse de vivre qui a une dimension érotique les fleurs nues des vignes par ailleurs vierges finit par nous permettre de cohabiter avec les souvenirs de notre passé constitué de ruines de nos anciens amours. Conclusion : Sous les apparences d'un petit poème simple qui évoque une scène romantique (un homme sur une barque regarde s'éloigner les amours impossibles dans une atmosphère de printemps orageux), Apollinaire diffuse un message complexe, laissé à la libre interprétation du lecteur et qui permet à plusieurs niveaux de compréhension de cohabiter et dialoguer entre-eux. [...]
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