Tout d'abord, le narrateur, dans le paragraphe précédent, a décrit l'émerveillement qu'a provoqué en lui la vue de la main de son enfant et a décrit l'amour absolu comme la seule chose capable de donner un sens à la vie humaine. Dans le premier paragraphe, il ramène cette réflexion sur l'amour à une période précise, le mois de "septembre 1936", où il se trouve seul avec sa fille. Il s'adresse à elle à la deuxième personne du pluriel, "vous", ce qui étonne puisque l'enfant n'a que 8 mois. Cet emploi traduit un émerveillement, un amour et un respect très forts : l'enfant est presque idéalisé (...)
[...] Les républicains veulent éviter que la droite n'établisse une dictature fasciste. C'est ce qui se produit puisque lors de la défaite des républicains, Franco établit la dictature en Espagne. Le narrateur fait rebondir le texte sur le terme "journaux" pour évoquer un souvenir: sa fille pensant qu'il disparaissait derrière les journaux pour jouer à cache-cache. Il joue ensuite sur le sens du verbe "disparaître", puisqu'il explique qu'il disparaissait réellement. En effet, si lui est conscient, sa fille ne l'est pas encore, ainsi le seul lien qui les unit est celui du regard. [...]
[...] Breton fait allusion à sa "fameuse maison inhabitable de sel gemme", qui semble être une métaphore poétique. En effet, le motif du cristal est récurrent chez Breton, qui a déclaré qu'il rêvait que sa vie, sa maison, ce qu'il écrivait apparaissent comme du cristal, comme des "cubes de sel gemme". Le cristal constitue un idéal esthétique par sa transparence, sa clarté, sa luminosité et peut s'apparenter ainsi à l'amour pur, absolu. Le narrateur déclare ensuite songeais dans l'intervalle des journaux", c'est à dire entre ses lectures des journaux: le narrateur établit ainsi une alternance entre la sphère privée, plaisante, proche du rêve, et la sphère collective, à laquelle il est ramené par l'intermédiaire des journaux. [...]
[...] Il doit être fou, c'est-à-dire absolu, libre, conciliant communication des cœurs et amour charnel. En élargissant sa réflexion à l'humanité tout entière, et en souhaitant à sa fille d'être "follement aimée", Breton fait en quelque sorte un appel universel à l'amour dans cette lettre qui de fait dépasse la sphère privée, s'adresse à la sphère collective agitée par les guerres. En aimant sa fille et la femme en général, Breton aime l'amour lui-même, et en écrivant à sa fille, il écrit à tous les hommes. [...]
[...] Née en 1935, elle n'a que 8 mois au moment de l'écriture de la lettre, qui lui est adressée pour ses 16 ans. Breton est amené à écrire cette lettre lorsque sa femme doit se séparer de lui pendant un mois et le laisse seul avec l'enfant. Dans ce texte, Breton exprime à sa fille avec émotion, dans un registre qu'on pourrait presque qualifier de lyrique, le profond amour qu'il lui porte, en tant que fruit de son union amoureuse avec Jacqueline, et même peut-être en tant qu'incarnation de la femme et de l'amour. [...]
[...] Il insiste encore une fois en employant la répétition de l'expression "comme la seule" "comme la seule". Cette conciliation dont parle Breton, on comprend qu'il s'agit de l'amour absolu, de l'amour fou et que cet amour est ce qui permet à l'homme de s'élever, de donner un sens à sa vie. Breton écrit ici un véritable hymne à l'amour, qui est une "merveille" et une "chance", et qui est surtout l'unique moyen pour l'homme de sortir de sa condition, dont Breton a une vision négative. [...]
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