L'"Agamemnon" d'Eschyle, premier volet de la trilogie liée intitulée L'Orestie, constitue à la fois une pièce de théâtre autonome et une ouverture vers les "Choéphores" et les "Euménides". Le passage qui nous intéresse constitue le début du cinquième et dernier épisode avant l'exodos. Situé à l'extrême fin de l'oeuvre, cet extrait met en scène le triomphe de Clytemnestre qui se vante du double meurtre d'Agamemnon et de Cassandre dont les corps sont étendus à ses pieds (...)
[...] La dernière tirade s'ouvre, quant à elle, sur la formulation d'un "serment"(v.1431). Clytemnestre ne pose donc bien qu'à la fois comme accusée et comme avocat de sa propre cause, tandis qu'elle semble attribuer au choeur le rôle d'arbitre en désignant les vieillards comme des "juges implacables"(v.1421). Pour être hostile, le tribunal n'en reconnaît pas moins le pouvoir rhétorique de la reine dont il "admire la langue"(v.1309). Conformément à la règle de construction de l'éthos oratoire, Clytemnestre veille à donner à son discours un sujet d'énonciation digne de foi. [...]
[...] C'est ce qu'elle fait en affirmant ne pas redouter son adversaire" je réponds, vous le savez, d'un coeur sans crainte"(v.1402),"parle de vaincre par la force/ pour devenir mon maître"(v.1423-1424) et même être indifférente à son jugement" Vous pouvez vous en réjouir ou non"(v.1394),"que tu me loues, que tu me blâmes/ peu m'importe"(v.1403-1404). La menace se précise encore aux vers 1424-1425 où la subordonnée hypothétique introduite par la conjonction"si" a valeur de condamnation:"mais si un Dieu en décide autrement/ tu apprendras, bien qu'un peu tard, à être sage". Il apparaît ainsi que loin de résoudre l'intrigue, le passage multiplie les double -fonds oratoires. De fait, rien ne dénoue moins que ce faux dénouement qui est un vrai morceau de bravoure rhétorique. [...]
[...] LE CORYPHEE J'admire ta langue - comment ta bouche insolente ose-t- elle triompher sur ton époux? CLYTEMNESTRE Vous voulez m'éprouver comme une femme sans réflexion, mais je réponds, vous le savez, d'un coeur sans crainte: que tu me loues,que tu me blâmes, peu m'importe - voici Agamemnon, mon époux, tué de cette main, son corps est mon chef-d'oeuvre de justice, et voilà tout. LE CHOEUR Femme, quel aliment affreux tiré du sol ou quel poison surgi des flots marins ta folie a elle absorbé pour imposer ce sacrifice en retranchant, en refoulant les cris du peuple qui te maudit? [...]
[...] Situé à l'extrême fin de l'oeuvre, cet extrait met en scène le triomphe de Clytemnestre qui se vante du double meurtre d'Agamemnon et de Cassandre dont les corps sont étendus à ses pieds. Le passage se compose de deux parties essentielles: la longue tirade de Clytemnestre à peine interrompue par le coryphée(v.1372 à 1406) expose les faits et amorce la vigoureuse plaidoirie de la criminelle convaincue du bien-fondé de son acte de vengeance. La seconde partie de l'extrait se compose du violent face -à -face avec le choeur où alternent les parties chantées et les parties narrées, accentuant par cette opposition formelle le conflit qui sépare les deux parties. [...]
[...] C'est ainsi que gisant il vomit sa vie et souffle par sa plaie un jet de sang qui siffle en me couvrant d'une sombre rosée sanglante, aussi douce pour moi que la pluie de Zeus pour les campagnes quand le grain commence à germer. Tels sont les faits, vénérables vieillards d'Argos. Vous pouvez vous réjouir ou non. moi, je m'en vante. Et s'il est une libation qui convienne à un tel cadavre, alors celle-ci est juste et plus que juste, tant cet homme dans ce palais avait rempli d'afflictions le cratère maudit qu'il vide à son retour. [...]
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