Inspiré par Claude Bernard, Hippolyte Taine et par les travaux du Docteur Lucas sur l'hérédité (L'Hérédité naturelle), Zola illustre ici son projet naturaliste. Jacques est déterminé par le milieu et l'hérédité. L'auteur valide la théorie déterministe en mettant Jacques « en situation ». Loin de s'appuyer sur une intrigue hasardeuse, le récit prend la forme de l'expérience.
On sait que la tare, la « fêlure » héréditaire, affecte plusieurs membres de la branche des Macquart, sous forme de violence et de névrose criminelle. Il est logique que les meurtres crapuleux, passionnels, et que les viols s'enchaînent. Le suicide de Flore et le déraillement complètent ce tableau tragique (...)
[...] Elle était morte. Ce colosse broyé prenait l'affreuse tristesse d'un cadavre humain, énorme, de tout un monde qui avait vécu et dont la vie venait d'être arrachée, dans la douleur.» Quant à la nouvelle machine de Jacques, elle est plus indocile que la précédente : sa nouvelle machine dont il avait le pucelage et qu'il commençait à bien connaître, n'était pas commode, rétive, fantasque, ainsi que ces jeunes cavales qu'il faut dompter par l'usure.» A la fin du roman, Jacques succombe sous ses roues après sa bagarre avec Pecqueux. [...]
[...] Fêlure héréditaire et bête humaine Le titre du roman suggère la violence et la bestialité. La métaphore animale est centrale dans le texte et caractérise la plupart des personnages. Roubaud tue Grandmorin par jalousie ; lui-même avait violé la jeune Louisette. Il est qualifié de cochon lorsque Roubaud l'égorge. Cabuche est un vagabond quelque peu demeuré. Bête violente il a déjà été meurtrier. Misard, le garde-barrière, empoisonne sa femme. Flore est une fille sauvage et rude, comme la région désolée de La Croix-de-Maufras. [...]
[...] La Lison est une machine-monstre, une femme docile, une femme- jument. L'accident la montre comme une bête vivante, et nous passons du mécanique à l'organique : un instant on avait pu voir, par ses entrailles crevées, fonctionner ses organes, les pistons battre comme deux coeurs jumeaux, la vapeur circuler dans les tiroirs comme le sang de ses veines et son âme s'en allait avec la force qui la faisait vivante, cette haleine immense dont elle ne parvenait pas à se vider toute. [...]
[...] L'aveu du meurtre, le flot montant de cette chose obscure, énorme, mène Jacques à l'étranglement, à l'étouffement. L'explosion de la crise le met hors de lui et c'est alors qu'il assassine Séverine : Des morsures de feu, derrière les oreilles, lui trouaient la tête, gagnaient ses bras, ses jambes, le chassaient de son propre corps, sous le galop de l'autre, la bête envahissante.» Ses pulsions meurtrières le réduisent à l'animalité, à cette sauvagerie qui le ramenait avec les loups mangeurs de femmes, au fond des bois Derrière la civilisation, se cacherait donc une violence primitive et animale ce qui confère, à la fin du XIXe siècle, un caractère moderne à la démarche de Zola. [...]
[...] Le roman est naturaliste par le refus de Zola d'idéaliser le réel. Le récit, ménageant souvent des attentes dramatiques comme dans la scène du déraillement, n'économise aucun détail horrible, quitte à choquer les lecteurs et le bon goût : meurtre de Grandmorin, assassinat de Séverine, suicide de Flore. A l'époque, le sang et les couteaux sont à la une de la nouvelle presse à sensation ou des romans policiers lus par un public avide d'émotions fortes. La structure du roman repose sur deux grands moments : l'assassinat de Grandmorin et le meurtre de Séverine par Jacques. [...]
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