Le romancier naturaliste, pour étudier l'homme aux prises avec son milieu, "une maison de verre laissant voir les idées à l'intérieur", se montre soucieux de tisser, sur la trame narrative, la peinture d'un cadre fidèle au réel.
Ainsi, narration et description se mêlent étroitement et l'on retrouve ce jeu des différents plans dans la mise en place des nombreux personnages. Cette peinture épouse le style et la langue du peuple. Enfin le souci réaliste du détail suggestif et le choix du lexique confèrent tout son relief à la fresque romanesque.
(...) Le premier mot du roman prénomme l'héroïne principale : Gervaise, attirant l'attention du lecteur. Le simple fait de l'appeler par son prénom la lui rend plus familière. La même proposition évoque sobrement et rapidement Lantier, afin de susciter le même sentiment auprès du lecteur que pour sa femme. D'emblée, il est projeté dans un univers réel où ces deux personnages apparaissent importants, bien qu'aucune description n'en soit faite. Le temps est le plus-que-parfait (avait attendu, ligne 1 ; s'était assoupie, ligne 2), temps de l'antériorité qui indique que l'action avait déjà commencé.
Puis, l'imparfait est le temps prédominant du texte et l'on ne connaît ni le début ni la fin de
l'action exprimée. Cette valeur de temps non défini estompe la précision de la fresque en empêchant l'émergence d'une action principale. Cependant, deux fonctions de l'imparfait se mêlent ici :
- l'imparfait de description qui permet la mise en place du cadre
- l'imparfait d'habitude qui laisse émerger, malgré tout, les personnages de
Lantier et surtout de Gervaise.
(...) La mise en place des personnages contribue également à donner au lecteur cette impression de confusion qui accroît les images de la misère. Gervaise se détache de la fresque même si l'imparfait atténue cette perception. Son nom figure et l'individualise : elle est sujet des verbes et c'est son point de vue sur le faubourg qui nous est rapporté.
Omniprésent, mais absent, le narrateur s'efface devant ce qu'il y a à voir et délègue son point de vue à Gervaise, personnage principal du roman, qui se retrouve ainsi au coeur de la trame narrative. Son point de vue guide la progression du texte (...)
[...] elle était bien gentille ! Il y avait, dans ce gros bedon de cuivre, de quoi se tenir le gosier au frais pendant huit jours. Lui, aurait voulu qu'on lui soudât le bout du serpentin entre les dents, pour sentir le vitriol encore chaud l'emplir, lui descendre jusqu'aux talons, toujours, toujours, comme un petit ruisseau. Dame ! il ne se serait plus dérangé, ça aurait joliment remplacé les dés à coudre de ce roussin de père Colombe ! Et les camarades ricanaient, disaient que cet animal de Mes- Bottes avait un fichu grelot, tout de même. [...]
[...] Mais l'écriture fait appelle à d'autres sensations que la vue. L'olfaction est ainsi sollicitée : les odeurs de cuisine (ligne sont rares et la sensation d'étouffement prédomine : cet air, où les moucherons eux-mêmes n'auraient pas pu vivre (ligne 10). L'ouïe est également mise à contribution avec le contraste qui exprime la misère : du silence de crevaison (ligne qui est aussi celui du père Bru blotti comme une marmotte (ligne 12) sous l'escalier émergent toutes sortes de cris qui évoquent la souffrance ou la violence ; il s'agit des faims que l'on entend râler au début du texte, des plaintes de mioches affamés (ligne ou des danses (ligne 6). [...]
[...] Madinier ne parlait plus, menait lentement le cortège, qui le suivait en ordre, tous les cous tordus et les yeux en l'air. Des siècles d'art passaient devant leur ignorance ahurie, la sécheresse fine des primitifs, les splendeurs des Vénitiens, la vie grasse et belle de lumière des Hollandais. Mais ce qui les intéressait le plus, c'étaient encore les copistes, avec leurs chevalets installés parmi 45 le monde, peignant sans gêne ; une vieille dame, montée sur une grande échelle, promenant un pinceau à badigeon dans le ciel tendre d'une immense toile, les frappa d'une façon particulière. [...]
[...] [ ] Émile Zola, L'Assommoir, chapitre X (extrait 1). ÉTUDE ANALYTIQUE Introduction Le chapitre X est marqué par une accélération de la déchéance. Ne pouvant plus assumer leur loyer, les Coupeau habitent désormais sous les toits, dans le coin des pouilleux Gervaise a cédé le bail de sa blanchisserie aux Poisson, pour y ouvrir une épicerie fine. Puis, Nana fait sa première communion et le repas se déroule alors chez les Poisson, en même temps que ceux-ci pendent leur crémaillère. [...]
[...] Elle était là, à la rencontre du boulevard extérieur et des boulevards de Magenta et 15 d'Ornano, rêvant de se coucher par terre, lorsqu'elle entendit un bruit de pas. Elle courut, mais la neige lui bouchait les yeux, et les pas s'éloignaient, sans qu'elle pût saisir s'ils allaient à droite ou à gauche. Enfin elle aperçut les larges épaules d'un homme, une tache sombre et dansante, s'enfonçant dans un brouillard. Oh ! celui-là, elle le voulait, elle ne le lâcherai pas ! Et elle courut plus fort, elle l'atteignit, le prit par la 20 blouse. - Monsieur, monsieur, écoutez donc . [...]
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