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Jacques Weulersse laisse le plus souvent la parole aux coloniaux, aux colons, aux missionnaires ou aux noirs qu'il rencontre. Sa description permet au lecteur de brosser un tableau de situations coloniales très diverses. Cinq thèmes peuvent particulièrement retenir l'attention :
- La colonisation : Elle est présentée sous plusieurs formes, surtout par ses interlocuteurs. C'est tout d'abord l'assimilation à la française, critiquée parce qu'elle fabrique "des demis-français" ou des "antifrançais" (p.16). Parallèlement, le tout pouvoir des administrateurs, mais aussi leur mutation régulière créent des "commandants" solitaires éloignés de la masse de leurs administrés. A l'opposé, l'indirect rule mis en place au Nigéria (p.79), conduit des Anglais en "smoking" à jouer au cricket et l'émir à continuer de régner alors que dans la "ville indigène" mendient des autochtones. La colonisation capitaliste au Congo belge fait, quant à elle, des compagnies exploitantes des souveraines absolues de leur territoire. Ce qui provoque la misère d'une population noire réduite à un "esclavage économique". Enfin la tolérance apparente des colonies de peuplement populaires portugaises, où les métis sont les "meilleurs auxiliaires de la colonisation" est opposée à la ségrégation institutionnelle ("terrienne", "industrielle" et "politique", p.187) de l'Union sud-africaine : ce sont les buildings de Johannesburg installés sur les mines où règne la "colour bar" (l'interdiction faites aux employés noirs de prétendre à des postes qualifiés) ; c'est la ville de Durban, où la colonie "blanche et impériale" côtoie les "compounds nègres", le "cantonnement indien" et la masse des "coloured" métis (p.231).
- La langue : Le français est imposé et enseigné en AOF, mais cela au "risque de former des déclassés" (p.16). L'anglais au contraire, bien qu'elle soit la langue majeure en Afrique Australe, passe après l'Haoussa au Nigéria et reste peu parlée au Lessouto, où même les missionnaires français parlent couramment le Sessouto (...)
[...] Entre 1928 et 1930, la bourse de voyage Autour du monde lui permet d'épancher sa curiosité et son goût de la recherche. À 25 ans, il publie Noirs et Blancs qui est salué par toute la critique. Il est ensuite, à partir de 1932, pensionnaire de l'Institut français de Damas. Ses observations sur le Pays des Alaouites font l'objet de sa thèse de Doctorat. De retour en France en 1940, il enseigne dans divers établissement. À la fin de la guerre, Jacques Weulersee reprend ses études sur le terrain. [...]
[...] C'est ensuite le travail forcé sur la ligne Congo-Océan, où pour distraire la main d'œuvre, on procède à l'élection de Miss Mayombé (p. 106). L'auteur montre l' élevage humain pratiqué par l'Union Minière du Haut-Katanga (U.M.H.K.) et les recruteurs raflant des populations domestiquées et installées de force sur le bord des pistes. Près de Cap-Town, il rencontre enfin la misère de pauvres blancs une injure personnelle au prestige et à la dignité de tous les blancs (p. 227). Bien qu'il se livre peu, Jacques Weulersee, notamment par son parcours solitaire de l'Afrique Centrale, pratique également un voyage intérieur (p. [...]
[...] 170) rétorque-t- il ironiquement à l'ingénieur qui se plaint des envies de liberté de sa main d'œuvre noire. Mais Weulersee n'en reste pas moins un témoin de son temps : Déjà la déformation coloniale ? (p. 102), et de conclure : L'Afrique noire gît à terre, bloc informe encore et mal équarri. Nous le sculptons de nos mains puissantes, mais malhabiles. Quel visage saurons- nous lui donner, ami ou ennemi ? (p. 238). IV) Citations Les noirs ont tous des qualités, tous sauf le Noir citoyen, qui n'a que des défauts (p. 06). [...]
[...] La colonisation anglaise porte faux-col, la nôtre [française] se ballade, souriante, en débraillée (p. 65). Il est plus facile d'apprendre le haoussa à vingt d'entre nous, que notre langue à des millions de Noirs (p. 79). Quinze être humains réquisitionnés, et pour quel rendement ? Le portage on ne peut l'imaginer ; il faut l'avoir vu (p. 101). Et, par une singulière contradiction, au moment où l'on impose aux noirs l'effrayant fardeau de notre civilisation matérielle, on les prétend incapables de participer jamais à notre civilisation morale (p. [...]
[...] Depuis Dakar jusqu'à Durban, Jacques Weulersee traverse l'Afrique et ses multiples visages. En Afrique occidentale (première partie), son voyage le conduit à visiter deux des quatre communes du Sénégal, colonie endormie à découvrir le Soudan français et la forêt de Côte d'Ivoire. Quittant les rivages de l'AOF, il rejoint le Nigéria en barque. La jungle nigériane laisse place à la savane des émirats du nord. En Afrique centrale (deuxième partie), il fait l'expérience du portage, alors qu'il suit la ligne de chemin de fer inachevée du Congo-océan. [...]
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