Dans cette dernière lettre, où Voltaire élabore un travail critique sur les Pensées de Pascal qu'il reprend une à une, l'écriture épistolaire s'efface plus que jamais au profit d'une symétrie inversée. Il y a en effet, outre le contre modèle pascalien, la constitution d'une autre écriture philosophique. C'est le moment où Voltaire se fait plus philosophe que jamais en abordant des points strictement philosophiques.
C'est pourquoi, eu égard aux autres lettres, cette dernière apparaît d'abord comme un appendice sans cohérence avec le reste pour plusieurs raisons. D'abord, il n'est plus directement question de l'Angleterre, ensuite, on quitte le domaine de la réflexion pratique pour entrer dans celui de la réflexion théorique, on quitte le domaine de la vie pour celui du monde des livres, et enfin, on voit Voltaire à l'œuvre dans un nouveau genre, celui de la réfutation, guidé par le « parti de l'humanité », comme c'est écrit au début de la lettre. Il faudra montrer pourquoi, au contraire, cette lettre est bien plus une clef de voûte qu'un appendice, servant de point de départ rétrospectif à l'examen des différentes questions abordées précédemment, i.e. au fond, montrer en quoi elle est une justification théorique a posteriori.
Le début de la lettre distille déjà, avant notre extrait, des indications concernant le sens que prend cette réfutation. A la contemplation pascalienne est systématiquement opposée l'action et la vie de l'homme utile. Contre ce misanthrope sublime, il y a donc deux arguments qui sous tendent le débat, i.e. 1- la conviction que l'homme est de même nature que tout le reste de l'univers, donc qu'il n'y pas de mystère de l'existence humaine, et 2- cette existence humaine témoigne de la parfaite adaptation de l'homme à son milieu.
[...] L12 Le Or constitue l'embrayeur final de l'objection qui est bien sur inspiré par la philosophie anglaise. Les idées sont des copies des impressions sensibles, par conséquent, nulle idée qui ne vienne du dehors. Donc, si l'homme contemplatif peut penser, ce n'est qu'en vertu du dehors. Il a donc le choix entre penser donc, sortir de lui-même, ie rompre avec la contemplation, ou contempler sans avoir rien à contempler, donc ne pas contempler. L13-15 Conclusion logique : ou il ne pense pas, ie c'est un imbécile, ou il pense donc il est hors de lui-même. [...]
[...] D'où la lourde insistance sur le statut d'homme qui accentue la rupture entre cet homme étrange et inutile et l'homme commun au nom duquel Voltaire parle. L6-7 Avec cette nouvelle question, Voltaire reprend la démonstration. Nous avions laissé l'homme contemplatif seul avec lui-même. Que lui reste-t-il alors à contempler ? Sur quoi son esprit peut-il s'exercer ? Et bien, il ne lui reste finalement que son corps. En employant ce terme, Voltaire feint d'adopter le vocabulaire de la métaphysique pascalienne, mais ce n'est que pour mieux la tourner en ridicule. [...]
[...] C'est le moment où Voltaire se fait plus philosophe que jamais en abordant des points strictement philosophiques. C'est pourquoi, eu égard aux autres lettres, cette dernière apparaît d'abord comme un appendice sans cohérence avec le reste pour plusieurs raisons. D'abord, il n'est plus directement question de l'Angleterre, ensuite, on quitte le domaine de la réflexion pratique pour entrer dans celui de la réflexion théorique, on quitte le domaine de la vie pour celui du monde des livres, et enfin, on voit Voltaire à l'œuvre dans un nouveau genre, celui de la réfutation, guidé par le parti de l'humanité comme c'est écrit au début de la lettre. [...]
[...] Si l'homme est doté de sens, c'est pour en faire quelque chose, donc, à l'inverse, ne pas en faire usage, c'est refuser d'agir ainsi que Dieu l'a voulu. Nouvelle ironie puisque d'après Voltaire, Pascal se vante d'être un bon chrétien. Ce thème de la chrétienté est d'ailleurs souvent celui à propos duquel Voltaire attaque Pascal dans les lettres, par exemple aux pensées XV et XVIII. La décomposition des parties du corps puis leur juxtaposition peuvent enfin être entendues comme un début d'affirmation. [...]
[...] Mais, discuter ces questions nécessiterait un débat philosophique que Voltaire ne saurait accepter car elle comporte un trop grand risque de dogmatisme dans ses conclusions. Il faut donc se contenter, sur la base de la définition de ce qu'est une faculté, se contenter d'établir que la contemplation de la faculté de penser implique son exercice. L10 L'amplification rythmique permise par les trois ou fait un tableau de ce qu'il reste à l'homme contemplatif. Encore une fois, Voltaire feint de persévérer dans la fiction de l'homme contemplatif. [...]
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