Voltaire a repris une forme d'écriture assez particulière qui est celle du conte philosophique. Cela lui permet non seulement d'exploiter des thèmes philosophiques mais également de critiquer tout en étant léger et amusant. Candide est par ailleurs l'un des plus célèbres contes philosophiques. Le livre parait anonymement en 1759. Voltaire fait croire qu'il a trouvé un parchemin du docteur Ralph traduit de l'allemand. L'écrivain joue ainsi avec le travestissement afin de régler ses comptes avec le philosophe Leibniz ou plutôt son disciple Wolf, dont l'avatar comique semble bien être le docteur Pangloss (celui qui parle de tout et, de par son nom emblématique, prétend bien dire tout sur tout). Le livre sera condamné mais son scandale lui donnera un petit succès.
Le titre accumule à la fois un prénom et un concept philosophique nous promettant ainsi à la fois une histoire et une réflexion. Effectivement ce premier chapitre semble bien répondre à ces deux fonctions. Puisque sous la forme du conte, Voltaire contredit la théorie de l'optimisme selon laquelle tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, mais sans la détruire tout à fait puisque la plupart des personnages finissent par cultiver sagement leur jardin en renonçant à la métaphysique.
Nous nous demanderons ainsi comment ce premier chapitre, constituant l'incipit, remplit ses missions principales. Pour cela, nous étudierons dans un premier temps de quelle façon cet incipit joue son rôle de captatio benevolentiae. Puis dans un second temps nous mettrons en relief sa fonction de présentation du livre qui offre aux lecteurs deux attentes : un conte et une réflexion philosophique.
[...] Ici, l'écriture hyperbolique de Voltaire fait pénétrer le lecteur dans un monde presque merveilleux. Le château nous est par exemple présenté comme étant le plus beau : le château de monseigneur le baron était le plus beau des châteaux Pangloss, quant à lui est le plus intelligent : il est le précepteur qui enseigne la métaphysico-théologo-cosmolonigologie. Candide, lui, est le plus simple ; le baron est l'un des plus puissants seigneur et la baronne est la meilleure des baronnes possibles Mise en abîme : Voltaire, comme nous venons de le voir, fait entrer son lecteur dans un monde merveilleux, propre à celui du conte. [...]
[...] Critique de la vanité Voltaire critique également l'attachement aux privilèges de la noblesse. La chasse et la chapelle privée symbolisent l'affection que les nobles ont de leurs avantages. Il existe ainsi une certaine inégalité entre les classes, entre le baron et ses serviteurs. Pourtant, Voltaire oppose la prétention de richesse grande salle meute piqueurs grand aumônier et la basse réalité (le château avait une porte et des fenêtres il n'y a que de simples ornements de tapisserie chiens de basse-cour palefreniers vicaire Les serviteurs même, tout en affublant le baron du titre pompeux de monseigneur - sans gêne ni malice - rient de ses contes - (1. [...]
[...] Candide signifie en effet esprit le plus simple. Thunder-ten-tronckh tirant son nom de thunder qui veut dire orage en anglais connote une certaine puissance. Cunégonde est certes un prénom de princesse mais c'est un prénom qui connote l'érotisme. Pangloss enfin est celui qui parle tout le temps et dans toutes les langues. Cet incipit s'inscrit ainsi dans le merveilleux. L'écriture du conte Les formules du conte : Tout le monde connaît les fameuses formules propres aux contes telles que il était une fois Dans cet incipit, Voltaire, même s'il n'emploie pas directement cette formule, utilise des expressions semblables. [...]
[...] Voltaire semble là encore l'imiter : "71 quartiers", "350 livres". Virulente satire de la noblesse Rappelons tout d'abord Voltaire était un mondain qui a été déçu de ce monde. Il semble ainsi prendre un peu sa revanche sur la noblesse sur laquelle il fait une satire virulente. Critique du lignage : C'est tout d'abord une critique du lignage que Voltaire décrit ici. Le premier paragraphe notamment nous révèle l'attachement exagéré à la hiérarchie. Il est en effet dit : parce qu'il n'avait pu prouver que soixante et onze quartiers et que le reste de son arbre généalogique avait été perdu par l'injure du temps La noblesse donne une telle importance à leur noble arbre généalogique qu'un honnête homme est refusé comme époux, parce qu'il ne peut prouver que 71 quartiers (nombre d'ancêtres nobles) au lieu de 72, pedigree du baron, différence infinitésimale et dérisoire. [...]
[...] Ainsi, dogmatique, il n'a aucun contradicteur. Aussi, on nous avertit que ses discours sont ridicules. Pour le prouver, Voltaire devance le jugement du lecteur en annonçant que Pangloss enseigne la métaphysico-théologo- cosmolonigologie (1. 29) : cette dénomination intellectuelle s'achève burlesquement par l'expression - nigologie - (la science, logos en grec, des nigauds nigo La caricature de la philosophie de l'optimisme de Leibniz : Il est écrit que Pangloss prouvait admirablement qu'il n'y a point d'effet sans cause Cette allusion aux effets sans cause signale au lecteur averti que la philosophie, si l'on ose dire, en cause ici, est celle de Leibniz développé dans ses Essais de théodicée qui a inventé le principe de la raison suffisante et des causes finales. [...]
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