Le village des cannibales, Alain Corbin, Hautefaye, 16 août 1870, massacre
Le 16 août 1870, à Hautefaye, petite commune de l'arrondissement de Nontron, en Dordogne, un jeune noble est supplicié durant deux heures, puis brûlé vif sur le foirail, en présence d'une foule de trois à huit cent personnes qui l'accusent d'avoir crié « Vive la République ! ». Le soir les forcenés se dispersent et se vantent d'avoir « rôti » un « Prussien ».
[...] cela semble impossible aux yeux d'Alain de Monéys, mais parfaitement logique pour les assemblés de la foire qu'un membre détesté de sa caste soit partisan de la République. La logique politique d'Alain de Monéys est suspecte, il faut donc le tuer pour contribuer à la défense de l'empereur, de la Nation et de soi II. L'angoisse et la rumeur L'argent prussien Affirmation progressive du sentiment national : la guerre qui était celle de l'empereur devient peu à peu celle de la Nation toute entière Massacre dans une atmosphère de levée en masse : réaction de groupe visant à chercher la traître, le persécuteur à l'extérieur du groupe d'appartenance Fête nationale, célébration du souverain Fête nationale le 15 août pour célébrer le souverain : d'autant plus importante à Hautefaye que l'église a pour titulaire et patronne Notre- Dame de l'Assomption Le soir, un banquet est organisé, la commune retrouve le silence le plus complet à 22h La licence du foirail et l'étalage des marchandises Contexte de foire : relatif anonymat des acteurs, liberté inaccoutumée Le 16 août, c'est la foire aux bestiaux : lieu d'intense visibilité des symboles (blouse paysanne, bâton ou aiguillon servant à toucher la bête Précision horaire : exposition des bêtes le matin, l'après-midi est plus festif : on va boire à l'auberge. [...]
[...] Le procureur général de la cour de Bordeaux arrive le 18 au soir à Nontron, il est le lendemain sur les lieux du crime. Vers le déchiffrement de l'énigme Les émeutiers ne s'en prennent pas à l'Etat, ils se veulent les agents du pouvoir en place Affaire dans le prolongement des gestes de la Révolution : ils supplicient un membre de la Petite Vendée tant haïe Fonction du massacre : souder le rassemblement selon une psychologie unificatrice des foules IV. [...]
[...] Ceci est concrétisé par le détournement du symbole républicain de l'arbre de la liberté : il est orné d'un drapeau noir et de corps factices, il devient objet de mort Circulation de rumeurs disant que Bonaparte sera suffisamment riche pour payer les dettes de la France et l'impôt des 45 centimes. Se développe ainsi un bonapartisme populaire et anti républicain La logique de l'attachement Ascension progressive d'un solide attachement à la personne de Napoléon III en raison, notamment, de la légende napoléonienne. [...]
[...] La statue de charbon Dans le journal Le Nontronnais, le 20 août, les habitants de Hautefaye sont dits cannibales ivres de sang foule abrutie Massacre accompli dans la liesse, or Alain de Monéys a souffert, il se présente désormais comme une statue de charbon, figée dans les gestes de l'imploration Léonard Lamongie estime qu'il a été poussé par un mouvement de foule Campot se défend en disant je ne le frappais pas, c'était la foule qui le bourrait La populace des paysans Vif conflit entre les républicains et la société rurale, qu'ils comprennent mal : Alcide Dusolier, jeune avocat militant républicain dit qu'Hautefaye a été prise d'une sorte de folie comme celle qui, parfois, s'empare des bœufs dans les champs de foire, sous les morsures su soleil La guillotine aux champs Verdict le 21 décembre 1870 : quatre condamnations à mort, peines de prison, etc. [...]
[...] Le soir les forcenés se dispersent et se vantent d'avoir rôti un Prussien I. La cohérence des sentiments La paille et le joug Haine de la noblesse par la paysannerie du Sud-Ouest, la bourgeoisie rurale tente de d'accaparer, d'amplifier et de diffuser le discours anti- noble élaboré sous la Révolution : elle cherche à aviver la crainte paysanne d'un retour aux privilèges, c'est pourquoi Alain de Monéys, étant adjoint de la Commune, est repoussé de par son statut. La révolution de 1830 autorise le défoulement de cette haine, on s'en prend à nouveau aux châteaux + reprise de la violence verbale envers les nobles avec la chute de la monarchie de Juillet Les fleurs séditieuses Haine encore plus vive à l'encontre des curés, hostilité contre le clergé : à Hautefaye en 1860, seuls des hommes accomplissent leur devoir pascal. [...]
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