L'OUVRAGE
La Vie de Jésus d'Ernest Renan s'inscrit dans un contexte historique et religieux qui mérite d'être expliqué : il s'agit de l'atmosphère du Second Empire, où l'Eglise jouait un rôle officiel, où les cardinaux étaient de droit sénateurs et où les évêques contrôlaient l'Instruction publique.
Mais le XIXème siècle est également celui de la remise en cause de la religion. En effet, de nombreux philosophes ont entamé un travail de déconstruction de celle-ci, à l'instar de Proudhon (1809-1865) qui invite à se débarrasser de toute forme d'aliénation, qu'elle soit étatique, patronale ou religieuse, de Stirner (1806-1856) anti religieux pour qui l'individu doit cesser de se soumettre aux diktats de la société (notamment religieux) pour se soumettre à un principe de plaisir et d'authenticité. Mais il faut également citer Marx (1818-1883), atomiste, qui refuse dès son plus jeune âge la religion, imposée par les « superstructures » et Nietzsche (1844¬1900) à qui l'on doit la célèbre phrase : « Dieu est mort », et qui semble avoir voulu concurrencer la Bible avec son « Ainsi parlait Zarathoustra ».
Le XIXème siècle est en effet dominé par une interrogation que Joseph De Maistre, dès 1796, résumait en une formule : «Tout vrai philosophe doit opter entre deux hypothèses, ou qu'il va se former une religion nouvelle, ou que le christianisme sera rajeuni de quelque manière extraordinaire ». Une religion nouvelle, c'est le choix qu'on fait Saint-Simon (1760-1825) et Auguste Comte (1798-1857) avec la philanthropie saint- simonienne et la religion de l'humanité de Comte (« l'amour pour principe, l'ordre pour base, le progrès pour but »).
Ernest Renan s'inscrit donc dans un contexte où la religion est désacralisée par les penseurs mais reste bien présente et influente. Pour Ernest Renan, la religion n'est plus intouchable, ce qui lui permet de considérer que la biographie de Jésus doit être écrite comme celle de n'importe quel homme ce qui implique que la Bible soit soumise à un examen critique comme n'importe quel autre document historique. (...)
[...] En 1848, il est reçu premier à l'agrégation de philosophie. Agé seulement de vingt-cinq ans, il entreprend la rédaction de L'Avenir de la science qui ne paraîtra qu'en 1890. C'est un livre de jeunesse où s'affirme la certitude d'un déterminisme universel rejetant tout surnaturel et un culte lyrique et presque mystique de la science positive. Sa renommée s'affirme à partir de 1862 au retour d'une mission archéologique en Palestine au cours de laquelle il a la douleur de perdre sa sœur Henriette. [...]
[...] Les évangiles ne sont pas écrits avec la participation de la divinité. Jésus n'a pas d'origine divine. Renan explique que ce n'est pas l'exégèse des textes religieux qui lui permet d'arriver à ces trois conclusions. Au contraire, c'est en amont de l'exégèse, c'est à dire sans qu'il soit besoin d'y recourir, que Renan constate la négation du surnaturel. Ces constatations sont le fruit d'une expérience qui n'a point été démentie Les miracles sont des choses qui n'arrivent jamais ; les gens crédules seuls croient en voir. [...]
[...] l'opinion de Weizsaecker : le quatrième évangile n'est pas l'ouvrage de l'apotre Jean. Les discours sont presque entièrement fictifs ; mais les parties narratives renferment de précieuses traditions, remontant en partie à l'apôtre Jean. l'opinion de Réville : le quatrième évangile n'est en aucun sens de l'apôtre Jean. A savoir : Il a existé. Il était de Nazareth en Galilée. Il prêcha avec charme et laissa dans la mémoire de ses disciples des aphorismes qui s'y gravèrent profondément. [...]
[...] Renan explique que si l'on s'astreignait, en écrivant la vie de Jésus, à ne dire que des choses certaines, la vie de ce dernier tiendrait en quelques lignes1. C'est pourquoi, tout en admettant que les évangiles sont des «témoins peu sûrs Renan estime qu'il est permis de faire des conjectures. Pour le philosophe, les textes n'étant pas historiques, ne donnent pas la certitude ; mais ils donnent quelque chose Aussi, il estime qu'il ne faut pas les suivre avec une confiance aveugle, mais qu'il ne faut pas refuser de les utiliser comme des témoignages. [...]
[...] Renan revient ensuite à des travaux plus sérieux avec son Histoire des Origines du Christianisme (18631883). Restant fidèle à sa méthode consistant à rejeter, en matière religieuse, toute intervention divine et tout mystère pour n'accepter que les faits scientifiquement explicables et prouvés, il ne renonce pas cependant à aimer et à faire aimer la beauté, admettant lui-même qu'il est né romantique De 1887 à 1893, il écrit L'Histoire des Origines ou L'Histoire du peuple d'Israël où il montre bien que tout en rejetant les dogmes du catholicisme, il n'en garde pas moins une sensibilité chrétienne et continue d'admirer l'histoire judéo-chrétienne. [...]
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