(p 7-10) Le récit s'ouvre sur des indices spatio-temporels précis. Nous sommes le 29 septembre 1759, dans l'archipel Juan Fernandez, près des côtes du Chili, à bord du bateau La Virginie (p 7). Ces informations, extrêmement précises, appellent l'exotisme et permettent de développer un environnement hostile, souvent lié, dans l'imaginaire du lecteur, à des contrées lointaines. Le plus intéressant est que cette nature sauvage est introduite d'emblée : "A la fin de l'après-midi du 29 septembre 1759, le ciel noircit tout à coup (...)" et l'auteur ne perd donc pas de temps avec une scène d'exposition ou un incipit descriptif. La plongée in medias res permet de situer le récit par une simple énumération. On introduit d'abord la masse de l'équipage, qui s'inquiète peu de l'orage. Deux figures se distinguent puisqu'on les nomme : le jeune Robinson, dont on ne sait alors rien, et le capitaine van Deyssel. Le rythme est rapide, des ellipses permettent de n'évoquer que les moments importants, qui préparent le drame. Le point de vue adopté est intéressant : l'auteur choisit une focalisation externe et un regard scientifique (qui décrit avec précision, et un vocabulaire approprié, les phénomènes climatiques ou encore le bateau) ; une écriture historique, à l'aide de digressions. Ainsi nous sommes au XVIII ème et Robinson, comme beaucoup d'hommes de son époque, a quitté sa terre natale pour l'Amérique du Sud, espérant y faire fortune (...)
[...] Robinson, lui-aussi écrit : dans des livres devenus vierges par l'eau, il consigne les lois, que nous avons déjà analysées auparavant. Elément intéressant, Robinson entreprend d'écrire juste après avoir quitté l'oisiveté de la boue : l'écriture semble être un premier pas vers l'humanité retrouvée. Les lois visent à être intemporelles et générales, dès lors qu'elles sont inscrites, avec une matière organique provenant de l'île, montrant ainsi que Robinson est devenu comme maître et possesseur de son île. Il tient aussi un journal de bord, dont nous n'avons aucune retranscription, qui aurait pourtant permis l'utilisation d'une focalisation interne. [...]
[...] Ce sont les maximes de Benjamin Franklin qui le sortent de sa torpeur et un retour à l'écriture, inscriptions qu'il tond même sur le dos de ses moutons, souhaitant toujours se distinguer de l'animal. Un filet de fumée au loin. Effrayé, Robinson et Tenn songent à se barricader dans la forteresse mais vont finalement voir si les Indiens sont revenus. Ils pratiquent le même rituel que la dernière fois mais veulent sacrifier deux personnes. L'un d'eux s'enfuit en direction de Robinson. Le naufragé abat l'un des poursuivants et l'autre prend peur. 70-72) Le rescapé est réfugié avec Robinson dans la fortification et il s'endort contre Tenn. [...]
[...] C'est le jour des fêtes, des rires et des jeux. Et pour moi tu seras toujours l'enfant du dimanche p 168. Il est intéressant de voir, d'ailleurs que la définition du Dimanche, qui était d'abord un jour chômé a évolué : grâce à Vendredi, le dimanche est joie et spontanéité. Il est d'ailleurs étonnant que Robinson décide de nommer son nouveau compagnon par un jour de la semaine, alors que la temporalité a justement perdue son sens lors de l'explosion provoquée par Vendredi. [...]
[...] Vendredi l'a pourtant fait naître à la vie d'une manière incomparable et il ne peut pas imaginer sa vie sans lui : après son départ, il cherche dans la grotte à effacer ses souvenirs, tout oublier 165). En choisissant Vendredi et non pas la vie sauvage il est devenu un autre homme. Peut-être était-ce lui, le sauvage, depuis le début, et c'est en comprenant cela que Robinson décide d'attendre la mort, au fond de la grotte utérine, parcourant ainsi le temps à rebours . [...]
[...] La religion est une grande absente du roman. Robinson institue, certes, un jour jeuné (le vendredi) et un jour chômé (le dimanche, qui correspond au jour lors duquel Dieu s'est reposé après avoir accompli son ouvrage) mais il ne semble pas trouver dans la religion un réconfort à sa peine : il construit un temple (évoquant la mythologie gréco- romaine) où prier, la prière pouvant pourtant, dans la religion chrétienne, s'effectuer en tous lieux. Il n'a bien sûr personne pour officier et dès lors, ses dispositions absurdes, semblent l'ériger en grand ordonnateur de l'île : c'est lui qui la nomme Esperanza et la cartographie (prenant ainsi conscience du territoire sur lequel il évolue). [...]
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