Peut-on faire confiance aux médias ? Depuis l'affaire du faux charnier de Timisoara, les manipulations médiatiques de la guerre du Golfe ou encore l'orchestration politique de l'excès de zèle journalistique suscité par la vie extra-conjugale du président Clinton, la suspicion est sans doute plus que jamais de rigueur. Comment porter crédit à une presse toujours plus avide de sensationnel et dont la vocation d'information critique paraît ne plus pouvoir résister à l'attrait de l'événement en direct ? Cette inquiétante évolution s'inscrit dans le mouvement plus général d'une société où l'image et la communication sont devenues les tenants-lieu de toute culture. Internet contribue en particulier à accélérer la circulation de l'information, et à entraîner les salles de rédaction dans une course folle au "scoop". Le "slow news, no news" d'une certaine presse américaine est-il en train d'administrer la preuve que le journalisme est soluble dans le Web ? La télévision et sa dérive voyeuriste vers les "reality show" participe de cette même dynamique qu'Ignacio Ramonet, directeur du Monde diplomatique, tente, dans cet essai, de saisir sous ses multiples facettes (...)
[...] A la veille de l'ouverture des JO d'Atlanta, cet événement donne lieu à un gigantesque déferlement médiatique. Très vite, sans que rien ne le prouve, et malgré la prudence des autorités, la thèse de l'attentat s'impose. Dès le lendemain, la chaîne ABC n'hésite pas à parler d'un possible auteur : le Mouvement pour la réforme islamique. De son côté, le magazine Time pose en couverture l'interrogation suivante : Qui aurait pu placer la bombe dans l'avion ? et met en accusation de nombreux groupes islamistes. [...]
[...] Et l'irruption d'Internet a encore renforcé cette imbrication. - Paradoxalement, la rapide succession de nouvelles brèves et fragmentées produit un double effet négatif de surinformation et de désinformation : il y a trop de nouvelles mais trop peu de temps consacré à chacune d'elles. Ainsi, vouloir s'informer sans effort est une illusion qui relève du mythe publicitaire plutôt que de la mobilisation civique. S'informer fatigue, et c'est à ce prix que le citoyen acquiert le droit de participer intelligemment à la vie démocratique. [...]
[...] Les chefs sont devenus des hommes-métonymies comme il y a des hommes sandwichs. Ainsi, les verdict tels les sondages jugent moins un homme politique sur son action que sur la façon dont il a réussit à convaincre. C'est effectivement la personne même qu'il s'agit de juger, sa capacité à convaincre, sa psychologie, son caractère et non sa politique ! A ce titre, il n'y a pas de différence entre une émission politique et une émission grand public du samedi soir : ce que jugent les spectateurs dans les deux cas, c'est la performance en matière de mentir-vrai. [...]
[...] Si l'on considère qu'elle ne l'est pas, on ne la publie pas. D'un point de vu éthique, c'est un changement considérable. (Ryszard Kapuscinski, journaliste et écrivain polonais.) * Désormais, la télévision n'est plus seulement le premier média de loisirs, elle est aussi devenue le premier média d'information. Elle donne le ton et détermine l'importance des nouvelles et fixe les thèmes de l'actualité. Alors qu'il y a encore peu, le JT du soir s'organisait sur la base des informations parues, le même jour, dans la presse écrite. [...]
[...] Ainsi, au mépris de l'analyse prétendument facteur d'ennui, chaque information tend à être condensée et schématisée. II L'ère du soupçon * L'auteur distingue deux grands âges de la défiance face aux médias: - Pendant les années 1960-1970, on reprocha à la télévision d'être devenue un instrument du pouvoir et de vouloir manipuler les esprits pour le profit électoral du parti dominant ; on pensait alors que contrôler la télévision revenait à maîtriser le suffrage universel. Or, transmettre des idées et influencer les mentalités sont des opérations qui n'ont rien de simple, de mécanique et qui restent d'une extrême complexité. [...]
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