Le livre retrace l'histoire d'Esternome et de sa tentative de conquérir l'En-ville, puis celle de sa fille, Marie-Sophie Laborieux, fondatrice du quartier Texaco. Patrick Chamoiseau nous raconte ces deux vies dans leur intimité qui traduisent de nombreux mots – amour, passion, lutte, colère, espoir et désespoir, souffrance – comme de nombreux maux, parmi lesquels le combat contre les békés et contre le colonialisme dans le but de construire une véritable identité créole. Les deux vies racontées tour à tour montrent la lutte âpre des Martiniquais pour créer une authentique « Histoire », celle de cette lutte précisément.
Le récit est chronologique et, à travers les histoires des deux personnages, c'est bien l'Histoire de la Martinique depuis le XIXème qui défile à grands pas. Le lecteur peut suivre Marie-Sophie dans ses nombreux ‘djobs', où elle fait preuve de beaucoup de fierté et de dignité à l'égard de ses employés qui la traitent mal. A travers son histoire, c'est l'Histoire de la condition féminine que l'on observe. D'abord, les malheurs cachés de nombreuses femmes maltraitées par leurs employeurs, ou par les pirates, et qui doivent se battre plus que n'importe qui pour exister: « Je n'étais pas la seule à me percer le ventre. Que de misères de femmes derrière les persiennes closes… » Ensuite, leur prise de parole, elles qui vont jusqu'à se battre pour leur quartier quand le cœur des hommes n'y est plus. C'est également une partie de l'Histoire de France qui est dévoilée à travers un paradoxe : d'une part, l'idéal que représente la France pour les deux personnages ; d'autre part, le sentiment de haine qu'ils cultivent à l'égard des blancs-békés: « Manman-France, ne nous envoie pas de bonnes personnes ici. »
[...] 397) La musicalité du roman devient l'indicateur d'une certaine forme de vie qui est en réalité transformation de la vie. Comment tuer la musique ? (p. 264), se demande Marie-Sophie au moment de saigner son patron qui joue de la guitare. Cet aveu d'impuissance se retrouve dans les hésitations de Chamoiseau qui sait que l'écriture tue parfois ce qu'elle cherche à décrire, mais qu'elle est en même temps le moyen de faire parler la mémoire d'une personne pour toujours. Comment tuer l'écriture, elle seule qui peut laisser transparaître une mémoire, aussi inexacte soit-elle, pour l'éternité ? [...]
[...] C'est finalement le vécu ensemble du peuple martiniquais qui est à l'origine de la naissance d'une mémoire commune. La résistance menée contre les békés, les affrontements avec les céhêresses la reconstruction permanente des habitats formant un lieu de vie partagé, tout ceci montre finalement que la lutte pour survivre menée par les habitants de Texaco fut le déclencheur de la prise de conscience d'une identité créole : ( ) nous nous étions battus pour l'En-ville, non pour le conquérir ( ) mais pour nous conquérir nous-mêmes dans l'inédit créole qu'il nous fallait nommer (p. [...]
[...] Musique tantôt porteuse de nouvelles dramatiques - Combien de musiciens vicieux vinrent frapper dans son dos au prétexte d'avoir oublié quelque chose qu'ils ignoraient eux mêmes (p. 264) ; la musique me désarmait longuement (p. 264) ; Le chien avait changé de mandoline. Mon Esternome pleurait : il ne voyait là qu'un maquereau avec une de ses femmes, qui dansait sa musique (p. 201) tantôt seul remède pour lutter contre les malheurs de la vie et puis il faut mettre la musique, les chansons, ces mélodies, ces baumes de joie qui aident à vivre (p. [...]
[...] La limite de l'écriture semble être consciente, voire même revendiquée. Marie-Sophie Laborieux explique qu'elle a souvent buté entre l'écriture qui pour elle doit se faire en langue française, et l'incapacité de cette dernière à décrire un passé créole. Mais il y a aussi les limites énoncées par le narrateur. Ce dernier devient un personnage du roman à part entière, dès lors qu'il consacre sa troisième partie, LA RESURRECTION à son ressenti propre par rapport à l'histoire qu'il vient de raconter. [...]
[...] Texaco, de Patrick Chamoiseau L'Histoire Le livre retrace l'histoire d' Esternome et de sa tentative de conquérir l'En-ville, puis celle de sa fille, Marie-Sophie Laborieux, fondatrice du quartier Texaco. Patrick Chamoiseau nous raconte ces deux vies dans leurs intimités qui traduisent de nombreux mots amour, passion, lutte, colère, espoir et désespoir, souffrance comme de nombreux maux, parmi lesquels le combat contre les békés et contre le colonialisme dans le but de construire une véritable identité créole. Les deux vies racontées tour à tour montrent la lutte âpre des Martiniquais pour créer une authentique Histoire celle de cette lutte précisément. [...]
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