L'action qui nous est présentée se déroule dans un intérieur de maison bourgeoise. C'est donc à une famille que nous allons nous intéresser dans cette pièce, ce qui campe rapidement la pièce comme étant une comédie. Sur scène, sept personnages, cinq membres d'une même famille et deux suivantes, Dorine et Flipote.
Nous apprenons les noms et liens entre les personnages à travers les répliques de Mme Pernelle, qui nomme chacun de ses interlocuteurs en les désignant par leur lien familial : « ma bru » (à Elmire) ; « mon fils/ C'est moi qui vous le dis, qui suis votre grand-mère./ Et j'ai prédit cent fois à mon fils, votre père » (à Damis) ; « Mon Dieu, sa soeur » (à Mariane) ; « Pour vous, Monsieur son frère (…) si j'étais de mon fils, son époux » (à Cléante). Elle nous présente aussi, de la même façon Dorine, la servante de la maison : « Vous êtes, mamie, une fille suivante ».
Nous comprenons que Mme Pernelle est la mère d'Orgon, la belle-mère d'Elmire, la grand-mère de Damis et Mariane. Cléante est le frère d'Elmire, qui est l'épouse d'Orgon et la belle-mère de Damis et Mariane, nés d'un premier mariage, comme nous l'apprend Mme Pernelle « leur défunte mère ».
[...] Elle fuit ce lieu comme s'il était infesté par la peste. Ses déplacements vifs sont indiqués, non pas dans des didascalies, mais dans les répliques des personnages : Vous marchez d'un tel pas qu'on a a peine à vous suivre Mais, ma mère, d'où vient que vous sortez si vite ? Mme Pernelle est donc entrée en scène dans un élan vers la sortie, et son mouvement est rapide et décidé. Sa rancoeur se signale aussi par son refus d'être raccompagnée : Laissez ma bru, laissez, ne venez pas plus loin : ce sont toutes façons dont je n'ai pas besoin Cet usage fait partie des bienséances, à l'époque, et ne pas s'en acquitter revient à de l'impolitesse, comme le montre la réplique d'Elmire : De ce que l'on vous doit envers vous on s'acquitte Mme Pernelle est donc fâchée au point de ne pas supporter la courtoisie en usage à l'époque. [...]
[...] Le fait que Mme Pernelle fuit ce lieu en l'absence de son fils et de son hôte, Tartuffe, met l'accent sur l'aspect domestique du drame qui va se jouer, et ceci est accentué par l'emploi insistant de l'adverbe déictique céans. L'espace de cette maison devient de fait un enjeu majeur de l'action : il convient d'occuper cet espace, de dominer, de faire entendre raison au camp opposé et d'y faire régner sa loi. Ainsi, être expulsé, ou fuir l'endroit, selon qu'Orgon est ou non de son côté, devient la problématique, et Orgon, la maître de maison, devient le personnage-clé qu'il convient de convaincre. [...]
[...] Enfin, les dévots sont présentés comme étant soucieux du qu'en-dira- t-on, préoccupés par la rumeur et la réputation : comme on dit Ce n'est pas lui tout seul qui blâme vos visites bruyant assemblage un éclat fâcheux dans tout le voisinage on parle, et cela n'est pas bien elle condamne fort le train qui vient céans et j'ai su par des gens Nous voyons donc que ce qui motive Mme Pernelle, et avec elle Orgon et Tartuffe, tient pour beaucoup à ce que les personnes extérieures pensent et disent de leur foyer. Que Mme Pernelle prenne position pour Tartuffe, le désignant par deux fois comme homme de bien nous rend ce dernier antipathique dès le début de la pièce, bien avant son apparition, car elle est désagréable, tant par son langage agressif, son agitation que par ses jugements péremptoires sur autrui. Rien ni personne ne semble trouver grâce à ses yeux, mais elle présente Tartuffe comme un modèle à suivre, ce qui nous le rend du même coup plutôt déplaisant. [...]
[...] Orgon en a-t-il réellement fait son maître à penser, lui a-t-il laissé à ce point les rênes de son foyer ? Et, surtout, est-il possible que cet homme qui se dit au service de Dieu ait des vues sur la femme de son hôte ? Une ouverture en mouvement Cette scène s'ouvre de façon originale, avec beaucoup de mouvement et de personnages, sur la sortie d'un des personnages. La pièce commence in media res au cours d'une conversation entre Mme Pernelle et le reste des occupants de la maison bourgeoise d'Orgon, que celle-ci a hâte d'interrompre : Allons, Flipote, allons, que d'eux je me délivre La sortie de Mme Pernelle, fort contrariée, s'apparente à une fuite, où la présence des autres personnes est intolérabe. [...]
[...] ) sur ses façons de faire à tous coups je m'emporte il faudra que j'en vienne à quelque grand éclat Nous voyons donc ici un jeune homme prêt à en découdre, passionné et qui manque de prudence et de mesure, ce qui rend crédible la critique de sa grand-mère : vous preniez tout l'air d'un méchant garnement/ Et ne lui donneriez jamais que du tourment querellé par un fou comme vous La place de la femme : Fénelon Rien n'est plus négligé que l'éducation des filles Au XVII°, on attend de la femme qu'elle obéisse à son mari, qu'elle sache tenir son ménage, et qu'elle puisse donner une éducation religieuse à ses enfants, maintenant les bonnes mœurs au sein de son foyer. Elmire, la nouvelle femme d'Orgon, et plus jeune que lui, et Mme Pernelle lui reproche sa coquetterie. Nous pouvons voir derrière son personnage une critique détournée du mariage d'intérêt, dans lequel les femmes épousent des hommes plus vieux qu'elles, ce qui ne satisfait pas leur penchant amoureux, et les amène souvent l'adultère, comme le sous-entend Mme Pernelle. [...]
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