Deux personnages, A et B, qui lisait un supplément au Voyage autour du Monde de Bougainville, discutent, en attendant que le brouillard autour d'eux se dissipe. Puisque A ne connaît pas l'ouvrage en question, il interroge son partenaire sur Bougainville lui-même d'abord, puis sur son voyage. Entre 1766 et 1769, le navigateur a réalisé le tour du monde au cours duquel il a découvert Tahiti dont il a laissé une description paradisiaque. Toutefois, avant d'entrer dans le vif du sujet, A et B s'attardent sur des évènements particuliers, tels que l'expulsion des Jésuites en Uruguay, que Bougainville a vécue sur place. Ensuite, ils évoquent les Patagons, des indiens « géants », puis discutent des « sauvages » en général. L'un d'eux, un Tahitien nommé Aotourou, avait suivi Bougainville à Paris mais, incapable de s'adapter, il était reparti chez lui. Sur ce, B conseille à A de lire le supplément, et les deux amis se plongent de suite dans le texte.
B découvre l'univers de Tahiti au moment où les Européens s'apprêtent à quitter l'île. Un vieillard réputé pour sa sagesse adresse un discours véhément à ses compatriotes. Il les met en garde contre une probable colonisation de leur territoire, dans quel cas ils perdraient leur liberté et leur bonheur, tout en exprimant son mépris à Bougainville. En réalité, il soupçonne les Européens de les éloigner de la Nature et le vieillard les maudit pour ce manque de respect. A la fin de son discours, A annonce le dialogue qui va suivre entre l'aumônier de l'expédition avec un habitant de l'île, Orou ; mais avant cela, B raconte l'histoire de Barré, une jeune femme de l'équipage qui s'était déguisée en homme et qui avait été démasquée par les Tahitiens. Ceux-ci, en guise de bienvenue, s'étaient jetés sur elle pour lui faire l'amour.
[...] Orou explique par exemple que la notion d'inceste n'existe pas sur l'île tant s'impose la liberté sexuelle. L'aumônier l'écoute également parler des punitions données aux enfants fautifs de libertinage amoureux alors qu'ils n'ont pas encore atteint l'âge de la puberté ; vient ensuite la remise en question du vœu de stérilité prononcé par les religieux catholiques. Là-dessus, A et B critiquent les lois et les conventions qui régissent leur civilisation ; bien souvent artificielles et arbitraires, elles n'ont pas forcément leur raison d'être et provoquent souvent le malheur des Hommes, d'après eux. [...]
[...] Au travers du Supplément au Voyage de Bougainville, Diderot décrit donc surtout les mœurs primordiales à Tahiti, c'est-à-dire celles concernant la sexualité et, par conséquent, l'enfantement, dont tout découle. Or ces mœurs sont indéniablement opposées à celles qui organisent la vie des Européens du XVIIIème siècle, comme le montre aussi l'exemple d'Aotourou qui n'a pas su s'acclimater à l'Europe parce que les Tahitiens suivent le pur instinct de la nature alors que les Européens sont contraints d'obéir, en plus, à des lois civiles et religieuses. [...]
[...] [ ] Il a beaucoup souffert ? 27) ; malgré tout il fait preuve d'une grande curiosité puisqu'il est par exemple intrigué par une note en marge du Supplément ou encore parce qu'il veut connaître l'anecdote concernant Miss Polly Baker 67). En outre, A prend de plus en plus d'assurance au cours de sa discussion avec B et paraît de moins en moins dominé. Il en vient ainsi à prendre des initiatives : Cela se peut ; mais commençons par le commencement. [...]
[...] A la fin du quatrième chapitre, il dit d'ailleurs estimer l'aumônier poli tandis que B apprécie plutôt les mœurs des Tahitiens et le discours d'Orou 80) : A occupe la position de l'homme civilisé tandis que B garde celle de l'homme naturel Malgré tout, il refuse de se prononcer quand A lui demande s'il vaut mieux civiliser l'homme ou l'abandonner à son instinct mais souligne qu'on a vu plusieurs fois l'homme des villes se dépouiller pour rentrer dans la forêt, et qu'on n'a jamais vu l'homme de la forêt se vêtir et s'établir dans la ville. 94). Quant à il donne rarement son avis, si ce n'est pour appuyer celui de B : je le pense comme vous 84). Dans le premier chapitre, on remarque en effet que A est présenté comme inférieur à B. Il le questionne sans cesse, presque naïvement : Que pensez-vous de son voyage ? [...]
[...] On remarque également que, tout comme le vieillard, Orou fait preuve de tolérance vis à vis des Européens. En effet, il accepte le fait qu'il puisse exister des mœurs différentes de celles des Tahitiens, ainsi il annonce à l'aumônier : je ne te propose pas de porter dans ton pays les mœurs d'Orou 54). Toutefois, alors que le vieillard représente la sagesse, Orou fait figure de savoir. D'abord, il comprend le français puisqu'il lui est demandé de traduire les propos de Bougainville : Orou, toi qui entends la langue de ces hommes là 41). [...]
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