André Siegfried, professeur de géographie (au Collège de France et à l'Ecole Libre des Sciences Politiques) et auteur de nombreux essais, est surtout connu pour son ouvrage principal ici étudié, Tableau politique de la France de l'Ouest sous la Troisième République, qui paraît sous sa première édition en 1913. Cette oeuvre fait de lui le "père de la géographie électorale". Il est en outre membre de l'Académie française depuis 1944.
La rédaction de ce manuel s'explique surtout par le contexte de l'époque : en 1913, cela fait plus de 40 ans que la IIIe République a été proclamée et avec elle le scrutin universel masculin, ce qui donne à A. Siegfried une période assez large pour mener son analyse. Mais l'influence préalable du célèbre géographe Paul Vidal de la Blache et de son livre Tableau géographique de la France (qui paraît 10 ans plus tôt), et l'essor de la géographie à son époque sont autant de conditions qui ont motivé la rédaction de cet ouvrage (...)
[...] Mais André Siegfried explique que l'influence géologique est indirecte : c'est elle qui influence la répartition démographique et foncière, qui influence à son tour le vote. L'analyse se montre ensuite plus sociologique dans la deuxième partie de l'ouvrage. Les territoires où l'urbanisation est faible et la grande propriété domine, majoritaires dans l'Ouest, donnent souvent lieu à une hiérarchisation de la société. C'est ce qu'appelle Siegfried la semi- féodalité une sorte d'anachronisme qui fait que des régions comme la Vendée se référent encore modérément modèle d'Ancien régime, où la noblesse et le clergé orientent l'opinion des électeurs. [...]
[...] Nombre de contemporains d'André Siegfried ont critiqué négativement son ouvrage. La nouveauté et l'originalité de son analyse ont suscité des réactions dans le milieu des géographes et des historiens classiques. A son époque, beaucoup l'ont caricaturée par le slogan ironique le granit vote à droite, le calcaire à gauche Mais certains sont allés au-delà de cette critique peu argumentée. On reproche ainsi à l'auteur du Tableau d'avoir été par moment simpliste. Paul Blois, historien non contemporain de Siegfried, insiste notamment sur le fait que les facteurs historiques sont tout aussi importants que les facteurs géographiques utilisés par André Siegfried, comme l'impact de la Révolution, qui a été d'intensité diverse selon les départements de l'Ouest. [...]
[...] Pour ce faire, son livre est divisé en deux grandes parties : la première (plutôt géographique, démographique et géologique) porte sur la description régionale, la seconde (plus sociologique et politique) est une vue d'ensemble de l'Ouest et des conclusions générales. L'auteur construit sa première partie en réduisant progressivement le territoire étudié, passant de l'échelle régionale à l'échelle départementale, puis cantonale et parfois même communale, ce qui prouve la rigueur de son entreprise. Siegfried retient ensuite quatre critères dans l'analyse d'un territoire : les répartitions géologique, démographique et foncière, et l'orientation politique qui laissent apparaître une corrélation, comme peut l'indiquer l'un de ses croquis ci-dessous : L'influence géologique sur le vote des électeurs peut sembler étonnante. [...]
[...] Il remarque ainsi que l'Ouest est un ensemble politique assez uniforme, dont l'orientation ancrée à droite s'associe à une culture très traditionnelle. Selon lui, l'Ouest constitue un élément d'opposition au reste de la France : alors que les autres régions sont plutôt progressistes, ouvertes, et modernisées, la région ouest demeure conservatrice, une contrée intérieure et archaïque avec son faible contact avec la vie moderne et sa ruralité. Ce sont de telles considérations qui amènent André Siegfried à s'interroger sur les causes de cet ancrage conservateur. Il lui incombe maintenant de délimiter cette zone dont les frontières sont peu évidentes. [...]
[...] On peut se demander pourquoi cet ouvrage a fait de son auteur le fondateur d'une discipline nouvelle et en quoi son analyse est loin d'être aussi triviale qu'on a pu le dire. L'objet d'étude et la méthodologie de l'auteur marquent l'originalité de l'œuvre. Des raisons politiques au choix de l'Ouest et sa limitation géographique. Ce choix peut d'abord s'expliquer par la volonté de l'auteur de restreindre les champs géographiques de son étude. En effet, une étude portée au niveau national se serait révélée trop laborieuse. De plus, la limite de l'étude à une seule région lui permet de la comparer aux autres régions voisines. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture