S'il partage avec Rimbaud et Lautréamont la responsabilité d'avoir déclenché une « révolution du langage poétique », c'est parce que l'activité de l'écriture ne s'est jamais séparée chez lui d'une attention aiguë portée aussi bien au fonctionnement formel de la poésie qu'aux rapports complexes que celle-ci entretient avec son contexte historique et social.
[...] L'ironie, cette élégance de l'esprit, fait le pont d'un registre à l'autre. Ce qu'exige un moderne Question des rapports de la poétique mallarméenne avec le monde moderne. Le problème, c'est que, selon un principe de distanciation croissance envers l'univers référentiel, propre à la modernité poétique, les rapports du texte au moderne sont passés du registre du contenu de la représentation (Baudelaire, Rimbaud), au double registre du travail des formes mêmes de l'expression et de la construction formelle du monde exprimé. [...]
[...] Nombres ajustent de même leur écriture à leur surface d'inscription ou de destination. C'est le texte même qui s'empare de son support pour convertir en active force symboliques les formes inertes et les contraintes qui sont les siennes. À la fois objet, texte écrit à même l'objet et texte dont le sujet parlant n'est autre que cet objet même. C'est l'éventail qui parle de lui, du plaisir qu'il procure à la rêveuse du plaisir qu'il prend à être manipulé par elle. [...]
[...] La critique qu'il fait porter que les contenus de ce discours et de ses effets sur le monde social changent de signe lorsqu'elle se déplace en direction de ses formes et de ses supports. Le journal est doté à ses yeux de propriétés techniques et typographiques dont le livre gagnerait à tirer parti en les déployant au-delà de l'usage quelconque auquel les réduit la grande presse. Car le livre lui apparaît comme un médium appelé à se transformer Le discrédit où se place la librairie a trait, moins à un arrêt de ses opérations [ ] qu'à sa notoire impuissance envers l'œuvre exceptionnelle Première observation : Le formalisme mallarméen est bien la voie par laquelle l'œuvre est susceptible d'exprimer quelque chose de son environnement historique et en l'occurrence, du nouveau rapport de forces qui s'établit à la fin du siècle entre le médium du journal et le médium du livre. [...]
[...] - Le Ciel est mort clame ainsi L'Azur, - Vers toi, j'accours ! Donne, ô matière/L'oubli de l'Idéal cruel Pas plus que l'Esprit, la Matière ne répondent aux appels d'un Je qui, tiraillé par des forces antagonistes n'a d'autre recours que de s'autoaffirmer. Le Moi tout accablé qu'il soit et parce qu'il est accablé, définit la seule valeur qui résiste à l'effondrement général. Épuré, l'égocentrisme des poèmes du second Parnasse contemporain culminera dans le narcissisme asphyxiant d'Hérodiade, dans le solipsisme d'une héroïne réduisant le palais qu'elle habitue à une galerie de miroirs offerts à son inutile beauté : Je me crois seule en ma monotone patrie, / et tout autour de moi, vit dans l'idolâtrie / D'un miroir qui reflète en son calme dormant Une fois la rupture consommée avec le Parnasse tout s'apaise on dirait : retour des formes fixes, dissolution du sujet. [...]
[...] De cette violence, les Poésies de l'époque parnassiennes portent les marques. Elles accablent au nom de l'Idéal, le bétail écœurant des humains mais aussi parce que la quête de l'Azur inaccessible d'y développe sur fond de vulgarité : Cul bave rance nuit de la peau Vocabulaire peu parnassien. Ils sont affectés aux forces terrestres qui ralentissent l'ascension vers l'Idéal, avec l'emprise de la Charogne de Baudelaire. Cette accumulation de termes triviaux sertis dans des vers impeccables relève d'une poétique de l'opposition, de la rupture. [...]
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