« O temps suspends ton vol » disait Lamartine pour représenter la volonté humaine de contrôler l'incontrôlable : le cours du temps, la vie. C'est à travers la figure du roi Béranger dans "Le Roi se meurt" que le caractère précieux de la vie, par son caractère ténu et non maitrisable, se mesure réellement.
La pièce nous plonge dans un environnement mouvementé, avec une certaine tension entre les personnages, où la mort a déjà commencé son travail de sape et où le roi n'a plus que quelques minutes à vivre. Béranger représente ainsi un modèle humain, se posant d'incessantes questions sur le temps et lui-même. Ionesco mêle ainsi humour et absurde pour raconter le récit d'une abdication d'un roi face à son royaume et donc face à sa vie.
Ainsi, qu'est-ce que vivre quand on sait qu'on va mourir et qu'est-ce que mourir quand on sait qu'il faut vivre ?
[...] Le Roi se meurt, c'est finalement le roi qui est sur le point de mourir, ce point durant une heure et demie. C'est aussi un modèle humain, car Ionesco représente ce que Schopenhauer appelait mienneté de la mort, comme dans son énumération moi, moi, moi C'est l'idée que l'homme, avant de mourir, se referme sur lui-même, même s'il serait prêt à échanger sa mort. Néanmoins, le succès de la pièce est certainement dû à la figure du roi Béranger, ayant vécu tant d'années et d'exploits. [...]
[...] C'est aussi à travers Béranger qu'Ionesco critique le monde moderne, réfutant toute conception mentale de la vie : Béranger n'a pas philosophé, donc il n'a pas appris à mourir dirait Platon. La vie, c'est aussi s'interroger sur la mort. Ionesco retrace donc à travers sa pièce toutes les questions et inquiétudes humaines face à la mort. Pour autant, la théâtralisation de la mort peut apparaitre comme un exorcisme, rendant la mort de Béranger plus jouissive et pathétique. C'est le récit d'une abdication annoncée. La pièce peut apparaitre comme représentative de l'esprit humain, mélangeant un temps intérieur subjectif, soumis à nos choix, volontés, et celui du temps biologique, celui de l'horloge. [...]
[...] A la manière de De Vigny dans Une bouteille à la mer, la littérature, le théâtre apparaissent comme autant d'élixirs d'immortalité. Finalement, pour Ionesco, tout être présente en lui une part d'Eros et de Thanatos (Contre-notes), une part de vie et de mort. Thanatos a de multiples visages que l'homme n'arrive pas à combattre. Mais pour Ionesco, le lien entre vie et mort réside dans le livresque, le théâtre. [...]
[...] Cette triple évolution (surprise, refus, peur), c'est finalement ce qu'éprouve chaque être au fond de lui-même, mais la figure de Béranger apparaît finalement drôle et pathétique à la fois. C'est la figure de l'homme ne demandant qu'à vivre. Qu'y a-t-il de moins normal et de plus injuste, pour un homme souhaitant vivre, de mourir ? Et pour celui qui accepte ? Seuls les ascètes pourraient l'accepter, mais Béranger n'en est pas un. Béranger est donc la figure de l'homme se posant de multiples questions sur la vie : il ne contrôle que ses désirs, ses pensées, mais pas ce qui lui est extérieur : la vie. [...]
[...] "Le roi se meurt", Eugène Ionesco - la mise en scène d'une abdication Ô temps suspends ton vol disait Lamartine pour représenter la volonté humaine de contrôler l'incontrôlable : le cours du temps, la vie. C'est à travers la figure du roi Béranger dans Le Roi se meurt que le caractère précieux de la vie, par son caractère ténu et non maitrisable, se mesure réellement. La pièce nous plonge dans un environnement mouvementé, avec une certaine tension entre les personnages, où la mort a déjà commencé son travail de sape et où le roi n'a plus que quelques minutes à vivre. [...]
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