Un Roi sans divertissement, page 143, Jean Giono, mort du loup, cruelle cérémonie, condition humaine
Un Roi sans Divertissement (1946), première chronique romanesque de Jean Giono bascule entre le premier récit et le second, du roman policier au roman moral, psychologique et métaphysique, centré sur le terme de divertissement nécessaire à une condition humaine menacée par l'ennui et le désespoir. Ainsi le deuxième récit fait au narrateur-anonyme de 1906, en 1916 par de vieux villageois qui furent acteurs et témoins du drame de 1846, est-il en grande partie consacré à une battue au loup, magistralement organisée par Langlois, ancien capitaine de gendarmerie, revenu au village comme commandant de louveterie : c'est lui qui lui porte le coup de grâce, trait ultime d'une cruelle cérémonie dont le sens échappe au narrateur-témoin.
[...] - Mais il est en fait en proie au divertissement. Ainsi, ce personnage inclut le texte dans un registre discrètement comique Le héros, Langlois, reste distinct des autres - Langlois est cité tout au long du texte l6, l7, l10, l 12, l18, l22), et toujours seul. En effet, on peut constater que d'un côté, il y a un il et de l'autre un nous Il est seulement associé avec le loup avec ils les deux se ressemblent. Il y a même une complicité mystérieuse entre l'expéditeur de mort subite (l26) et l'encaisseur qui accentue la solitude du héros. [...]
[...] Qu'à de tragique et d'éclairant cette cérémonie ? Nous répondrons en étudiant le tragique d'une cruelle cérémonie, puis l'opposition entre Langlois et les autres personnages, puis enfin, cette cérémonie comme allégorie de la condition humaine. I. LA MISE A MORT CLOTURE UNE CEREMONIE MAGISTRALEMENT ORGANISEE PAR LANGLOIS 1. Une atmosphère curieusement paisible - Le mot paix confère à la scène l'aspect d'une cérémonie presque religieuse avec une mise à mort transfigurée. La paix règne avec l'ordre paix ! répété plusieurs fois dans des phrases nominale exclamative. [...]
[...] Il est plein d'une grandeur tragique puisqu'il accepte la mort et va même jusque devant elle. - Tout passe par un jeu de regards, mais loin de manifester de la haine, ils semblent éprouver de la compassion l'un pour l'autre. L'exécution est un peu bâclée et prend la forme d'un suicide déguisé puisqu'il semble consentir à son propre meurtre ? II. LES ROLES DES DIFFERENTS PERSONNAGES 1. Le personnage collectif des villageois - A la fois acteurs, spectateurs et narrateurs, ils apparaissent comme passifs et peu courageux. [...]
[...] - Les torches, quant à elles représentent les cierges, ce sont des détails parlants, mis en valeur par la douceur des allitérations en labial. Ainsi, Langlois ne prononce qu'un seul mot, qui est relayé et qui ressemble à une incantation religieuse Caractère spectaculaire et théâtral - Langlois prend la stature d'un prêtre aztèque, barbare et sacrificateur. Le loup devant lequel arrive Langlois est acculé, piégé, il ne pourrait se sortir de cette situation que par un bond surnaturel. - Les deux protagonistes sont face à face. [...]
[...] Il tire dans son ventre, il le fait donc souffrir et pas juste mourir comme s'il avait tiré dans la tête. La cruauté est esthétique. Langlois est en train de découvrir qu'il prend plaisir à être cruel, il résiste à la tentation de devenir M.V. Mais il ne peut s'empêcher de commettre un acte de substitution. CONCLUSION : Ainsi le second récit de la chronique s'achève-t-il sur cet épisode tragique et dramatique qui a un air de déjà-vu, la mise à mort du loup obéit au même mode opératoire que le meurtre de M.V. [...]
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