« Nous sommes esclaves, de gré ou de force ». Augustin, in Enarrationes in Psalmos 103.3.9
La littérature française et étrangère foisonne de récits sur le thème de l'esclavage. Celui-ci regroupe de multiples catégories, allant de l'exploitation de noirs africains dans les champs de coton, à l'esclavage moderne d'enfants contraints de se prostituer pour enrichir leurs souteneurs, sortes de contremaîtres modernes.
Le sujet qui nous convoque aujourd'hui traite d'une catégorie méconnue d'esclaves, celle des engagés indiens. Cette domination fait spontanément appel aux idées d'engagement militaire ou de réservistes, mais l'on apprend dès les premières pages du récit de Nathacha Appanah, Les rochers de Poudre d'Or, qu'il s'agit là des indiens recrutés par les occidentaux pour travailler dans les îles, plus précisément, à l'île Maurice, suite à l'abolition de l'esclavage sur l'île en 1835.
Hantés par des rêves de richesse, et influencés par les discours véhéments des maistry, recruteurs mobiles, les paysans indiens succombent à la tentation d'un Eldorado proche et pour la première fois palpable. Naïfs et qui plus est, analphabètes, ils signent le contrat, allégorie des chaînes et du boulet, pour les cinq années à venir. Epuisés par leur travail dans les champs indiens, ces hommes et femmes s'engagent dans une aventure qu'on leur promet magique et unique, pour finalement retrouver des conditions de travail inhumaines et souvent pires que celles qu'ils subissaient déjà, loin de leur famille et de leur culture si présente dans le roman. Il s'agit donc là du récit d'un leurre ou d'une duperie gigantesque aux conséquences dramatiques. Les personnages apparaissent au milieu d'une immense toile d'araignée dont ils ne pourront sortir indemnes, eux qui pensaient revenir au pays, riches et puissants, pour enfin mener une vie digne.
Nathacha Appanah réussit le pari osé de mêler des personnages différents, écrasés par le poids de leur passé, de leur présent ou de leur destinée, et les réunit sur une sorte de radeau, lieu de la souffrance et de la déchéance, entassés comme des bêtes, et suivant le cap d'une île, aux descriptions paradisiaques, mais qui ne sera pour eux que misère et détresse mentale. Lesté de morts et de suicidés, l'Atlas, bateau source d'espoir, représente le pont entre l'Inde, pays rythmé par les superstitions et les cultes, et pays de labeur pour survivre modestement, et l'île Maurice, terre inconnue et lieu de bagne, administrée par des occidentaux avides de richesse et de suprématie sur les pays fournisseurs de main d'œuvre.
L'étude aura pour objectifs d'analyser la structure formelle du roman, à travers un résumé complet, une attention portée à l'organisation de la narration puis un portrait des personnages principaux. Ensuite, le travail s'orientera vers le traitement du thème de l'esclavage dans ce roman : originalité, nouveautés et topoï récurrents seront évoqués. Enfin, l'analyse se voudra plus personnelle dans la mesure où elle s'attachera au style de l'auteur ainsi qu'à l'intérêt de ce roman dans le cycle de l'esclavage en littérature. Ces axes favoriseront le questionnement suivant : dans quelle mesure peut-on considérer le roman Les Rochers de Poudre d'Or comme une œuvre remarquable, porte-parole de la littérature franco antillaise ? Quels éléments apporte-il à la figure de l'esclave en littérature ?
[...] En effet, le capitaine de l'Atlas, est fasciné par la culture des indiens à tel point qu'il a décidé de passer sa retraite dans ce pays, et donc de ne pas revenir en Angleterre, ce que déplore Grant (J'étais très énervé et choqué qu'un membre de l'Empire choisisse de rester pour cette culture prétendument fascinante Quand comprendrait-il que ce sont eux qui doivent apprendre de nous ? Quand comprendrait-il que ces peuples-là sont nos esclaves, que nous les avons vaincus ? p91). Devon, l'assistant de Grant est compréhensif et respectueux envers les malades (Si Devon n'était pas si bienveillant envers les indiens, il aurait été un assistant idéal. Peut- être même un ami. Mais, quand je le vois sourire et essayer de sortir deux ou trois mots en hindi ou autre langue barbare, j'en suis dégoûté. [...]
[...] L'auteur peint le premier tableau composite du roman. Elle ne mêle pas leurs histoires et laisse le lecteur concentré sur un ou plusieurs personnages, curieux de savoir quels seront ceux qui deviendront protagonistes du récit. La convergence des différents personnages ne se fait que devant l'Atlas, sorte de point focal où tous se retrouvent au départ d'une nouvelle vie. L'intervention du journal de bord du médecin fait figure d'interlude, de moment de transition, qui correspond au passage d'un continent à une petite île, et à la traversée d'un océan. [...]
[...] Son objectif est donc triple et subtil : elle se veut porte-parole d'une période de l'Histoire restée sous silence, tout en donnant sa propre illustration de l'esclave dans la littérature. Enfin, elle présente l'Inde et ses coutumes, sans pour autant idéaliser ses traditions parfois archaïques. En lisant les premières pages du roman, le lecteur est tout de suite surpris par certains mots ou expressions qui attribuent au texte un certain exotisme, puisqu'ils renvoient à un pays lointain. Sahib, dhoti, kala pani, roupie, zamindar ces mots scandent le texte et invitent déjà le lecteur à voyager et à découvrir une nouvelle culture. [...]
[...] Viens me rejoindre p il avait décidé, il irait rejoindre son frère. Par l'intermédiaire de Roopaye, il se fait passer pour le mari de Ganga et tous deux sont affectés dans la même plantation qui n'est pas celle de Monsieur Desvaux, mais de Monsieur Rivière. Naïf, il pense pouvoir convaincre son patron de le laisser rejoindre son frère. Mais celui lui rétorque, plein d'agressivité et de provocation : Mets-toi bien ça dans le crâne, malbar. Il n'y a pas de Desvaux qui vaille. [...]
[...] Cependant, le hasard qui a orienté mon choix sur Les Rochers de Poudre d'Or, a relativement bien agi puisque les lectures et les réflexions que j'ai effectuées se sont souvent révélées passionnantes. Je retiendrai de ce travail la difficulté de gestion du temps mais surtout la réalisation du dossier à mener en parallèle aux cours du semestre et à leurs impératifs. Enfin, j'ai apprécié lors de la rédaction des idées, le sentiment d'espace et de liberté d'expression, que je ne retrouve pas dans l'exercice formel de la dissertation. [...]
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