Rhinocéros, Eugène Ionesco, Ionesco, Bérenger, conformisme, totalitarisme, pièce de théâtre
Jusque-là, un paisible petit village français a soudain été bouleversé par la métamorphose de ses habitants en rhinocéros. Après le départ de Dudard (qui symbolise l'échec de l'intelligence face au totalitarisme), Bérenger et Daisy rêvent ensemble de leur amour et de leur bonheur futur. Ils espèrent sauver le monde et tentent de résister aux assauts des animaux qui les harcèlent de plus en plus. Mais, suite à leur première dispute, Daisy s'en va (symbole de l'échec de l'amour face au totalitarisme). Bérenger est maintenant seul et son monologue final sert de dénouement à la pièce. Marginal qui refuse toutes les formes de conformisme et ne se métamorphose pas en rhinocéros, il devient héros malgré lui et c'est à lui qu'il revient de défendre la cause de l'homme.
[...] LA SERVEUSE 180 Mais qu'est-ce que c'est ? Bérenger, toujours indolent, sans avoir l'air d'entendre quoi que ce soit, répond tranquillement à Jean au sujet de l'invitation ; il remue les lèvres ; on n'entend pas ce qu'il dit ; Jean se lève d'un bond, fait tomber sa chaise en se levant, regarde du côté de la coulisse gauche, en montrant du doigt, tandis 185 que Bérenger, toujours un peu vaseux, reste assis. JEAN Oh un rhinocéros (Les bruits produits par l'animal s'éloigneront à la même vitesse, si bien que l'on peut déjà distinguer les paroles qui suivent ; toute cette scène doit être jouée très vite, répétant Oh un rhinocéros 190 LA SERVEUSE Oh un rhinocéros L'ÉPICIÈRE, qui montre sa tête par la porte de l'épicerie. [...]
[...] BÉRENGER Il fait tellement chaud, tellement sec. JEAN Plus on boit, plus on a soif, dit la science populaire 45 BÉRENGER Il ferait moins sec, on aurait moins soif si on pouvait faire venir dans notre ciel des nuages scientifiques. JEAN, examinant Bérenger. Ça ne ferait pas votre affaire. Ce n'est pas d'eau que vous avez soif, mon cher 50 Bérenger BÉRENGER Que voulez-vous dire par là, mon cher Jean ? JEAN Vous me comprenez très bien. Je parle de l'aridité de votre gosier. [...]
[...] Jean est très soigneusement vêtu : costume marron, cravate rouge, faux col amidonné, chapeau marron. Il est un peu rougeaud de figure. Il a des souliers jaunes, bien cirés ; Bérenger n'est pas rasé, il est tête nue, les cheveux mal peignés, les vêtements chiffonnés ; tout exprime chez lui la négligence, il a l'air fatigué, somnolent ; de temps à autre, il bâille JEAN, venant de la droite. Vous voilà tout de même, Bérenger. BÉRENGER, venant de la gauche. Bonjour, Jean. [...]
[...] Est-ce que je me comprends ? (Il va vers le milieu de la chambre.) Et si, comme me l'avait dit Daisy, si 30 c'est eux qui ont raison ? (Il retourne vers la glace.) Un homme n'est pas laid, un homme n'est pas laid (Il se regarde en passant la main sur sa figure.) Quelle drôle de chose À quoi je ressemble alors ? À quoi ? (Il se précipite vers un placard, en sort des photos, qu'il regarde.) Des photos Qui sont-ils tous ces gens- là ? [...]
[...] - Jean Même s'il apparaît simpliste, plus solide et convaincu, il incarne la certitude, s'opposant alors à Bérenger . l'assurance Répondant aux hésitations de son ami, les affirmations de Jean sont étayées de définitions et d'explications toutes faites (Vous vous oubliez , ligne 11 ; C'est de la neurasthénie alcoolique , ligne 16 ; Des élucubrations , ligne 23). Face aux doutes de son interlocuteur, il revendique l'optimisme, ainsi qu'en attestent la reprise de l'adjectif léger (ligne 24) et son Gros rire (ligne renforcé rétrospectivement par la répétition du mot force fois, lignes 47 à 49). [...]
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