"La Princesse de Clèves" de Mme de La Fayette est un roman du XVIIe siècle : il s'agit d'un roman historique se déroulant au XVIe siècle, comptant une année de la vie d'une jeune fille élevée pieusement, puis placée dans le milieu de la Cour par sa mère, qui la conseille sur son comportement afin de conserver sa vertu dans un milieu dominé par les apparences, les mensonges et les faux-semblants. Mariée au Prince de Clèves, elle se prend de passion pour le duc de Nemours, passion qui est réciproque : cette situation la jette dans des états d'âme complexes quant à l'attitude à adopter pour ne pas se compromettre et connaître tout de même le bonheur, surtout après la mort de sa mère qui était son unique appui. Ainsi, le narrateur pénètre véritablement la conscience de la princesse et en fait voir les bouleversements psychologiques qui la traversent.
Ceux-ci aboutissent à l'aveu de la princesse à son mari de son amour, jamais contenté pourtant, comme témoignage de fidélité ; or, cet aveu a été entendu par le duc de Nemours qui se cachait non loin. Ainsi, après le départ de M. de Clèves, la princesse en vient à une profonde délibération sur le bien-fondé de ce geste si singulier, mise en parallèle avec le grand trouble dans lequel est jeté le duc de Nemours. Cette scène est fondamentale car elle informe le lecteur de la personnalité des personnages centraux du roman, par une introspection.
Comment la focalisation interne adoptée dans cet extrait par le narrateur permet-elle, à cet instant crucial, de saisir ce qui rapproche et distingue ces deux personnages dans leurs consciences mêmes ?
[...] On imagine que cela se passe le matin, comme si la clarté du jour et la clarté de son esprit se répondaient, et qu'à présent elle était sûre d'elle. Elle trouva même de la douceur à avoir donné ce témoignage de fidélité à un mari qui le méritait si bien : gradation, du calme elle en vient à la douceur qui vient s'opposer au terme violent lorsqu'elle semblait reconnaître le désespoir qu'elle avait causé à son mari. Tout se passe comme si elle avait oublié la tristesse de son mari, et que seule, elle rêvait aux conséquences de son geste, au lieu d'y penser avec raison. [...]
[...] Comme s'il était soumis au lieu de se contrôler, ce qui est renforcé par l'adjectif embarrassé : cela évoque une difficulté pour s'exprimer, ce qui ne ressemble pas à l'image qui a été donnée de lui dans le roman. Il s'en démêla le mieux qu'il lui fut possible, et revint ce jour même à Paris avec le Vidame. : idée de démêlement qui répond à la confusion de ses sentiments. S'agit-il d'un démêlement dans sa conscience ou dans ce qu'il dit aux autres ? Le terme possible montre la difficulté qu'il a à en rendre compte, pour les autres comme pour lui. [...]
[...] L'imparfait étant utilisé également à la fin de la première partie, on voit que les phrases se répondent : elle semble également partagée entre le remords et la tranquillité. Elle passa toute la nuit pleine d'incertitude, de trouble et de crainte : l'incertitude naît justement de la nature des sentiments qui la déchirent, de la délibération interne qui se passe dans son esprit sur la pertinence ou non de son geste. La nuit évoque l'opacité, comme si elle ne pouvait être sûre tant elle est dans une grande confusion. [...]
[...] Accélération du temps, le retour à Paris est évoqué en quelques mots. Cela souligne le caractère particulier, isolé, des scènes précédentes, qui ont bénéficié d'un traitement plus long, pour en faire mesurer toute l'importance et tout l'enjeu au sein de l'histoire. [...]
[...] Dont elle ne trouvait point d'exemple : besoin de s'appuyer sur quelque chose à cause du vide qu'a laissé sa mère, et en même temps, cela souligne la singularité de la princesse, son caractère exceptionnel par rapport aux moeurs de la Cour qui ne sont pas avouées, mais devinées. Mais : conjonction qui introduit une objection, annonce une nuance dans la réflexion de Mme de Clèves. Ce remède : l'aveu, qu'elle regrettait au début, devient un remède contre son amour pour M. de Nemours. Elle lui donne immédiatement, par ce terme, une légitimité qu'il n'avait pas avant. [...]
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