La Seconde Guerre Mondiale et le mouvement de Résistance qu'elle suscita fournirent à l'art – et à la littérature en particulier – une occasion inespérée de devenir un support privilégié de la représentation de la politique. En témoignent les œuvres, nombreuses, qui émaillent le XXe siècle. Le récit d'Inge Scholl, La Rose blanche, en fait partie, qui reprend le nom du réseau de résistance que créèrent, en 1942, le frère et la sœur de la narratrice, Hans et Sophie Scholl. Animés par des préoccupations éthiques avant d'être politiques, les deux étudiants furent à l'origine du plus important réseau de résistance de la jeunesse allemande.
Ce témoignage, qui relève d'un statut particulier puisqu'il n'émane pas d'acteurs de la Résistance mais d'un témoin indirect, malgré son souci de documentation n'a rien de commun avec les études menées par des historiens sur « La Rose blanche » : il est avant tout œuvre, création. Et donc recréation de la réalité dans une composition artistique.
Avec un titre en forme de nom de résistance, l'Histoire est, d'emblée, convoquée par le récit, mais le sous-titre, Six Allemands contre le nazisme, qui évoque une opposition contre un régime, place également ce témoignage sous le signe du politique. La politique devant être entendue à la fois comme l'art de gouverner et le mode de gouvernement. Cependant, les rapports entre littérature et politique ne semblent pas aller de soi puisque la première a pour finalité l'esthétique, la seconde l'utilité. Or écrire la Résistance, c'est poser immédiatement une interaction entre polis et logos, entre politique et parole. C'est aussi revenir à l'essence même du politique : la participation du citoyen à la vie de sa cité, son insertion dans la société.
C'est donc sous l'angle de la voix, du discours, de l'écriture que nous interrogerons les liens, apparemment problématiques, entre politique et littérature dans ce récit.
[...] Or, on le voit clairement, dans la Résistance, la pensée politique ne saurait être dissociée de la dimension pratique. Et l'action, ou plus exactement l'engagement peuvent prendre des formes variées. II. De la réflexion à l'engagement : les voies (voix de la Résistance Dans sa présentation du colloque Littérature et résistance, Judith Kauffman distingue, dans la Résistance, deux niveaux : l'un, passif, qui se résumerait à une volonté de survivre sans céder ; l'autre, actif, qui prendrait la forme d'une lutte. [...]
[...] La recherche de la Voie du Christ, la voie de la Vérité qui répond à tout prend naissance dans les exhortations du père à suivre le droit chemin, ce thème revenant, au début du récit, comme un leitmotiv : "Je voudrais seulement que votre vie suive le droit chemin, même si cela est difficile", avait ajouté notre père (p. "Je voudrais que votre vie suive le droit chemin", avait dit notre père (p. comment pouvait-on, dans une période de meurtre et de détresse retrouver le chemin qui mène à Dieu ? (p. 58). [...]
[...] Discours politique et pouvoir du discours : la parole politique dans La Rose blanche On pourrait commencer par mentionner que, dans un témoignage sur la Résistance, tout ou presque peut être politique. Il s'avère donc nécessaire, pour étudier la représentation de la politique, de trouver un angle d'approche : c'est à la parole politique (pouvoir des mots, discours officiels, rumeurs et propagande, tracts) que l'on s'intéressera plus particulièrement. Ce qui, d'ailleurs, présente un intérêt certain dans un récit, œuvre qui a pour matériau mots et discours, parce qu'on peut alors examiner comment les paroles politiques sont retranscrites et mises en mots. [...]
[...] Les voisins, qu'ils saluaient sans soupçon, ne les avaient-ils pas dénoncés ? Dans la rue, n'étaient-ils pas surveillés ? Leurs empreintes digitales n'avaient-elles pas été prises ? Le sol de la ville n'allaient-il pas, le lendemain, leur manquer sous le pied ? ( ) Mais aussi, quelle inquiétude quand un regard les scrutait. Quelle angoisse quand un homme s'approchait, et quel soulagement de le voir continuer son chemin. Il fallait perpétuellement effacer toute trace (p. 73-75). C'est d'abord à la ponctuation, fortement interrogative, qu'est confiée la mise en scène de l'inquiétude suscitée par la dangerosité des actes de résistance, puis aux exclamatifs quel Le style chercherait peut-être des effets capables de mimer le rythme cardiaque accéléré des membres de La Rose blanche pendant leurs actions. [...]
[...] Le besoin existentiel de Vérité ou les références théologiques b. Initiation et parcours christique III. De La rose blanche à La Rose blanche : l'écriture, autre forme d'acte politique ? 1. Parler de Résistants, écrire le nazisme. Ou les politiques d'écriture a. Ecriture de la simplicité vs structure élaborée : une œuvre maîtrisée ? b. Entre empathie et dénonciation : la fonction des ruptures de ton 2. Quand l'histoire personnelle rencontre l'Histoire. [...]
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