Basée sur des règles théâtrales plus ou moins rigides, la comédie du XVIIe siècle est réputée ordonnée et suivant un schéma relativement logique. L'intrigue se veut généralement simple, et le dénouement, souvent prévisible, correspond aux attentes du spectateur, habitué à voir les comédies prendre fin sur un mariage basé sur l'Amour.
Cependant, Jean Rousset parle de La Place Royale, comédie du dramaturge Corneille, comme d' « un véritable carrousel, où les cœurs se prennent et se lassent, où les flammes s'échangent comme des billets de loterie ; tous les personnages entraînées par la contagion se jettent dans l'inconstance ; il n'est personne qui ait à la fin la figure et le cœur qu'il avait au début, et qui souvent n'en ait changé plusieurs fois en cour de route ». Il en donne une image d'emblée surprenante puisque que ses propos laisse penser que l'intrigue de la pièce est désordonnée voir aléatoire. Mais c'est la définition de l'amour au sein de la pièce qui surprend d'avantage. L'amour fort et triomphant de la traditionnelle comédie semble faire place à un amour complètement dévalué et réduit à travers les échanges à une simple marchandise.
Ces propos se vérifient-ils réellement ? Et est-il possible de parler de vraie comédie au sein d'un pièce où l'intrigue semble désarticulée et où l'amour est chosifié ?
Il s'agira de vérifier en quoi La Place Royale est un lieu de parades occupé par des personnalités instables aux tendances « échangistes » et aux amours flexibles.
[...] Ainsi, l'idée de Jean Rousset selon laquelle, La Place Royale serait un véritable carrousel se vérifie. Il est possible d'affirmer que cette pièce, à l'image d'une parade, est un lieu de faux-semblants, d'illusions où tout n'est qu'apparence. Mais qu'en est-il de son affirmation selon laquelle les cœurs [s'y] prennent et se lassent, [ ] les flammes s'échangent comme des billets de loterie. Il présente ainsi la Place Royale comme un club échangiste semblable aux feuilletons romantiques où les héros changent perpétuellement de partenaires amoureux. [...]
[...] Dès l'acte III, par rage, elle se fiance à Doraste. Angélique d'habitude si innocente se met alors à manipuler un cœur innocent. Elle redevient docile lorsque Alidor lui apprend qu'il n'y a jamais eu de Clarine. Mais en même temps, elle n'est plus aussi innocente que dans l'acte car elle prend des risques. En effet, elle est fiancée et prémédite de s'enfuir avec un autre ce qui un contraire à la morale. L'acte III et IV représentent donc en quelque sorte la rébellion d'Angélique qui n'écoute que son cœur. [...]
[...] La Place Royale semble en effet être le théâtre d'amours éphémères où l'amour est chosifié et ballotté d'individu en individu. Mais La Place Royale, c'est aussi un théâtre mettant en scène des personnalités complètement instables. Entre fidélité et infidélité, passion amoureuse et désir de liberté, convoitise d'un bien déjà possédé et indifférence, l'intrigue de la pièce est plutôt complexe. D'après Jean Rousset, les personnages sont complètement différents à l'issue de la pièce. N'y en a-t-il donc aucun qui reste fidèle à lui-même ? Angélique, au début de l'œuvre était amoureuse, docile, innocente, fidèle, elle semblait même irréprochable. [...]
[...] Notamment lors de sa confrontation avec Angélique qui aboutit à son désintéressement total vis-à-vis de cette dernière. Pourquoi de telles mutations apparaissent au cours de la pièce ? Il semble que ce soit le phénomène de contagion qu'évoque Jean Rousset qui puisse expliquer ces changements. L'élément contaminant n'est autre qu'Alidor. Tout part de lui. Son désintérêt soudain pour Angélique a causé la révélation des sentiments qu'éprouvait Cléandre pour cette dernière. La rage qu'il a provoquer chez Angélique avec la fausse lettre à engendrer la promesse de mariage à Doraste. [...]
[...] Mais il n'est pas dit qu'elle l'aime. Phylis est depuis le début de l'œuvre toujours restée fidèle à elle- même. Pour elle, tous les hommes étaient bons à prendre. Elle a choisi Cléandre parce qu'il était son ravisseur mais il est possible d'imaginer que même si elle avait été enlevée par quelqu'un d'autre, elle aurait quand même souhaité l'épouser. Phylis est une femme que l'on pourrait qualifier d'opportuniste, elle agit en fonction des circonstances. Elle est restée ainsi du début à la fin de la pièce. [...]
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