L'action de Fanon se situe dans le contexte d'après-guerre marqué par la lutte idéologique entre le bloc occidental menée par les Etats-Unis et le bloc socialiste mené par l'Union Soviétique. La cassure semble irrémédiable entre l'Est et l'Ouest mais un troisième monde émerge au cours des années 1950-1960 : c'est le tiers-monde qui revendique lui aussi sa place dans les relations internationales et sa part dans le partage des richesses de la planète Le tiers-monde affirme pour la première fois son existence politique en 1955 à la Conférence de Bandung, en proclamant son refus de la bipolarisation du monde. De nombreux leaders du tiers-monde apparaissent en même temps que les mouvements de libération nationale et mènent une lutte de plus en plus radicale en Afrique, en Asie, en Amérique latine. Les années 1960 sont marquées par des répressions violentes et des assassinats d'hommes politiques représentant la lutte des peuples opprimés : répression sanglante en Indonésie en 1965 (500 000 morts), assassinat de Patrice Lumumba au Congo, assassinat de Che Guevara en Bolivie; assassinat de Malcolm X, de M. Luther King aux Etats-Unis, procès de Rivonia en Afrique du Sud où Mandela et ses compagnons sont condamnés à la prison à vie. En Martinique, la jeunesse se révolte pendant trois nuits d'émeute à Fort-de-France
[...] L'inverse existe tout autant : de pseudo-antiracistes blancs confisquant puis indexant l'antiracisme et les luttes pour la dignité en fonction de leurs seuls intérêts, basés sur ces mêmes impératifs de chair. Dans les deux cas, l'Autre est d'abord un objet. Pourtant, Fanon Frantz était marié à une femme blanche. Pour autant il ne trahissait pas sa pensée car celle-ci dépassait ses désirs et participait d' une réalité d' ordre supérieur à la simple envie de l'Autre. Il n'opérait pas de confusion entre les deux. L'expérience vécue de Frantz Fanon en tant que Noir comme source de son combat. [...]
[...] Déjà à cette époque, l'argument des optimistes consistait à dire qu'il fallait en espérer une rapide disparition Mais la négrophobie est tenace et tout le monde sait que ce qui est rapide pour l'acceptation de l'Autre l'est beaucoup moins quand cet Autre est noir. Mais parallèlement à cette honte de soi Fanon aperçoit en lisant Senghor une lueur d'espoir : la négritude. De l'autre côté du monde blanc, une féerique culture nègre me saluait. Sculpture nègre ! Je commençai à rougir d'orgueil. Était-ce le salut ? p Je fouillai vertigineusement l'antiquité noire. Ce que y découvris me laissa pantelant. Dans son livre sur L'abolition de l'esclavage, Scholcher nous apportait des arguments péremptoires. [...]
[...] Aux Antilles, on parle la langue officielle de la France - qui est le français - et les instituteurs surveillent étroitement les enfants pour que le créole ne soit pas utilisé Impossible de s'émanciper sur ces points tant la domination jacobine est oppressante. Chez le Blanc, le problème du langage se pose aussi. Des médecins blancs, face à des Noirs ou des Arabes des colonies, s'autorisent toujours, ou presque, à leur parler petit-nègre et selon Fanon ce genre d'attitudes ne font rien d'autre que perpétuer un rapport de domination en s'adressant à eux comme s'ils étaient d'une humanité inférieure. Ce sont les militaires français de l'armée coloniale qui inventèrent le petit-nègre appelé originellement le français tirailleur». [...]
[...] À sa sortie, Peau noire et masques blancs offusqua le milieu littéraire. Il se permettait de dire des choses fortes à une époque où l'on ne s'était pas encore habitué à entendre un Noir faire autre chose que danser avec une jupe faite de bananes. Frantz Fanon a aussi déclenché la colère de certaines féministes à cause de son deuxième chapitre : La femme de couleur et le Blanc, et plus particulièrement les pages concernant Mayotte Capécia Dès les premières pages, il expose dans quelle mesure l'amour authentique demeurera impossible entre la femme de couleur et l'Européen tant que ne seront pas expulsés ce sentiment d'infériorité». [...]
[...] Mais elle ne peut être le résultat d'une opération magique, d'une secousse naturelle ou d'une entente à l'amiable. On ne désorganise pas une société, aussi primitive soit-elle, avec un tel programme, si l'on n'est pas décidé dès le début, c'est-à-dire dès la formulation même de ce programme, à briser tous les obstacles qu'on rencontrera sur sa route. Le colonisé qui décide de réaliser ce programme, de s'en faire le moteur, est préparé de tout temps à la violence. Dès sa naissance il est clair pour lui que ce monde rétréci, semé d'interdictions, ne peut être remis en question que par la violence absolue extraits de l'œuvre majeure de Fanon : Les Damnés de la Terre, publiée l'année de sa mort. [...]
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