C'est ainsi que Miloud est devenu, lui aussi, cirailla. Le travail lui plaisait. Il était libre. Il ne gagnait pas beaucoup d'argent, mais c'était suffisant pour acheter un peu de pain, une tomate, une brochette, parfois même il allait prendre un gazouz dans un café-maure. La nuit venue, l'été il dormait dans un recoin. L'hiver, il allait avec tous les autres, dans un bain-maure (...)
[...] Nouvelle Miloud le petit cirailla Miloud était un enfant de six ans environ. Il accompagnait parfois son père pour des affaires qui lui paraissaient mystérieuses. L'homme allait le plus souvent à Bab-El-Oued, un quartier d'Alger. De là, ils se retrouvaient à plusieurs et tous se rendaient à la Casbah, la vieille cité arabe. Ils entraient dans un café maure. Miloud aimait bien, les cafés maures. Il y avait beaucoup d'hommes désœuvrés, jamais de femmes, certains jouaient aux dominos, d'autres buvaient du thé à la menthe. [...]
[...] Au bureau des Postes il y avait un écrivain-public. Miloud y court. C'était bien MOsieu René qui lui écrivait. Dans cette lettre, il lui disait : Mon cher Miloud, J'ai appris par des amis algériens d'Alger que tu avais pris la gestion de ma pâtisserie dès mon départ. Sache, fiston, que j'approuve ta décision avec un grand bonheur. D'ailleurs, je peux te le dire maintenant, même si je ne te l'avais jamais promis, ma femme et moi, du fait que nous n'avions pas d'enfants, nous avions prévu de faire de toi notre héritier et cette pâtisserie te serait revenue dès mon départ à la retraite. [...]
[...] L'opération terminée, Miloud reçoit 800 mais l'homme n'avait pas terminé. - Comment t'appelles-tu ? - Miloud. - Moi, mon nom, il est écrit là et il montrait l'enseigne de son magasin : Chez MOnsieu René Pâtisserie française Eclairs, choux, religieuses, à la crème anglaise Je fais les meilleurs gâteaux de tout Bab-El-Oued, de tout Alger, de toute l'Algérie, de toute la France Hé ! C'est normal, faisait-il en montrant la paume de ses mains, premier Ouvrier de France ! Miloud le regardait mi-figue, mi-raisin. [...]
[...] Et s'ils avaient été réellement enlevés par des bandits ? Il ne pouvait savoir, ni entreprendre aucune recherche. Ceux qui avaient connu ce sort, avaient disparu sans que l'on ne puisse jamais les retrouver. Des parents et des fils venaient faire des enquêtes et ils interrogeaient les gens bien incapables de les renseigner. Miloud s'en remettait au mektoub[15]. Les affaires marchaient très bien. L'indépendance avait fait naître une nouvelle bourgeoisie qui affectait de mener un rang pour se distinguer du populaire. [...]
[...] Tu sais, il faut qu'elle en fasse toujours trop ! Signé : MOnsieu René ! moucroun : gâteau à la semoule et au miel parfumé de cannelle. chibani : homme âgé. djellaba : manteau en grosse laine avec un capuchon et sans manche que portent les montagnards dans leur djebel (montagne) en Algérie. moudjahidin : combattant algérien en lutte pour l'indépendance. F.L.N : Front de libération national, mouvement qui animait la rébellion contre la France lors de la guerre d'indépendance de l'Algérie. [...]
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