Charles Loyseau dresse dans son traité intitulé « Livre des Ordres et simples dignités » une analyse juridique de la société d'Ancien Régime. Il trace un tableau de la stratification des Ordres dans la société française par rapport à ce qui avait reçu valeur légale de la coutume, des édits et ordonnances royales, et des arrêts du Conseil et des Cours de Parlement. Dans cet extrait de la préface du Livre, publié en 1610, il décrit la logique divine de cet ordre social stratifié dont il donne les grands traits (qu'il développera avec plus de détail dans la suite de son ouvrage). Il sera très apprécié des jurisconsultes et ses œuvres complètes figureront dans nombre de bibliothèques de magistrats et lettrés. Mais ses idées sur la société vont perdre de l'influence au fur et à mesure que les français vont s'écarter de l'idéal de la société d'Ordres qu'il avait décrit pour se tourner vers la société de classes.
[...] Mais l'autorité des magistrats provient de l'exercice de leur fonction. Ils permettent au Roi de tenir les provinces et les villes. Ainsi, tous les autres membres de la société, la haute et basse noblesse notamment, doivent lui céder le pas. Il se glisse donc entre les deux grands Ordres, entre le Roi et ses parentés et le peuple un troisième ordre : l'ordre des officiers royaux, qui déplace les gentilshommes de leur position de force. L'ordre social est-il pour autant muable ? III. [...]
[...] Les deux premiers Ordres (clergé et noblesse) utilisent leur fonction dans la société pour faire face au pouvoir royal. L'Église de France compte avec un imposant pouvoir spirituel et foncier et peut toujours faire appel à Rome. Les grands seigneurs savent trouver des soutiens grâce aux liens d'amitié et de fidélité qu'ils entretiennent avec ses clientèles et dans leurs propres domaines avec ses vassaux, et disposent aussi d'innombrables richesses. Quant au Tiers Etat, lui aussi il dispose des moyens pour s'ériger contre le pouvoir royal. [...]
[...] L'idéal militaire d'ordre, de discipline de loyauté et d'obéissance Loyseau prend comme modèle d'institution ordonnée et hiérarchisée, l'armée. L'armée suit une hiérarchie très stricte qui assure son fonctionnement : elle est l'idéal de discipline, de loyauté et d'obéissance. Il partage idéal avec Henri IV et Sully qui souhaitent renforcer l'armature de l'État par des structures quasi militaires (selon ses biographes), dont le Roi bien sûr serait le général. B. La division de la société par rapport à l'exercice de la puissance publique Par-dessus de la stratification de la société en ordres et ceux-ci en rangs et degrés, Loyseau ordonne la société par rapport à l'exercice de la puissance publique. [...]
[...] Cette défense d'un Ordre voulu par Dieu met la cité terrestre à l'abri de la critique et justifie l'inégalité juridique des sujets du Roi de France. B. Stratification pyramidale de la société : L'inégalité juridique entre les sujets du Roi de France Pour Loyseau la société française est une société d'Ordres divisée en groupes sociaux hiérarchisés et inégaux. Cette séparation repose sur un des critères d'ordre idéologique (estime sociale, honneur, dignité attaché par la société à des fonctions sociales) et non sur des critères de fortune ou de mérite personnel. [...]
[...] L'auteur amplifie les tendances et place la magistrature comme la vraie première noblesse puisqu'elle est devenue la clé de voûte du pouvoir royal absolu dans l'État à la place de la tenue militaire du Royaume (et qui elle dépendait des nobles). Ce tableau que nous dresse Loyseau est très utile pour analyser la composition de la société d'Ancien Régime, ses fondements juridiques, mais aussi les diverses tendances qu'y rejaillissent. Il s'agit d'une société fortement hiérarchisée et inégalitaire, conformément à la division traditionnelle en ordres, mais qui est en pleine transformation. Les Grands voient leur pouvoir rétrécir face à un nouvel ordre qui est celui des officiers royaux. [...]
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