Les Lettres persanes publié pour la première fois en 1721 est, comme son titre l'indique, un roman constitué de lettres. A travers ces 161 lettres se tisse l'histoire de deux nobles persans qui, poussés par la curiosité, ont quitté leur ville natale pour un voyage d'étude au coeur de l'occident. Rica, l'un d'eux, se livre à des descriptions critiques et satiriques de ce nouveau monde qui s'offre à lui, faisant preuve d'une brillante perspicacité. Ainsi, il occupe une place essentielle du roman, nous proposant de découvrir à travers ses yeux sa vision de l'Occident. On peut alors légitimement se demander : quel est le rôle de Rica dans le roman ? (...)
[...] En effet, le jeune homme n'est jamais las de découvrir les mœurs des occidentaux. Alors que son compagnon Usbek a prétexté vouloir l'éduquer en lui faisant prendre part à l'aventure occidentale, c'est finalement lui qui insuffle l'énergie nécessaire à son aîné. Emprunt d'une gaieté naturelle comme se plait à le décrire Usbek à plusieurs reprises, Rica est d'autant plus à même de s'adapter au monde parisien. Il est vrai que sa jovialité et sa sociabilité lui permettent de s'intégrer rapidement et facilement à la société française. [...]
[...] Ainsi, il est celui qui critique et fait tomber les masques, utilisant la satire pour dénoncer les incohérences de la société française. Persifleur et railleur, il se fait démystificateur. Rica s'avère donc être un allié indispensable pour l'auteur. Faisant preuve d'humour et d'ironie, armes de la critique, Montesquieu réclame le droit de douter du bien-fondé de l'ordre établi et pose à ses compatriotes une question redoutable : Pourquoi vivez-vous et pensez-vous ainsi plutôt qu'autrement ? [...]
[...] Derrière son sens de l'observation accru, le jeune homme porte un regard critique sur la société française. A Paris depuis un mois, Rica s'attaque dans sa toute première lettre à un des piliers du pouvoir, à savoir le pape. Selon lui, il est une vielle idole, qu'on encense par habitude (Lettre 29) mais conserve néanmoins une influence néfaste pour la paix intérieure du royaume : il n'y a jamais eu de royaume où il y ait eu tant de guerres civiles, que dans celui du Christ. (Lettre 29). [...]
[...] Rica semble plus intriguer par le publique que par le spectacle lui-même : Aux côtés, on voit, dans de petits réduits, qu'on nomme loges, des hommes et des femmes qui jouent ensemble des scènes muettes (Lettre 28). Les sentiments, les passions et les gestes sont si bien interprétés que rien ne paraît vrai : toutes les passions sont peintes sur les visages, et exprimées avec une éloquence qui, pour être muette, n'en est que plus vive. (Lettre 28). La société française semble se donner en spectacle elle-même. Chacun y joue son rôle dans une superficialité déconcertante. [...]
[...] De plus en plus accommodé aux mœurs occidentales, Rica se pose des questions sur les conditions de vie des femmes de son pays. Ainsi, il en vient à se demander s'il est légitime que les hommes exercent leurs pouvoirs sur les femmes. Il remarque que, dans les ménages européens, Le mari n'a qu'une ombre d'autorité sur la femme (Lettre 86) et semble plus séduit à l'idée de laisser la liberté aux femmes que de leur ôter. Comme nous l'avons noté précédemment, Rica n'avoue-t-il pas avoir plus appris dans un mois [sur les femmes qu'il n'en] n'aurait fait en trente ans dans un sérail (Lettre Il déplore le fait qu'on ne puisse réellement connaître les persanes, cachées sous les masques que les mœurs rigides de leur pays leur imposent. [...]
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