Les origines du désordre de la famille
L'auteur débute par une citation de Claude Lévi-Strauss datant de 1956 qui énonce que la vie familiale existe dans toutes les sociétés humaines, même dans celles qui sont très éloignées des nôtres par leurs coutumes. La famille est ainsi un phénomène universel qui suppose une alliance d'un côté et une filiation de l'autre. Ces deux facettes impliquent que l'inceste soit prohibé et ce qui explique toujours selon Claude Lévi-Strauss, le passage de la nature à la culture.
De même, il peut être distingué trois grandes périodes dans l'évolution de la famille. En premier lieu, on a la famille dite « traditionnelle » qui sert à assurer la transmission du patrimoine. Cette famille est marquée par la domination patriarcale. En deuxième lieu, la famille dite « moderne » qui s'impose à la fin du XVIIIème siècle où il y a un partage de l'autorité entre l'État et les parents. En troisième lieu, on a la famille dite « contemporaine » ou « postmoderne » où la dévolution de l'autorité parentale devient problématique en raison de la multiplication des divorces et des recompositions conjugales.
Dans la famille traditionnelle, Dieu est comme le père, c'est-à-dire qu'il transmet à l'enfant un double patrimoine, à savoir celui du sang et celui du nom, à la seule condition que la mère ne lui ait pas été infidèle. Seule la nomination symbolique donne le statut de père et on ne parle alors pas d'un père procréateur, mais d'un père désigné par la parole. L'auteur reprend alors les théories de Thomas Hobbes et Jean-Jacques Rousseau. Pour ce dernier, la plus ancienne et la plus naturelle de toutes les sociétés est la famille. Sitôt que le besoin des enfants cesse, le lien naturel avec le père se dissout et la souveraineté de Dieu le père se dissout. (...)
[...] L'État organisa la vie privée de chacun pour faire de la famille le foyer normatif d'une individualité citoyenne et démocratique. De même, au fil des années, la famille restreinte se dissocia de l'institution qu'est le mariage. On se demanda alors comment celui-ci pouvait incarner la puissance du lien familial dès lors qu'il n'était plus indissoluble. La famille recomposée apparut alors et il fallut différencier la parenté de la parentalité. Cela traduit également l'inversion de la domination masculine, ainsi qu'un nouveau mode de conceptualisation de la famille. [...]
[...] Cette question fil rouge tout au long de l'ouvrage va pousser Elisabteh Roudinesco à étudier les origines du désordre actuel de la famille. En effet, pourquoi, dans notre société occidentale y a-t-il de plus en plus de familles recomposées, monoparentales, homoparentales ? Pour certains auteurs, sans ordre paternel, la famille en désordre des sociétés postindustrielles serait pervertie dans sa fonction même de cellule de base de la société. L'auteur démontrera à travers ce livre que la famille, fondée pendant des siècles sur la souveraineté divine du père, a été défiée par l'irruption du féminin au XVIIIème siècle. [...]
[...] L'auteur Elisabeth Roudinesco est une psychanalyste et historienne de la psychanalyse française née à Paris, le 10 septembre 1944. Elle enseigne, depuis 1991, dans le cadre d'un séminaire sur l'histoire de la psychanalyse au sein de l'École doctorale du département d'histoire de l'Université Paris VII-Denis-Diderot. De 1969 à 1981, elle a été membre de l'École freudienne de Paris fondée par Jacques Lacan, où elle a reçu sa formation psychanalytique. Elle fit entre-temps partie du comité de rédaction de la revue Action poétique de 1969 à 1979. [...]
[...] On assiste alors à l'émancipation sexuelle des femmes qui fut érigé en un principe civilisateur et laïque. En 1970, l'expression «chef de famille» est supprimée et l'avortement est légalisé en 1975 dans de nombreux pays d'Europe. Ainsi, les femmes arrachent à la domination masculine la maîtrise complète de la procréation. La maîtrise de la procréation par les femmes A la fin du vingtième siècle, les femmes capturent tous les processus de procréation et elles acquièrent alors un véritable pouvoir qui leur donne la possibilité d'être mère en se passant de la volonté des hommes. [...]
[...] C'est notamment la conception de la fonction du droit chère à Pierre Legendre. Or, Elisabteh Roudinesco ne fait pas vraiment référence à cet ordre symbolique et il est dommage qu'elle ne mette pas assez en évidence que cet ordre dépourvu de fondements empiriques apparaisse comme un ordre naturel. Cet ordre est par ailleurs souvent présenté comme la source de toute autorité légitime. C'est peut être à ce niveau que se pose plutôt le problème : l'autorité ne reposant plus sur l'autoritarisme, il va falloir la réinventer, tout comme les dernières étapes de la famille recomposée passant par la dissociation de l'acte procréatif et de la sexualité. [...]
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