L'Afrique est, selon celui qui l'évoque, soleil et majesté ou sécheresse et dénuement, mystère envoûtant ou lieu où convergent tous les maux de la terre (VIH, conflits, famines...). Continent convoité et déchiré, elle est sans doute dans chacune de ses images, mais aussi au-delà.
L'ambivalence du regard porte aussi sur les hommes et les femmes, à la peau d'ébène souvent, qui y vivent : rois ou esclaves, majestueux ou démunis, sages et marabouts, tyrans... Les clichés abondent, qui ne favorisent pas l'écoute, le respect et la compréhension.
(...) Ce roman se compose de trois parties, avec un personnage central : Kurt. Médecin exerçant à Francfort, il voit peu à peu sa femme, Jessica, perdre de son allant, se replier sur elle-même avant de la découvrir un soir morte. Déçue par une promotion qu'elle n'a pas eu, elle s'est suicidée. Pour Kurt, c'est le début d'une longue descente aux enfers.
Pour faire son deuil, il suit un de ses amis qui part installer un dispensaire aux Comores. Leur bateau est abordé par des pirates qui prennent les deux Occidentaux en otages et les mènent de planques en planques quelque part au Soudan. Kurt, rapidement séparé de son ami Hans (dont la côte sur le marché des otages semble plus élevée), se trouve enfermé avec un Français, Bruno, un personnage peu commun, ayant passé une bonne partie de sa vie en Afrique, séduit par ce territoire hors norme et par la philosophie de ses habitants.
Deux figures émergent parmi les ravisseurs : Joma, colosse brutal, et Chaolo, un adolescent étrange, qui rêve d'un nom de guerre (Black Moon) et se promène en permanence avec une machette mais qui est sans doute aussi le seul ravisseur à garder une âme, à faire encore une distinction entre le Bien et le Mal (...)
[...] Ailleurs, c'est tout ce qui vivait dans un village, Hommes et animaux, qui a été massacré. Plus loin, le dénuement est à l'œuvre et quand les dernières ressources sont pillées, même quand les pilleurs partent sans avoir répandu le sang, la mort est inéluctable, plus longue mais tout aussi certaine. Les miraculés Dans ce chaos, il reste quelques oasis, certes fragiles, à l'exemple des camps de la Croix rouge ou des villages qui se reconstruisent, au cœur du Darfour. Ces lieux sont peuplés de rescapés, de ceux qui ont échappé aux massacres, aux longues migrations avec si peu d'eau et de vivres. [...]
[...] Pour Kurt, c'est le début d'une longue descente aux enfers. Pour faire son deuil, il suit un de ses amis qui part installer un dispensaire aux Comores. Leur bateau est abordé par des pirates qui prennent les deux Occidentaux en otages et les mènent de planques en planques quelque part au Soudan. Kurt, rapidement séparé de son ami Hans (dont la côte sur le marché des otages semble plus élevée), se trouve enfermé avec un Français, Bruno, un personnage peu commun, ayant passé une bonne partie de sa vie en Afrique, séduit par ce territoire hors norme et par la philosophie de ses habitants. [...]
[...] La mort, si semblable et pourtant si différente La mort est omniprésente dans l'équation africaine. Partout, elle suscite douleur et incompréhension, mais elle n'a pas la même tonalité selon les lieux et selon le cheminement intérieur de Kurt. Trois temps se dessinent dans le roman. Le premier est axé sur Jessica, les deux autres sur l'Afrique et les victimes de la violence. La séparation entre les deux derniers temps est marquée par ce village, transformé en un immense charnier avec un seul survivant qui brûle les corps en un dernier hommage, son esprit mourant au fil des adieux. [...]
[...] Yasmina Khadra est aujourd'hui traduit dans de nombreuses langues. Son ton et ses histoires ont conquis des lecteurs dans le monde entier, à la fois pour sa liberté et les valeurs qu'il incarne, pour le miroir qu'il renvoie à chacun, sans concession, mais pourtant empli de compassion, de ce qui pourrait être qualifié d'humanisme. Cet auteur est le chantre de son pays, malgré quelques incompréhensions, en Occident notamment, dues au choix de son pseudonyme. Il est aussi la voix de ceux à qui elle n'est généralement pas accordée, les déclassés, les terroristes, les femmes ou plus simplement cet Autre auquel on ne prête pas l'attention qu'il mérite, peut-être plus par indifférence que par mépris. [...]
[...] L'attitude de Kurt en est significative. Le jugement est hâtif et c'est plus tard, trop tard souvent, que la complexité des êtres apparaît. C'est notamment le cas pour Joma, un tueur sans scrupules, empli de haine. Pourtant sa mort permet de découvrir un recueil de poésie dont il était l'auteur, avec des mots qui témoignent d'une grande sensibilité. Cette découverte n'interpelle toutefois pas directement Kurt, centré sur lui et sur le meurtre qu'il a commit. Médiation Pour comprendre autrui, encore faut-il l'écouter, avoir la curiosité de le lire, de lui parler, de l'observer. [...]
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