Le jeu de l'amour et du hasard, Pierre Marivaux, arrivée comique d’Arlequin, maison d’Oregon, comique burlesque
L'inversion des rôles entre maîtres et valets grâce au déguisement est un ressort comique majeur du théâtre des comédies psychologiques de Marivaux, ce qui entraine surprises des personnages, de nombreux quiproquos et des réflexions sur les clivages socioculturels du XVIIIe siècle. Le Jeu de l'Amour et du Hasard, seizième comédie de Marivaux, met en scène l'inversion entre deux jeunes maîtres Dorante et Silvia, avec leurs valets respectifs Arlequin et Lisette, à la suite de la décision de leurs pères de les unir. Ceux-ci, chacun de leur côté, ont la même idée de se faire passer pour des valets afin de pouvoir mieux étudier leur futur conjoint et conclure ainsi un mariage d'inclination.
[...] Les valets n'ont pas la même conception du mariage, les préparatifs leur semblent inutiles et Arlequin ne s'oppose pas au concept du mariage arrangé. Silvia est bien plus libérale et plus moderne. B. Au travers du langage, deux castes apparaissent - Malgré leurs costumes, les personnages ne peuvent pas changer, le langage, fruit d'un conditionnement culturel, trahi leurs masques. - Dans l'aparté final, Silvia exprime un préjugé social selon lequel chacun doit avoir une place déterminée par sa naissance. En effet, la France du 18ème siècle considère que la société est faite de places attribuées selon l'ordre social, et donc selon la naissance. [...]
[...] Cette scène présente aussi un intérêt dramatique et psychologique : Arlequin sert de catalyseur à la complicité déjà née entre Silvia et Dorante dans les scènes précédentes et à la prise de conscience de Silvia par le biais d'un langage révélateur, des qualités de Dorante, et au-delà de l'injustice arbitraire de l'ordre social tel qu'il est établi dans la France du 18ème siècle. On retrouve ces mêmes réflexions dans les utopies sociales de Marivaux (L'Ile des esclaves) sur un ordre social qui attribue le pouvoir sur le seul critère de la naissance, de la fortune et de la réputation, et non pas sur le mérite personnel. [...]
[...] - Avec l'emploi intransitif du verbe "épouser", "je viens pour épouser", Arlequin apparait comme conquérant et brutal. "Ils m'attendent pour être mariés" montre qu'il n'épouse pas seulement Silvia, il épouse toute une famille. Il se comporte en un grossier envahisseur prêt à mener une affaire uniquement matérielle. - Il commet des fautes de gout à l'égard de Silvia, il ne lui parle pas comme un maître le ferait : l'apostrophe "la belle" est bien trop familière, et il ne devrait pas se soucier de ce que se disent deux valets, il montre la curiosité d'un valet. [...]
[...] Ceux-ci, chacun de leur côté, ont la même idée de se faire passer pour des valets afin de pouvoir mieux étudier leur futur conjoint et conclure ainsi un mariage d'inclination et non pas un mariage de raison. Ce quadruple travestissement entraine la naissance d'une complicité spontanée entre les deux faux valets puis l'arrivée comique d'Arlequin sous les traits de son maitre, dans la maison d'Orgon, son soi-disant beau-père. Qu'a d'à la fois comique et révélateur cette scène ? Nous répondrons en étudiant le comique burlesque lié au personnage d'Arlequin, puis le comique plus fin dû aux réactions des autres personnages et enfin la réflexion sur les clivages sociaux-culturels suscités par cette scène. I. COMIQUE BURLESQUE A. [...]
[...] Le comique en résultant - Il y a un comique burlesque du fait de ses fautes de goût et du rabaissement de l'image du maitre en la jouant caricaturalement. On peut même se demander s'il ne le fait pas exprès pour se venger de Dorante qu'il tourne ici en ridicule. - Il y a un constant décalage entre ce qu'il est et ce à quoi il veut ressembler. Il n'admet pas les reprises, il persiste, ce qui provoque un comique de répétition et de situation car loin de se soucier des avertissements, il poursuit. [...]
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