L'instauration des autorités administratives indépendantes (AAI) constitue avec la décentralisation territoriale une innovation remarquable et caractéristique de l'évolution de l'administration française depuis les années 1970. La création de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, première "autorité administrative indépendante" (l'article 8 de la loi de 1978 la qualifie telle), remet effectivement en cause le modèle unitaire classique basé sur l'unification des appareils administratifs grâce aux liens de hiérarchie ou de tutelle (...)
[...] Droit administratif Fiche de lecture Réflexions sur l'institution des autorités administratives indépendantes Jacques Chevallier L'instauration des autorités administratives indépendantes (AAI) constitue avec la décentralisation territoriale une innovation remarquable et caractéristique de l'évolution de l'administration française depuis les années 1970. La création de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, première autorité administrative indépendante (l'article 8 de la loi de 1978 la qualifie telle), remet effectivement en cause le modèle unitaire classique basé sur l'unification des appareils administratifs grâce aux liens de hiérarchie ou de tutelle. [...]
[...] La qualification des autorités administratives indépendantes se heurte à une difficulté majeure : il n'existe pas de catégorie juridique adaptée à ces institutions inédites. Elles ne s'apparentent ni aux établissements publics, étant dénuées de la personnalité juridique, ni aux juridictions dont les décisions revêtent l'autorité de la chose jugée. Elles diffèrent aussi des comités de sages dont le travail est orienté sur la réflexion et le débat, des commissions consultatives qui ne rendent que des avis, des administrations de mission, et ressemblent davantage aux Agences fédérales américaines disposant de pouvoir de régulation dans des secteurs précis. [...]
[...] La nature administrative de ces entités ne leur est reconnue que par défaut, tant elles s'éloignent du modèle juridique français. En effet, le système administratif français est traditionnellement constitué d'un ensemble cohérent et pyramidal d'autorités édictant des normes juridiques et bénéficiant d'un statut constitutionnel, avec l'Etat au sommet et à la base les autres personnes morales publiques qui lui sont subordonnées. Au contraire, les autorités administratives indépendantes sont soustraites à ces liens de hiérarchie et de tutelle et ne sont pas mentionnées dans la Constitution. [...]
[...] A cette indépendance organique s'ajoutent des garanties fonctionnelles, les autorités administratives indépendantes n'étant pas subordonnées à l'administration par des liens de hiérarchie ou de tutelle. Enfin, celles-ci s'administrent seules, disposent de leurs propres services et bénéficient d'une autonomie financière, leur Président étant seul ordonnateur des dépenses. Jacques Chevallier voit la fragmentation du pouvoir administratif comme la conséquence logique et directe de l'extension des tâches que s'assigne l'Etat, cet éclatement n'étant pas préoccupant en lui-même mais uniquement dans la mesure où il s'accompagne de l'indépendance de ces nouvelles autorités administratives. [...]
[...] Elles disposent aussi d'un pouvoir de proposition qui leur permet de participer efficacement à la procédure règlementaire ainsi que de la possibilité d'émettre des recommandations. Le Conseil d'Etat a même reconnu à ces dernières une force obligatoire (CE mai 1985, Labbé et Gandin). Outre leur pouvoir règlementaire, les autorités administratives indépendantes sont habilitées à prendre des décisions individuelles. Leurs décisions (autorisations telles la délivrance d'un visa, ou étude des plaintes et réclamations) concernent des situations particulières et leur confèrent un rôle arbitral. [...]
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