Les travaux de Pierre Rosanvallon (1948-), historien et intellectuel français, portent essentiellement sur l'histoire de la démocratie et du modèle politique français, sur le rôle de l'Etat et la question de la justice sociale dans les sociétés contemporaines.
Il occupe depuis 2001 la chaire d'histoire moderne et contemporaine du politique au Collège de France tout en demeurant directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Il a été l'un des principaux théoriciens de l'autogestion associée à la CFDT. Dans son livre , L'âge de l'autogestion, il défend un héritage philosophique savant, venu à la fois de Marx et de Tocqueville, et annonce une "réhabilitation du politique" par la voie de l'autogestion (...)
[...] D'autre part la démocratie en tant que technique de gouvernement fait l'objet de nombreuses critiques liées à son instabilité, au désordre qu'elle suscite (risque d'anarchie lié à l'auto gouvernement) et au risque de dégradation auquel elle est soumise (comme le souligne le chevalier de Jaucourt dans l'Encyclopédie). C'est à cette époque et au milieu des critiques qu'émerge pour la première fois sous la plume d'Argenson l'idée que la représentation est une condition de la VRAIE démocratie et non plus l'auto gouvernement. Selon D'Argenson il y a fausse démocratie avec le principe de souveraineté populaire en raison de l'anarchie qui en résulte inévitablement. [...]
[...] Rosanvallon tente donc de retracer l'histoire du mot démocratie pour comprendre comment ces deux idées ont fini par être associées sous le terme de démocratie. Dans un premier temps, le mot démocratie ne renvoie qu'à une forme politique archaïque : celle de l'Antiquité, d'Athènes et de Rome. La démocratie est donc obsolète. Elle n'est donc pas envisagée dans le débat comme un but à atteindre, ni même une forme politique intéressante et que l'on pourrait mettre en pratique. La démocratie renvoie systématiquement à l'Antiquité, elle est le régime politique de l'Antiquité. [...]
[...] Rosanvallon affirme que le mouvement sémantique est accompli en 1835 lors de la publication de La Démocratie en Amérique par Tocqueville. Ce mouvement sémantique s'est fait progressivement durant les décennies précédentes avec les différents aspects qu'a pris le terme démocratie qui renvoyait à la fois à l'idée d'effervescence sociale mais aussi au principe d'égalité des conditions (p.50). Il désigne désormais un type de société. De même à travers ce mouvement sémantique a lieu un retournement : la démocratie est de mieux en mieux perçue. [...]
[...] Toutefois cette nouvelle définition ne s'installe pas dans les esprits et le mot démocratie conserve encore longtemps sa connotation antique. La démocratie reste même longtemps connotée péjorativement car elle renvoie à l'utopie, l'archaïsme, l'anarchie. On continue de l'associer au principe du peuple législateur, magistrat, notamment chez Sieyes et Brissot qui insistent toujours sur le caractère primitif et précaire de la démocratie, et ceci effraie plus que ne suscite l'adhésion. La démocratie se définit toujours par le principe de législation directe du peuple et non de représentation c'est pour cela qu'on lui préfère la République qui elle est associée à la représentation (voir T. [...]
[...] D'où la rareté de l'emploi du mot seul, Rosanvallon souligne le fait qu'on lui adjoint généralement un adjectif pour clarifier sa pensée car le mot démocratie porte une histoire lourde, est entouré de symboles forts qui viennent troubler sa bonne compréhension. Toutefois Rosanvallon rappelle qu'on ne peut pas dissocier totalement la démocratie de sa dimension politique. Et surtout si elle fait aujourd'hui et depuis longtemps l'objet d'une expérience commune, elle incarne aussi un idéal, une perpétuelle recherche pour améliorer la société et atteindre une véritable égalité. [...]
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