La notion de négociation peut s'envisager selon deux conceptions. Ces deux visions prennent leurs racines dans le rapport que nous entretenons avec notre perception de l'existant et, du comment nous réinsérons cette perception dans le présent. La première est celle qui correspond à la notion de marchandage. Il y a ici l'idée de compromis, de partage, à réaliser entre deux effets attendus. La seconde est de percevoir la négociation comme un ou des temps du processus de changement.
La démarche d'entrée en négociation qui en découle sera, elle aussi, différente ; dans le premier cas, les effets sont attendus (résultats). Ces attentes sont imagées par un projet chosifié. Pour atteindre ce résultat, le changement est envisagé par des procédures (scénarios) prévues à l'avance. Ici on est dans une logique de production. Dans le second cas, le projet n'existe qu'au travers du sujet qui le pense. Ici, on est dans une logique de projection, de réintégration dans l'action de ce que l'on est en train de penser pendant l'acte.
(...) Ces deux conceptions correspondent à deux visions du monde, à deux paradigmes : l'un mécaniciste, l'autre biologique. Si la première, par la détermination de sa démarche (reproduction du "déjà-là") et par ses prévisions (scénarios), fait apparaître les modèles de pensée du déterminisme et du fonctionnalisme, l'autre s'inscrit dans le modèle de la systémie par la priorité accordée au processus de changement (idée de cheminement) et dans la pensée complexe (le projet existe au travers de la singularité de la personne qui le pense et le construit). Par ailleurs, dans le premier cas de figure, les effets sont attendus et les imprévus sont indésirables : on retrouve ici le registre de pensée par objectif (le projet-objet étant la cible à atteindre) ainsi que la pensée magique, par le désir de maîtriser les procédures et par peur des situations imprévisibles car incontrôlables. Dans le second cas, il est donné toute sa place au sujet qui devient auteur de son projet : on retrouve ici le registre de pensée humaniste et celui de la pensée par projet (...)
[...] Il met en exergue plusieurs couples d'éléments contradictoires à articuler . * Conformisation/émancipation Le premier est celui de la place que le consultant accorde aux auteurs en évitant de se rallier à l'un ou l'autre, ce qui privilégierait une logique plutôt qu'une autre. L'articulation se situerait dans la dialogie entre la conformisation (à la demande du commanditaire) et l'émancipation du consultant (par la prise en considération des bénéficiaires comme auteurs de la négociation). * Conception en amont de l'action/création dans l'agir Le second couple concerne les liens entre procédures et processus de changement. [...]
[...] Dans le second cas, il est donné toute sa place au sujet qui devient auteur de son projet : on retrouve ici le registre de pensée humaniste et celui de la pensée par projet. La négociation est l'une des formes de l'évaluation : dans une logique de contrôle, de marchandage et de partage, elle répond au modèle de l'évaluation pour la réussite ; quand sa visée première est l'autonomisation et la projection du sujet, elle relève du modèle de l'évaluation régulation, sa logique étant l'accompagnement du sujet. Selon Guy Berger, la démarche du consultant réside dans la mise en tension de ces deux logiques dans l'acte de négociation. [...]
[...] A chaque facette du pouvoir se joue cette articulation. Quel que soit le champ sur lequel le pouvoir s'exerce, ce dernier peut-être envisagé soit comme un rapport de force dont la résultante serait le consensus au conflit (vision mécaniciste) ou, soit comme régulation dans une relation (à l'autre ou à soi-même), il y a alors émergence d'un nouveau pouvoir. Au niveau du pouvoir s'exerçant en interne au sujet, l'articulation ne peut se mettre en œuvre que si le sujet s'autorise à créer ce nouveau pouvoir. [...]
[...] Le consultant développant ce type de stratégie se positionne dans une logique de contrôle (faire contre l'autre pour l'autre D'autre part, cette mise en action peut prendre la forme d'une relation à l'autre, en acceptant sa propre altérité et celle de l'autre, en usant de stratégies personnelles pour la mise en œuvre du projet (faire avec l'autre). Le consultant peut alors développer une stratégie d'effacement, relevant de la logique de projet, afin de laisser la place au sujet. La dialogie des contraires me semble donc se jouer entre rapport à l'autre et relation à l'autre. [...]
[...] (1992) La négociation. Baptiste R., Bonniol V., Dupas R., Démarche plurielle du consultant fonction publique, Tome Marseille : B&B Consultants, pp33-62, Traces d'une université d'été Mots clés : Intervention prévision processus changement altération - projection autonomie pouvoir s'autoriser I Résumé La notion de négociation peut s'envisager selon deux conceptions. Ces deux visions prennent leurs racines dans le rapport que nous entretenons avec notre perception de l'existant et, du comment nous réinsérons cette perception dans le présent. La première est celle qui correspond à la notion de marchandage. [...]
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