Philosophe, essayiste et romancier né à Paris en 1929. Ses parents, d'origine juive viennoise, lui donnèrent une éducation polyglotte en plus de l'initier très tôt aux grands textes classiques: il n'avait pas six ans que son père lui transmettait son goût du grec ancien en lui faisant croire qu'un des passages les plus éblouissants de L'Iliade n'était pas traduit en allemand. C'était la naissance d'un des plus grands lecteurs du XXe siècle. En effet, Steiner se définit lui-même non pas comme un intellectuel ni un universitaire, mais comme un « maître à lire », c'est-à-dire un homme qui peut montrer « comment lire ». En 1940, il quitta la France pour New York, où il poursuivit ses études au lycée français. Diplômé en mathématiques, en sciences physiques et en lettres de l'Université de Chicago en 1949, il fut engagé comme journaliste par l'Economist de Londres au début des années cinquante. C'est par un cours sur Shakespeare à l'Université de Genève, où il enseigne toujours la littérature anglaise et comparée, qu'il se fit connaître. Auteur d'une vingtaine de livres traduits en plusieurs langues, Steiner occupe, depuis 1966, un poste de critique littéraire au New Yorker.
George Steiner a beaucoup réfléchi sur les rapports entre l'art et la transcendance, jusqu'à se persuader que l'art exprime la présence d'une réalité transcendante: « Je suis convaincu que les oeuvres d'un Homère, d'un Goethe, d'un Dostoïevski, d'un Beethoven, d'un Picasso ne peuvent exister dans un monde totalement séculier et qu'elles posent la question de l'existence de Dieu. La musique en particulier me démontre la réalité d'une présence, d'une transcendance. » Steiner s'est aussi intéressé au langage et à la question du Mal, centrale dans son oeuvre, de même qu'aux rapports entre la culture et la barbarie. Cette question, qui l'aura hanté toute sa vie, constitue peut-être le sens ultime de sa recherche philosophique : « J'ai essayé de passer ma vie à comprendre pourquoi la haute culture n'a pas pu enrayer la barbarie, pourquoi elle en a été souvent l'alliée, le décor, le choeur au sens du choeur d'une tragédie grecque. »
Selon Juan Asensio, l'oeuvre de Steiner est « rien de moins que vitale pour notre siècle: en sondant les ténèbres, nul doute que George Steiner nous enseigne de quelle réelle présence la réflexion contemporaine doit se charger si elle veut ne pas s'enfoncer piteusement dans la tourbière de la futilité et du bavardage. » (Patrick Dionne)
Cette présentation de l'auteur est suivie d'une fiche de lecture et analyse critique de l'oeuvre.
[...] Un cercle séculaire est il en train de se fermer ? La musique universelle née avant le discours regagnerait peu à peu le terrain que l'absolutisme du mot lui avait arraché. Serait ce la naissance d'une "culture hors du mot" ? Les mathématiques sont un autre langage hors du mot. Les sciences en général "trustent" la majorité des individus les plus doués des Nations. Les publications se multiplient et la recherche progresse sans cesse. La politique et les humanités ne seraient plus que "l'apanage des capacités moyennes". [...]
[...] Il semblerait qu'on ne mise plus sur la transcendance au profit de l'utopie de l'immédiat. Les valeurs de notre civilisation sont-elles menacées ? Mutation ou destruction généralisée de nos gloires, de notre culture classique ? Demain "Il n'est pas possible de trouver le réconfort dans un pessimisme prophétique". Dans ce contexte de crise de la culture et de peur de l'avenir, on prend conscience de ce qui devait être l'état d'esprit de l'approche de la peste au Moyen âge ou de toute autre calamité à différente époque. [...]
[...] L'homme ne pouvait se sauver qu'en tuant le juif, inventeur de ce Dieu absent. Le juif est à l'origine du christianisme mais aussi en grande partie à l'origine du socialisme messianique. Comment ne pas haïr celui qui a été à l'origine de toutes les espérances occidentales, qui fascinent toujours, et ce depuis plus de 20 siècles ? Monothéisme, chrétienté primitive, et socialisme messianique en seraient les avatars. L'antisémitisme trouve dans cette haine purificatrice une explication. Longtemps la religion a été prétexte des pires atrocités. [...]
[...] Sont-ils porteurs d'espoir ? [...]
[...] Ce sentiment de culpabilité de l'occident est la conséquence d'une domination culturelle issue en partie du colonialisme. Des régimes forts ont permis cette diffusion. Force est de constater que cette domination a duré 2500 ans, pour déboucher aujourd'hui sur un sentiment de culpabilité. Ce sentiment handicape considérablement toute création intellectuelle, et, bien que répandu, peu de personnes peuvent prétendre à la sincérité du sentiment qui les anime. Depuis le XIX e siècle, il y a un sentiment de progrès continu. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture