Pour illustrer les problèmes de vraisemblance, Genette cite deux oeuvres qui ont fait le plus débat quant à la question de la vraisemblance : il s'agit du Cid (Chimène épouse finalement celui qui a tué son père, Rodrigue) et la Princesse de Clèves (scène de l'aveu) : et note que la vraisemblance prend alors la forme de la bienséance : ce qui est vraisemblable, c'est qui ce qui correspond aux normes, aux règles, aux manières qui gouvernent notre comportement (...)
[...] Le vraisemblable est ce qui devrait être, par forcément le vrai. Après la période classique, ce qui subsiste est qui définit le vraisemblable, c'est le principe formel de respect de la norme, c'est-à-dire l'existence d'un rapport d'implication entre la conduite particulière attribuée à tel personnage et telle maxime générale implicite et reçue ( page 74 et 75). Qui dit rapport d'implication dit rapport d'explication le général détermine et donc explique le particulier, comprendre la conduite d'un personnage c'est pouvoir la référer à une maxime admise, et cette référence est perçue comme une remontée de l'effet à la cause : ce qui définit le vraisemblable, c'est le respect de la norme, aussi, cela implique que le personnage agisse d'une façon qui sera commune aux usages pour être vraisemblable (ce que ne fait pas la Princesse de Clèves, au XVIIème siècle, il n'est pas d'usage de faire un tel aveu à son mari) et cet agissement s'explique par la vraisemblance (il doit agir ainsi parce que c'est vraisemblable). [...]
[...] Genette conclue que n'importe quel sentiment pouvant aussi bien, au niveau de la psychologie romanesque justifier n'importe quelle conduite, les déterminations sont presque toujours ici de pseudo-détermination et tout se passe comme si Balzac, conscient et inquiet de cette compromettante liberté, avait tenté de la dissimuler ( ) toutes ces motivations ( ) pour souligner, en fin de compte, ce qu'elles voudraient masquer : l'arbitraire du récit Cynisme littéraire Genette poursuit avec deux textes qui ont en commun une sorte de cynisme littéraire : il s'agit d'un pamphlet attribué à Sorel, intitulé Le jugement du Cid, composé par un Bourgeois de Paris, Marguillier de sa Paroisse et de les Lettres à madame la Marquise de sur le sujet de la Princesse de Clèves, de Valincour. Dans le premier, l'auteur affirme s'exprimer au nom du peuple, indifférent aux règles d'Aristote, et jugeant les pièces en fonction du plaisir qu'elles lui feront éprouvées. [...]
[...] Entre le vraisemblable et le récit émancipé : le récit balzacien A ce récit qui se veut vraisemblable, état de vraisemblable implicite s'oppose un autre récit dans lequel on trouverait les œuvres les plus émancipées de toute allégeance à l'opinion publique : nulle contrainte du vraisemblable, de respect des règles. Selon Genette, ces deux types de récits se rejoignent sur un point : l'effacement des commentaires et des justifications : refus d'expliquer par des commentaires ou des justifications les actes des personnages : dans le premier cas, on les suppose, dans les seconds, on ne peut pas les exposer (trop obscurs). C'est ce qu'il nomme l'ignorance naturelle pour le récit vraisemblable, et l'ignorance savante qui se connaît pour l'autre récit. [...]
[...] Dans le second, l'auteur traite aussi de la vraisemblance du texte, et juge la scène trop coûteuse : au lieu de condamner ces invraisemblances pour elles-mêmes ( ) il les juge en fonction du récit, selon le rapport de rentabilité Arbitraire et motivation Enfin, Genette opère une nouvelle distinction entre le récit arbitraire et le récit motivé, avant de rattacher le récit arbitraire au récit vraisemblable. Le récit arbitraire est la détermination des moyens par des fins . des causes par les effets : c'est le choix que l'auteur a de décider de telle ou telle action. [...]
[...] A ce récit s'oppose le récit motivé, dont le but est de naturaliser la fiction en dissimulant ce qu'elle a de concerté ( ) c'est à dire ce qu'elle a d'artificiel : bref de fictif : il faut faire passer les situations, même les plus invraisemblables pour vraies, caché le faux, justifier les situations, motiver son choix. Enfin, Genette dans sa conclusion rassemble sous le même type de récit le récit vraisemblable et le récit arbitraire : ce qui est arbitraire devant au final être vraisemblable. NB : le numéro de page correspond à la collection points Essais édition Seuil. [...]
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