Quelques années après la seconde guerre mondiale, Samuel Beckett écrit la seconde et majeure partie de son œuvre. Aujourd'hui reconnu comme un des créateurs du théâtre de l'absurde, Samuel Beckett écrit Fin de Partie en français (le fait est qu'il est Irlandais de naissance) aux alentours de 1957, dans la continuité d'œuvres déterminantes telles que En attendant Godot ou L'Innommable, publiés en 1953. Nous étudierons dans Fin de Partie un extrait situé dans la partie centrale de l'œuvre, encadré par les phrases « Hamm : Fais-moi faire un petit tour. » et « Il sort. », extrait dans lequel sont mis en évidence les personnages de Hamm et Clov.
Comment cet extrait s'articule-t-il autour du duo Hamm/Clov, Maître/Valet, pour illustrer le théâtre de l'absurde et constater l'absurdité de l'existence humaine ?
Nous présenterons d'abord Hamm et Clov en tant que Maître et Valet interdépendants dans un univers de la solitude, puis ce même couple, image du monde, confronté à l'absurdité de sa propre existence, et enfin une écriture, une esthétique théâtrale au service de cette absurdité et de la certitude de la mort.
[...] Hamm n'existe que par Clov et inversement. Á eux deux, ils forment une personne complète. Ainsi, au commencement de l'extrait, Hamm, en sa qualité de maître, commande à Clov. On relève la présence d'une série d'impératifs : Fais-moi faire le tour du monde ! ou encore Pas trop vite ! Clov obéit, ses répliques ne sont alors que des réponses à celles de Hamm : Oui. Oui. Là. Là. Hamm veut affirmer constamment sa supériorité sur Clov, l'utilisant en tant que corps que ce soit pour se déplacer ou pour voir ; Regarde la terre. [...]
[...] Hamm refuse d'admettre sa condition, et pourtant, il a conscience de sa misère. Clov ne fait que suivre son maître, il est asservi. Il obéit. L'incapacité de Clov à devenir un être à part entière est exprimée dans cette phrase intéressante : Si je pouvais le tuer, je mourrais content. Cette phrase est au conditionnel, l'action semble irréalisable. Il est nécessaire ici de souligner à quel point tout rejoint la mort dans cet extrait de Fin de Partie. L'action de tuer mène à la mort celui qui en est l'auteur. [...]
[...] Nous présenterons d'abord Hamm et Clov en tant que Maître et Valet interdépendants dans un univers de la solitude, puis ce même couple, image du monde, confronté à l'absurdité de sa propre existence, et enfin une écriture, une esthétique théâtrale au service de cette absurdité et de la certitude de la mort. Les deux personnages qui sont au cœur de Fin de Partie ont une relation de maître à valet, et pourtant, ils sont absolument dépendants l'un de l'autre. Dans l'extrait étudié, le rapport maître valet prend une dimension tout à fait particulière. Le maître, dans l'œuvre de Beckett, est invalide. S'il est l'esprit du couple maître valet, le valet lui est néanmoins nécessaire en tant que corps. [...]
[...] Clov refuse de faire de lui un sujet et se situe comme un personnage passif, ne pouvant pas se décider à tuer Hamm, quand bien même rien ne l'en empêche. C'est ici l'humanité qui est représentée par le valet. Une humanité asservie à une existence précaire et en face de l'évidence que cette existence est précaire, et qui, pourtant, accepte cette existence, et joue pour y échapper. Clov joue vainement, toutefois. Nous pouvons encore une fois revenir au Tour du monde de Hamm tout à fait significatif dans cet extrait. [...]
[...] Le théâtre est connu pour mettre en avant l'action et le discours. Or, phénomène étonnant et paradoxal, cet extrait de Fin de Partie, bien qu'étant indéniablement du théâtre, est composé de dialogues brefs et morcelés, d'un vocabulaire simple, d'un registre de langue souvent familier, et qui plus est, de très peu de texte et d'action. La langue elle- même est au service de l'absurde, du chaos, d'une existence statique. Illustration d'une langue simple et familière : Tu rases ? ou encore Assez ! [...]
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