Texte entre récit et théâtre, poème incantatoire sur les thèmes de la relation amoureuse difficile, de l'absence de désir, La Maladie de la mort est assurément une oeuvre plurielle qui fait jouer la différence et confond les opposés.
Publié en 1982, le texte se présente également comme une longue adresse à Yann Andréa, l'homme que Marguerite Duras aimait, qui avait choisi de vivre avec elle mais qui n'aimait pas les femmes (...)
[...] En effet, comme dans la plupart des textes de Duras, la communication humaine semble le seul moyen de supporter la réalité et peut-être d'en changer. S'opère alors un dialogue entre l'homme et la femme qui révèle leurs interrogations, leurs doutes, leurs difficultés. Par le dialogue, ils révèlent l'inexprimable des êtres et leurs rapports profonds, et nous font sentir leur vie secrète mieux que ne le feraient les analyses, explications ou commentaires d'un narrateur omniscient. Ainsi, voici commence le texte de La Maladie de la mort : Et puis elle demande : Vous voulez quoi ? [...]
[...] Une esthétique de l'inaccomplissement La Maladie de la mort, comme la majorité des œuvres de Duras, met en jeu une abstraction de la relation intime et une irréalisation du désir. Le texte devient alors l'histoire d'une aliaison, d'une frustration, d'une impasse. La tentative de rencontrer le désir et de le satisfaire s'avère négative. C'est cette impossibilité d'aimer que définit le titre du roman, la maladie de la mort Il y dans le texte, une opposition constante entre le vide et le plein, le dedans et le dehors, principalement représentée par l'espace. En effet, l'espace mime la perception des corps. [...]
[...] Peut-être même pendant toute votre vie. Elle demande : Essayer quoi ? Vous dites : D'aimer Ce dialogue exprime ainsi en quelques mots l'essence même du texte, et les principaux enjeux du rapport qui s'établit entre les deux personnages : la confrontation problématique des corps, l'expérience du désir, et la tentative d'aimer. Les personnages n'existent, en réalité, que par leur parole. Nous pouvons toutefois constater qu'il ne s'agit pas là d'un dialogue traditionnel où le je et le tu dominent. [...]
[...] Il y a donc véritablement une dimension cosmologique de la femme, qui repousse l'homme à sa circonférence. L'homme, ainsi envahi par l'espace, le renvoie à son expulsion matricielle. L'amour, vous avez pu vivre de la seule façon qui puisse se faire pour vous, en le perdant avant qu'il ne soit advenu Ainsi Duras met-elle fin à La Maladie de la mort, à l'histoire d'un amour perdu avant d'advenir, et qui pourtant a été viable par cela même. En effet, il a été vécu, mais dans l'invivable, dans l'impossible. [...]
[...] Dans La Maladie de la mort, Duras met en place un schéma énonciatif triangulaire. En effet, le texte invoque trois instance pour exister, le vous le elle et le je Cela nous rappelle tout naturellement La Modification de Butor, où le narrateur s'exprime avec le vous et déstabilise ainsi le lecteur. Duras use ici du même procédé, tout en le faisant varier avec les deux autres instances. Or ce schéma triangulaire interdit la circulation du désir, au lieu de le permettre. [...]
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