Fiche de lecture sur le livre de Jean-Pierre Dupuy intitulé "Petite métaphysique des tsunamis". Cet essai philosophique s'intéresse à la question des catastrophes (naturelles, écologiques, et nucléaires) qui menacent l'homme et aux moyens de les éviter. Surtout, il s'interroge sur la responsabilité de l'homme face à son avenir.
[...] Pour lui, certains risques correspondent à des destructions d'une telle ampleur qu'il sera impossible d'agir a posteriori. La conscience que l'on a du risque se situe ici essentiellement dans l'avenir et c'est donc quelque chose de fictif qui devient la cause de l'action présente. Une fois de plus, on se trouve face au paradoxe souligné par Dupuy. Mais ce que dénonce Beck, c'est la notion de sécurité qui devient le projet normatif de cette société du risque Pour lui, l'utopie de la sécurité face aux risques est défensive et négative, basée sur la peur. [...]
[...] Ce n'est donc pas le manque de connaissance qui nous empêche d'agir mais notre incapacité à croire. C'est pourquoi le principe de précaution échoue à servir de régulation face aux catastrophes à venir. Selon Dupuy, la prudence doit au contraire prendre la forme de la prévention, qui consiste à faire prendre conscience que l'évènement est possible, pour susciter l'action. Il faut que l'avenir et la catastrophe paraissent réels pour que nous puissions travailler à l'empêcher. Dupuy dresse dans le même temps un petit historique de la façon de penser le mal, de Leibniz à Voltaire. [...]
[...] Qui nie en effet la responsabilité entière de l'homme et des ses inventions dans ces deux catastrophes ? Qui oseraient prétendre qu'elles ont une cause qui serait extérieure à l'action d'un ensemble d'hommes ? Même si elle est énorme, il semble évident que la responsabilité reste entièrement humaine. Et il est aussi indispensable de toujours considérer ces évènements comme résultant de la violence humaine et non d'un destin externe, justement pour garder à l'esprit la responsabilité et la culpabilité qui peuvent (peut-être) empêcher la répétition de tels actes. [...]
[...] Celle-ci est donc à réinventer et il est indispensable de créer une nouvelle métaphysique, une éthique du futur pour reprendre l'expression de Jonas. Cette métaphysique doit donc se baser sur le catastrophisme éclairé Jean-Paul Dupuy souligne tout d'abord un paradoxe essentiel dans la façon de penser les catastrophes : la difficulté à les anticiper pour les éviter. Il reprend pour illustrer cette difficulté, la parabole citée par un penseur des grandes catastrophes du XXème siècle, Günther Anders, dans laquelle Noé annonce le déluge à venir et pleure aujourd'hui les morts de demain pour que cela devienne faux En effet, le drame de celui qui prophétise la catastrophe est que, soit il n'est pas entendu, et la catastrophe a bien lieu, soit elle n'a pas lieu et cela signifie que la prophétie était fausse. [...]
[...] Si celui- ci n'a pas lieu, on ne voit pas a posteriori la nécessité de l'action. L'annonce d'une catastrophe n'est pas à proprement parler une pré- vision : on ne prétend pas dire ce que sera l'avenir mais simplement ce qu'il aurait été si on n'y avait pas pris garde. Ainsi, la catastrophe, bien que non réalisée, conservera son statut de possible, non pas au sens où il serait encore possible qu'elle se réalisât mais au sens où il restera à jamais vrai qu'elle aurait pu se réaliser. [...]
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