La Nature est un des thèmes classiques de la poésie. Les arbres notamment ont depuis toujours attiré l'œil du poète et nourris leur inspiration poétique, de Victor Hugo avec le poème Aux Arbres des Contemplations à Robert Desnos avec le poème « Il était une feuille » de Fortune . Dans le poème « La demeure entourée » de Supervielle, nous retrouvons le thème de la nature. Cependant, la façon dont elle est présentée par Supervielle dépasse le cadre de la description d'un paysage ou comme point de départ d'une métaphore. Nous retrouverons à la fois des éléments de la poésie classiques : poèmes en vers et modernes car il est non rimé. « La demeure entourée » a été publiée dans la partie La Chambre du recueil Les amis inconnus en 1934. Il s'agit de son troisième recueil les premiers étant Débarcadères, publié en 1922 suivi de Gravitations, (1925). Il également écrivain, il a écrit des nouvelles et des contes qui pour la majeure partie son influencé par l'empreinte laissée dans son esprit de son exil en Uruguay. Ses recueils de poésie sont eux marqués par l'oxymore qui semble chère à Supervielle : Le Forçat innocent, Le Corps tragique, L'Oublieuse mémoire sans oublier Les amis inconnus qui n'échappe pas à cette figure de style. Supervielle est contemporain du mouvement surréaliste : Le manifeste du Surréalisme d'André Breton date de 1924 et ses premiers recueils de 1922 et 1925. Cependant, il se situe en marge de ce courant, n'adhérant ni à l'écriture automatique ni au centrage sur l'inconscient. Il préfère une poésie plus humaine afin de renouer avec le monde.
[...] Il y a toujours ce questionnement du poète à mettre en relation avec celui des arbres. Ici, sa réflexion se situe davantage sur le problème du langage poétique et de sa compréhension avec l'expression : qui comprennent sa langue Puis s'opère une rupture marquée par la conjonction de coordination : et Il se dit qu'il doit écrire pour lui- même à l'image de la rivière qui dit : Je coule pour moi seule tant pis s'il est trop en avance comme lorsque la rivière dit : tant pis pour ces gens-là et Et vais me devançant sur son temps ou au contraire pas dans l'air du temps puisque Les hommes reviennent toujours sur leurs pas Ce qui signifie qu'il pense que les hommes un jour reviendront sur sa poésie et essayeront au moins de le comprendre ou de s'y intéresser un peu. [...]
[...] rend compte de ce qui a dû se passer avant. Le poète a dû essayer de convaincre la montagne d'abandonner ses considérations trop ‘terre-à-terre' au goût du poète pour l'amener vers plus de spiritualité, mais la montagne reste septique comme le montre la présence du point d'interrogation. L'incompréhension entre la forêt et le poète se situe au niveau du langage comme le prouve le vers 15 : Il cherche des arbres différents qui comprennent sa langue Elle se note également par la position de questionnement des arbres par rapport au poète renforcé par l'anaphore que l'expression : Que peut-il aux vers 8 et 11. [...]
[...] A cause de cette relation discordante avec la nature, le poète ne peut pas prendre contact avec elle. Il est dans l'impossibilité du poète de s'approprier les éléments naturels. Il recherche en vain des arbres qui voudraient bien se plier à son imaginaire, voudrait faire entrer la montagne dans sa poésie. Il est même rejeté par la rivière qui l'amalgame à n'importe quel homme. En effet, la forêt semble parler du poète en tant que tel dans le vers qui précède l'intervention de la rivière : Il cherche des arbres différents qui comprennent sa langue La rivière répond en donnant son avis général sur les hommes : j'ignore les hommes Ce qui est tragique pour le poète qui dans l'imaginaire collectif, est en accord parfait avec la nature, sait la voir et la décrire sous d'autres perspectives. [...]
[...] Ils essayent d'aider mais comme ils remarquent qu'ils ne peuvent pas : Notre monde branchu, notre monde feuillu Que peut-il dans la chambre ou siège ce lit blanc Que peut-il pour cet homme et son bras replié Cette incapacité est renforcée par l'anaphore de la proposition : Que peut-il Ils restent alors distants : Prenons avis de nos racines délicates, Il ne nous a pas vu (vers 13 et 14). Cette distance renvoie à leur caractère farouche, mais aussi annonce la rupture dans l'attitude de la nature. De même lorsque les arbres s'intéressent au poète, l'expression : les bois ont-ils leur mot à dire là-dedans ? montre également qu'ils commencent à reprendre le dessus sur le poète. [...]
[...] L'étoile se montre également égoïste avec la place du pronom personnel de la première personne du singulier, mais à l'inverse de la rivière elle parait beaucoup moins assurée. Tout ceci coïncide tout à fait avec les croyances animistes dont nous avons précédemment dressé un parallèle. La nature semble donc être au centre des préoccupations du poète. Le fait que, comme nous venons de l'étudier, le poème ne soit constitué que d'un dialogue entre les éléments naturels en montre l'importance et la prépondérance par rapport au poète. [...]
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