Héraclite, mythes, Genèse, néant nietzschéen, Hasard ou nécessité
Jean d'Ormesson publie, en juin 2014, un essai intitulé Comme un chant d'espérance aux éditions Héloïse d'Ormesson. L'idée de cet ouvrage, comme il l'explique dans son introduction, lui est « revenue en mémoire par un détour bizarre ». Il s'agit en fait de l'idée chère à Flaubert d'un roman sur rien. Pour préparer ses deux précédents ouvrages, il s'est intéressé en néophyte à un domaine qui lui était étranger mais qui a fait des progrès colossaux au cours du dernier siècle environ, celui de la physique mathématique et de la cosmologie.
[...] Le bien est souvent à l'origine du mal quand il devient une certitude. Le mal n'existe pas avant les hommes qui pourtant le maudissent. Avant l'homme, ni bien ni mal. Juste un tourbillon de hasard et de nécessité. Arrive la vie. Le mal n'est toujours pas là. La souffrance pointe. Le monde change puisqu'il est dans le temps. Il vieillit, se dégrade, se renouvelle. Les bactéries se transforment. Les amibes dépérissent. Les algues meurent. Les éponges et les méduses aussi. [...]
[...] Chacun d'entre nous a au moins une chance : celle d'être né. Mais beaucoup maudissent le hasard qui les a fait sortir de ce néant où personne ne souffre jamais. Les enfants que je n'ai pas eus, disait Cioran, ne savent pas tout ce qu'ils me doivent. Déjà l'Ecclésiaste affirmait : J'ai préféré l'état des morts à celui des vivants ; et j'ai estimé plus heureux celui qui n'est pas né encore et n'a pas vu les maux qui sont sous le soleil. [...]
[...] C'est dans cet univers que nous vivons. Comme si Hasard et nécessité assurent le fonctionnement du monde. Ils ont pu présider à sa naissance et à sa création. Mais alors, d'où vient l'espace, tantôt plein, tantôt vide et toujours universel ? D'où vient le temps qui nous paraît si simple et qui est terriblement et cruellement compliqué ? D'où vient la nécessité ? Car il n'y a pas de nécessité de la nécessité. Et le hasard est-il vraiment capable de produire un monde où règne un ordre réglé par une rigueur implacable ? [...]
[...] Ce qu'il y a de mieux dans le Soleil, c'est la lumière. Nous savons tout de la lumière, sauf l'essentiel. Nous savons comment ça marche, comment ça fonctionne, nous savons la capturer, la conserver, la décomposer et la recomposer. Nous savons comment nos yeux la reçoivent et comment nous percevons. Mais nous ne savons pas d'où vient le lien si banal et si fort entre la lumière qui se balade et la vision que nous en avons ni pourquoi il s'est établi. [...]
[...] Le mur de Planck nous en empêche. Le mur de Planck, c'est cet instant infime, disons un milliardième de seconde, derrière lequel on ne peut pas aller voir si l'on remonte le temps jusqu'au Big Bang. C'est-à-dire que le Big Bang est lui-même invisible, qu'on ne peut remonter qu'à l'instant immédiat qui le suit. Du coup, bien sûr, on peut se demander s'il a eu lieu, ou si l'univers n'est qu'une respiration : expansion/rétractation, qui n'aboutit jamais vraiment Au-delà du mur de Planck, les lois de l'univers ne sont plus valables. [...]
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