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Ces notes de voyage tracent un tableau extrêmement noir de la gestion française en Indochine. Les exactions des soldats constituent une trame de fond à tous les témoignages qu'Andrée Viollis recueille. Les auteurs ne semblent pas inquiétés par les autorités coloniales qui ferment facilement les yeux, voire encouragent certains comportements violents (des militaires sont récompensés pour leur "zèle" dans la répression). Si le ministre Reynaud demande directement à A. Viollis : "Je compte beaucoup sur vous pour me fournir les renseignements qui pourront décider de mes réformes, car je sais trop qu'on essaiera de me cacher bien des choses", elle ne parvient que difficilement à lui rapporter ce qu'elle a vu, gênée par l'entourage du ministre, puis par le désintérêt de plus en plus manifeste de celui-ci.
Un élément essentiel est indiqué en avant-propos. Sont nommés "communistes" indistinctement les nationalistes désirant voir les principes démocratiques appliqués dans leur pays, les miséreux qui demandent de l'aide et tous ceux qui n'ont pas le "don de plaire" à l'administration ou à la police : "À leur tour ceux-ci relèvent cette dénomination et s'en font gloire". Or, le simple fait d'exprimer ou d'adhérer à une opinion dite "communiste" est répréhensible. Par la répression dure et en qualifiant de communiste tous ceux qui peuvent remettre en question sa gestion, le pouvoir colonial suscite lui-même l'adhésion à un mouvement clairement nationaliste (...)
[...] On dénombre une quinzaine de morts. Du côté des planteurs, Andrée Viollis montre une totale déconnexion de la réalité : C'est idiot de leur avoir permis de parler ! Avec cette instruction qu'on leur a donnée, ces billevesées de liberté, d'égalité qu'on leurs a fourrées en tête, ils deviennent intraitables. Impossible maintenant d'avoir de la main-d'œuvre bon marché. Lorsqu'elle leur parle des exactions, l'argument principal reste qu'il ne faut pas généraliser. S'ils lui décrivent une situation économique difficile du fait de la crise, un vieil homme lui rapporte que les planteurs ont surtout fait l'erreur de ne pas épargner durant la spéculation sur le boom du caoutchouc en 1925. [...]
[...] Mais il en arrive de nouvelles, toujours, toujours Le voyage d'Andrée Viollis dure d'octobre à décembre 1931. Ses notes décrivent une femme pleine d'audace qui saisit pleinement les opportunités qui se présentent à elle pour aller au plus près des zones sensibles, afin de vérifier les récits que l'on a pu lui rapporter. Il reste cependant à noter qu'il s'agit ici de notes de voyage parfois très brutes, excusant alors quelques passages délicats à comprendre et quelques sous-entendus appelant à des précisions. [...]
[...] Les conditions sanitaires conduisent parfois au décès d'un prisonnier sans qu'il ait pu être interrogé. Un exemple d'exaction, l'erreur des fossoyeurs : le 13 septembre à 6000 individus se dirigent sur Vinh pour porter leurs doléances contre les impôts. Ils ne semblent pas qu'ils aient été armés. Puisqu'ils franchissent tous les barrages, des avions avec des bombes sont envoyés. On compte alors 157 morts. Le soir, des habitants reviennent pour enterrer les morts, suivis rapidement par les avions qui bombardent à nouveau ce qu'il semble être une nouvelle manifestation. [...]
[...] Le ministre des Colonies Paul Reynaud décide de visiter le pays et Andrée Viollis fait partie de la délégation (avec d'autres officiels, journalistes, romanciers ce qui lui permet de rencontrer pendant trois mois de nombreux officiels, mais aussi des militants anticolonialistes. - 1935 : Première parution de son recueil de notes intitulé S.O.S Indochine chez Gallimard, avec une préface d'André Malraux. L'ouvrage est un réquisitoire anticolonialiste et fait scandale à sa sortie, étant qualifié d'œuvre antifrançaise Il est réédité en 1949 et en 2008, coïncidant alors avec la polémique sur l'œuvre civilisatrice de la France et le débat sur les lois mémorielles. III) L'essentiel : Ces notes de voyage tracent un tableau extrêmement noir de la gestion française en Indochine. [...]
[...] Les exactions des soldats constituent une trame de fond à tous les témoignages qu'Andrée Viollis recueille. Les auteurs ne semblent pas inquiétés par les autorités coloniales qui ferment facilement les yeux, voire encouragent certains comportements violents (des militaires sont récompensés pour leur zèle dans la répression). Si le ministre Reynaud demande directement à A. Viollis : Je compte beaucoup sur vous pour me fournir les renseignements qui pourront décider de mes réformes, car je sais trop qu'on essaiera de me cacher bien des choses elle ne parvient que difficilement à lui rapporter ce qu'elle a vu, gênée par l'entourage du ministre, puis par le désintérêt de plus en plus manifeste de celui-ci. [...]
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