Exilé en Angleterre en mai 1940, Albert Cohen y écrit dans la revue France libre sous le pseudonyme de Jean Mahan plusieurs récits ; le premier paraît le 20 juin 1941 et s'intitule "Angleterre", vient ensuite en février 1943 "Churchill d'Angleterre", le texte que nous nous proposons d'étudier. S'articulant de manière atypique, ce texte, d'un genre épidictique semble perdre le lecteur pour finalement mieux le rallier à sa cause. L'auteur se fait ici l'aède d'un pays en danger, seul avec son héros, Churchill. Il puise dans son imaginaire, dans son univers littéraire imprégné de légendes, de mythes antiques et de récits bibliques pour inventer toute une mythologie en donnant à la lutte de l'Angleterre contre Hitler et l'Europe nazie une dimension légendaire. Mais la juxtaposition du lyrisme et d'un langage enfantin met à jour les procédés de la rhétorique pour finalement la réinventer.
[...] Ainsi, le texte offre un véritable éloge, qui se transforme peu à peu en un appel à soutenir Churchill et à combattre Hitler. III/ Une rhétorique à la fois discréditée et réinventée Négation de la rhétorique La véritable originalité du texte réside dans le fait que l'auteur mette en lumière tous les procédés de la rhétorique en allant, de manière volontaire, contre ceux-ci. Ainsi, si l'on examine les différentes règles du bon usage de la rhétorique, on peut s'apercevoir que ces dernières sont successivement bafouées par Cohen. [...]
[...] Conclusion En conclusion, nous pouvons dire que ce texte entre véritablement en rupture avec les éloges habituels. Il apparaît finalement comme un miroir déformé du genre classique de l'éthopé. En effet, à travers une construction pour le moins déstabilisante faite de digressions et de ruptures de rythme, Cohen s'identifie à Churchill, tous deux apparaissant visionnaires et seuls contre l'adversité. Tantôt perdant le lecteur, tantôt le mettant au cœur du discours en utilisant un ton déclamatoire, Cohen joue avec la rhétorique. [...]
[...] On peut signaler dans ce texte le jeu entre la déclamation et l'introspection. La parenthèse a ici un rôle prédominant puisqu'elle marque l'entrée dans la pensée de l'auteur et non plus la simple transcription de sa parole. Ainsi, la typographie même met en valeur ce mouvement de l'extérieur vers l'intérieur. La parenthèse est mise en relief de façon surprenante puisqu'elle se trouve après un point. Elle est donc utilisée a contrario de sa fonction première, loin d'être allusive, elle marque un long développement de la pensée de l'auteur. [...]
[...] S'articulant de manière atypique, ce texte, d'un genre épidictique semble perdre le lecteur pour finalement mieux le rallier à sa cause. L'auteur se fait ici l'aède d'un pays en danger, seul avec son héros, Churchill. Il puise dans son imaginaire, dans son univers littéraire imprégné de légendes, de mythes antiques et de récits bibliques pour inventer toute une mythologie en donnant à la lutte de l'Angleterre contre Hitler et l'Europe nazie une dimension légendaire. Mais la juxtaposition du lyrisme et d'un langage enfantin met à jour les procédés de la rhétorique pour finalement la réinventer. [...]
[...] Il y a donc un fort investissement et engagement du narrateur prenant fait et cause pour Churchill. Le style haché alternant phrases courtes et phrases longues ainsi que le langage parlé trahissent la présence de l'auteur et miment la montée des différentes émotions qui l'animent. Mais ceci est calculé, ce n'est pas en réalité ses émotions qu'il laisse transparaître mais plutôt les émotions qu'il souhaite faire ressentir au lecteur. Il est ici dans le movere qui sert efficacement sa stratégie argumentative. [...]
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