Madeleine est un personnage féminin que René Char affectionne particulièrement. De “Madeleine à la veilleuse” à “Madeleine qui veillait”, il n'y a qu'un pas. En effet, René Char découvre les peintures de Georges de La Tour au cours d'une exposition “ Les peintres de la réalité en France au XVIIème siècle” à l'Orangerie à Paris. Suite à cette visite, il décide d'écrite le poème en prose “Madeleine à la veilleuse”, en 1947, inspiré du tableau du même nom. A peine a-t-il terminé l'écriture de ce poème qu'il rencontre, en plein Paris, une femme portant le même nom que le personnage de sa poésie éponyme. C'est alors que le poète écrit “Madeleine qui veillait”. Ce poème écrit en prose témoigne de la rencontre troublante entre l'artiste et cette jeune femme, en plein Paris.
[...] Restez accueillant. Vous ne vous verrez pas mourir". Qui pourrait bien prononcer une telle phrase, dans une situation bien réelle, au bout de cinq minutes, lorsqu'on ne connaît pas la personne ? Cela semble peu probable. D'autre part, grâce à cet environnement à la frontière du réel, nous assistons à une certaine libération de la relation. Comme nous basculons dans un monde presque onirique, la relation avec Madeleine paraît évidente et simple, même si le poète ne connait pas directement cette femme (il connaît bien par contre le tableau de Georges de La Tour). [...]
[...] Madeleine est en réalité fantomatique. Si le poète est bien réel, la jeune femme pourrait bien avoir une certaine inconsistance. Nous notons tout d'abord qu'elle apparaît presque comme elle disparaît. En effet, Char nous fait part du caractère assez immédiat de la rencontre. Dans les couloirs du métro, cette jeune femme semble surgir de nulle part et on peut lire : "Soudain une jeune femme". Le caractère spontanné rend peut crédible la thèse de la rencontre réelle. Quant à la séparation, elle est également dans le même registre. [...]
[...] Madeleine est maigre et pâle. Elle possède une "silhouette fâcheuse". D'autre part, si l'on pousse un peu plus la signification de ce poème en prose, nous pourrions presque dire que René Char est en réalité un voyant. Cette rencontre, totalement surréaliste fait directement écho au poème eponyme écrit à partir du tableau de Georges de La Tour. Finalement, nous pourrions-nous demander si cette Madeleine n'est pas le fantôme, souvenir tenace du personnage que René Char a mis en scène. Un autre élément qui pourrait faire directement écho à cette hypothèse est le sous-titre de ce texte qui s'intitule "Une communication". [...]
[...] Rencontre qui se réalise dans un contexte un peu surprenant. Par la suite, les péripéties se succèdent et on assiste aux déambulations nocturnes de ce couple improvisé. Enfin, le dénouement arrive et "Madeleine s'en va, s'efface du bas des marches de l'escalier du métro". Toutes ces étapes sont accompagnées de repères spatio-temporels qui confortent cette inscription dans le réel. Lorsque le texte commence, nous savons qu'"il est plus de onze heures". Vers la fin du texte, le poète ajoute un marqueur "il est minuit et demi". [...]
[...] Le fait d'avoir situé cette action le soir permet de légitimer une certaine dimension onirique. Un autre élément qui n'est pas sans importance concerne les personnages. Ils ne sont que deux. Le métro, qui d'ordinaire est un lieu de passage et bien fréquenté paraît vide. Ainsi, nous pouvons relever "dans les couloirs déserts d'une station". Les deux personnages se retrouvent dans une bulle, complètement hors de la réalité. Ces deux personnages échangent des paroles qui paraissent également hors du réel, que ce soit tant pour leur contenu que pour leur enchaînement. [...]
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