1979, 2016, Une si longue lettre, Mariama Bâ, Chanson Douce, Leila Slimani, émancipation, monologue, roman épistolaire, préjugés, domination, inégalité homme-femme, pression du groupe
Dans un contexte où la parole n'est pas suffisamment laissée aux femmes, des écrivains qu'ils soient homme ou femme offrent une vision de la femme à travers le monde. Ainsi, Mariama Bâ, auteure sénégalaise, dans Une si longue lettre, publié pour la première fois en 1979, nous fait entendre la voix le monologue d'un personnage féminin, Ramatoulaye, dans un roman épistolaire composé d'une seule lettre de Ramatoulaye à sa meilleure amie. Ce roman rappelle la condition des femmes, alors que mariage forcé et polygamie sont parmi les moeurs du pays. D'autre part, Leila Slimani, publie Chanson Douce qui reçoit le prix Goncourt 2016 et sera largement traduit et diffusé. Son roman aborde de multiples thèmes d'actualité, dont ceux des préjugés et de la domination.
En cela, nous pouvons nous poser la question suivante : comment les personnages de ces deux oeuvres parviennent-ils à s'émanciper d'un monde régi par la domination et pétri d'inégalités ?
[...] La chronologie est prise entre le temps de l'énonciation de la lettre écrite par la narratrice à Aïssatou, dans un présent de l'énonciation, et celui de la narration de la vie de couple de Ramatoulaye et de son mari, ancré dans le passé. De même, cette double chronologie fait écho au temps d'écriture du livre de Mariama Bâ et au temps de lecture. Ces cadres temporels enfermant sont le symbole de la bride du temps qui fait de Ramatoulaye une femme moins attirante que Binetou pour son mari. [...]
[...] Chez Mariama Bâ, les castes entraînent un rejet des non-sénégalais : « « Je ne comprends pas. » Elles non plus ne comprenaient pas l'entrée de Modou, une « personnalité », dans cette famille de ndols, d'une extrême pauvreté. » (p.76). Et cette différence de caste entre Binetou et Ramatoulaye ne sera pas sans conséquences. Chez Leila Slimani, la différence sociale porte aussi sur la nationalité : « Pas de Maghrébine : Myriam a été très claire. Elle ne veut pas engager une Maghrébine pour garder les petits. [...]
[...] Pourtant, si la fin de Chanson douce est tragique et ne pouvait être évitée, Ramatoulaye termine sa lettre sur un fond d'espoir : « Je t'avertis déjà, je ne renonce pas à refaire ma vie. Malgré tout - déceptions et humiliations - , l'espérance m'habite. C'est de l'humus sale et nauséabond que jaillit la plante verte et je sens pointer en moi des bourgeons neufs. » Entre la métaphore printanière et l'envie de « refaire », Mariama Bâ donne espoir au lecteur dans la possibilité d'une nouvelle vie, d'une nouveau départ. Ces deux romans nous permettent de comparer le statut de la femme dans plusieurs milieux : l'Afrique et le milieu bobo parisien. [...]
[...] Pourtant, la femme s'émancipe pour donner un espoir et montrer une société en progrès : la femme est politisée, éduquée et a un travail : « humbles institutrices d'humbles écoles de quartiers. » (p.51). La femme franchit les limites de cette domination vers une progressive émancipation. De la domination masculine à celle de toute une société, comment ces femmes peuvent-elles sortir des attentes de tout un pays ? Nous analyserons ce cadre social qui, sur fond de racisme, vient empêcher un individu de diverger de l'avis du groupe. [...]
[...] Mariama Bâ aussi place le personnage blanc comme un modèle du personnage central : « Aïssatou, je n'oublierai jamais la femme blanche qui, la première, a voulu pour nous un destin hors du commun. Notre école, revoyons-la ensemble, verte, rose, bleue, jaune, véritable arc-en-ciel ». Les couleurs émanent de la blancheur de cette « femme blanche » dont parle Ramatoulaye à son amie Aïssatou. Mais c'est sur fond de racisme que se construisent les personnages. « Son racisme, évident tout à l'heure. Tout lui donnait envie de fuir. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture