Entre le film de science-fiction et le film d'animation français, Immortel (Ad Vitam), sorti en France le 24 mars 2004, constitue le troisième film d'Enki Bilal. En effet, le dessinateur, scénariste de BD et réalisateur français Enes Bilal, plus connu sous le pseudonyme d'Enki Bilal, signe ici une adaptation de sa propre trilogie de bandes-dessinées Nikopol (cf. La Trilogie Nikopol : 1, La Foire aux immortels ; 2, La Femme piège ; 3, Froid Equateur). Il explore ici un monde futuriste, qui demeure intrinsèquement lié, et dominé, par des éléments du passé et du présent.
[...] A cet idéal de la loi s'oppose très rapidement le rêve d'une harmonie par le calcul, un imaginaire qui consiste à se représenter le gouvernement comme une technique de pouvoir. Hobbes, dans le Léviathan, au XVIIème siècle, offre un exemple magistral de cette façon de penser le gouvernement sur le modèle de la machine. Selon Hobbes, l'homme - fait à l'image de Dieu - imite l'art de la nature pour à son tour (comme Dieu a fait le monde) créer des « animaux artificiels », des automates qui imitent le vivant « comme une montre ». [...]
[...] De façon analogue, Immortel ad vitam illustre assez clairement ces éléments. Il apparaît en effet clairement que cet idéal grec issu de l'Antiquité du règne de la loi - qui pourrait être symbolisé par la pyramide où vivent les Dieux en surplomb de la Terre - s'oppose à celui d'une gouvernance par les nombres illustrée par le pouvoir officiel soumis aux intérêts scientifiques, de manipulation génomique. II/ Eugenics ou les dérives du transhumanisme vers l'eugénisme : Un thème qui m'a semblé particulièrement intéressant à développer est celui du transhumanisme et des dérives eugéniques qu'il peut engendrer. [...]
[...] Comme le met en évidence le professeur M. Laurent Alexandre « Contrairement à ce que prévoient les fictions d'anticipation, la sélection embryonnaire ne concernera pas qu'une petite partie de la population. Elle sera généralisée. Il sera en 2100 jugé aussi étrange de laisser de petits enfants naître avec un QI inférieur à 160 qu'aujourd'hui de mettre sciemment au monde un bébé porteur de trisomie ou gravement déficient mental. Une stigmatisation sociale s'attachera aux enfants nés « naturellement », par le jeu du hasard de la cuisine génétique. [...]
[...] Central Park est devenue « zone interdite » pour les mortels et est surplombé par une pyramide assez mystérieuse dans laquelle vivent les dieux égyptiens. Au sein de la pyramide vivent les Dieux. Parmi eux, Horus d'Iraknopolis - Dieux des cieux - vient d'être condamné à mort pour s'être rebellé. Si sa dernière volonté est de pouvoir vivre sept jours au milieu des mortels ; il dispose en réalité d'1 semaine pour mener à bien son projet diabolique. Il cherche à séduire une femme humaine pour s'accoupler avec elle pour ne pas perdre son immortalité. [...]
[...] Notre corps sera de plus en plus habité par des artefacts, parce que le double mouvement d'externalisation et d'internalisation est inévitable pour nos objets techniques comme il l'est pour os représentations mentales. L'hybridation est l'avenir de l'homme. » (Tisseron, 2018). Une réflexion qui rejoint directement les vers de Baudelaire sur l'inéluctabilité de l'hybridation que Nikopol récite : « Sans cesse à mes côtés s'agite le Démon/ Il nage autour de moi comme un air impalpable/ Je l'avale et le sens qui brûle mon poumon/ Et l'emplit d'un désir éternel et coupable. » (Baudelaire, Les Fleurs du mal). [...]
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