Le XIXème Siècle voit les astres se montrer favorables aux ambitions du genre romanesque. Les progrès techniques et le faible coût de production des livres, le développement de l'instruction ainsi que la multiplication des journaux libèrent les écrivains et leur ouvrent des champs exploratoires qui paraissent infinis. La diversité du public, avide de divertissement mais aussi de découverte crée une attente forte dans laquelle les romanciers vont s'engouffrer.
[...] Enfin il importe de considérer que les contemporains eux-mêmes voyaient dans les romans-monde la projection kaléidoscopique de leurs auteurs. Baudelaire est ainsi le premier à souligner combien tous les romans de Balzac mettent scène leur propre concepteur. Dans ses Salons de 1846 il reprend toutes les facettes des types balzaciens et il les applique au romancier lui-même « Le plus héroïque, le plus singulier, le plus romantique et le plus poétique des personnages qu'il a tirés de son sein. ». [...]
[...] Rien de ce qui est humain ne peut échapper à l'examen du romancier. Stendhal propose comme sous-titre de son roman Le Rouge et le Noir : Chronique de 1830 qui est précisément l'année de composition du livre lui-même. Il veut signifier ainsi que, derrière la fiction, son récit veut peindre ses contemporains, sans le moindre recul. Le terme chronique rappelle ce rapport à l'immédiateté et produit aussitôt un premier effet de réel et une attractivité forte. La politique s'invite ainsi dans le roman, comme chez Chateaubriand dans ses Mémoires. [...]
[...] La publication en feuilletons des romans encourage cette répétition car le nombre de pages est limité pour chaque chapitre, et qu'il faut une trame qui permette aux lecteurs de se retrouver dans les différents romans qu'ils suivent en parallèle. Les systèmes édifiés par les romanciers se détruisent aussi de l'intérieur. La volonté démiurgique du romancier se heurte aux contingences. Balzac ne cesse de déplacer ses romans dans sa classification, César Birotteau se voit balloté des Etudes philosophiques aux Etudes de mœurs, sans que Balzac ne soit satisfait de ce déplacement. Le Docteur Pascal traduit la fragilité de l'édifice des Rougon-Macquart. [...]
[...] Le romancier devient funambule et propose un véritable monde intérieur. La mine dans Germinal n'a rien en fait d'une intention encyclopédique, elle traduit d'abord une obsession de Zola, celle de la dévoration. Le roman se bâtit sur cette imposture. Zola établit une métaphore signifiante par paronomase entre la mine et le Minotaure. Il bâtit son roman sur le mythe de Thésée, héros voyageur et l'habille ensuite d'une carapace réaliste. Maupassant dans Apparition dévoile l'artifice en transposant le conte de La Belle au bois dormant dans la campagne normande de 1885. [...]
[...] George Sand met en valeur des relations sociales simples et peu corrompues par leur siècle dans ses romans champêtres. Mais les fresques romanesques débordent le cadre des frontières pour faire entrer le monde entier dans leur fiction recomposée. Jules Verne connaît un succès considérable avec ses romans géographiques. Ainsi Le Tour du Monde en quatre-vingts jours sera vendu à exemplaires du vivant de son auteur. De même Pierre Loti fait découvrir à ses lecteurs des mondes lointains, dont l'exotisme charme l'imagination tout en servant, comme chez George Sand, de miroir inversé du monde français. [...]
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